Le Paradigme du développement

LE PARADIGME DU DEVELOPPEMENT

On a eu tendance dans le passé à considérer les pays en développement comme des pays "jeunes" et les économies comme un corps humain qui croît, qui est faible ou fort, qui peut être malade, qui a besoin d'un temps d'apprentissage, ... et dont les "parents" seraient les pays industrialisés. L'industrialisation et l'aide ont été ainsi au coeur des politiques du développement. Toutefois, dans les pays d'Asie à fort peuplement, la contrainte démographique a orienté les choix, plus qu'ailleurs, vers la recherche de l'autosuffisance alimentaire, que ce soit en Inde ou en Chine. L'expérience a montré que la progression du pouvoir d'achat des paysans a été un atout décisif pour l'industrie, et que le monde rural pouvait jouer un rôle actif dans une transition. La réforme agraire initiée en Corée dans les années 1950, comme l'essor de l'éducation à la même période, sont considérés comme des facteurs explicatifs de la réussite industrielle des décennies qui ont suivi. L'expérience des politiques de développement invite donc à reconsidérer l'idée de progrès héritée du XVIII° siècle à laquelle a succédé, au XX° siècle, celle de modernité, dans les pays du Nord. Si le Japon a fait sienne la première, il renvoie de la seconde, par sa culture, une image qui le distingue de l'ensemble euro-américain. De la même façon, les pays du Sud, dans toute leur diversité, ont absorbé le développement chacun à leur manière.

On peut distinguer trois situations :

- Celle du "modèle asiatique" (l'Asie de l'Est) d'une transition industrielle réussie reposant, sur une combinaison de modernité-tradition, dans un contexte politique d'Etat fort et autoritaire, sans déséquilibres économiques majeurs.

- A l'autre pôle, celle des pays de l'Afrique sub-saharienne à spécialisation primaire persistante, où l'auto-suffisance alimentaire est assurée au sud du Sahel, dans les pays de la zone verte, et où les solidarités traditionnelles sont restées actives. Les Etats sont faibles et certains pays sombrent dans la guerre civile (Libéria, Rwanda) ou dans le népotisme généralisé (Zaïre). Les indicateurs statistiques tendent à donner de ce sous-continent une image pessimiste, notamment à cause de l'importance du secteur informel et d'un taux de croissance démographique encore élevé.

- Entre ces deux ensembles, les pays d'Amérique latine, de l'Afrique du Nord, du Moyen-Orient, de l'Asie du sud, avec une transition caractérisée par des secousses et des déséquilibres majeurs, tant sociaux qu'économiques : régression des agricultures vivrières, semi-industrialisation mais vulnérabilité des systèmes industriels, perturbations monétaires, chocs des cultures...

L'expérience du développement a été aussi celle d'une expérimentation, c'est-à-dire une recherche de voies nouvelles vers une autonomie économique plus grande. Si les modèles d'industrialisation qui ont fait leur cet objectif ne sont pas parvenus à le réaliser ou seulement partiellement, d'autres voies ont été explorées.

Deux exemples peuvent être retenus à ce titre : celui du transfert de technologie et celui des expériences des banques solidaires.

- L'industrialisation a posé, très tôt, le problème du choix des techniques : fallait-il choisir des techniques qui maximisaient la production ou des techniques qui maximisaient l'emploi? Ce débat a été particulièrement important en Inde dans les années 1950 et 1960. Puis les questions se sont

...