Recueil De Donnée

Un recueil de données

Lors de mon stage en unité de soins aigus Alzheimer, j'ai eu l'occasion de mener un recueil de données exhaustif concernant l'entrée dans le service d'un nouveau patient. L'organisation des entrées se fait la plupart du temps en début d'après-midi après la relève de 13:30, où l'on apprend les motifs de l'hospitalisation. Étant donné la pathologie bien spécifique pour laquelle les patients sont accueillis ou sont évalués, le recueil se fait auprès de la famille, d'un proche, ou de la précédente structure de résidence. L'entretien se déroule dans un bureau d'accueil entre la personne de confiance et l'infirmière. Il s'agit ici de recueillir un maximum de données afin de cibler le mieux possible la personne à soigner, d'établir une première évaluation, de réaliser un bon transfert, un raisonnement clinique pertinent pour mettre en place un projet de soins. Ayant pu déjà dans un premier temps, assister auprès de l'infirmière à un premier entretien, j'ai pu constater le déroulement de cet exercice en tant que simple observateur. Sans les maîtriser ou être à l'aise avec, je connaissais quelques outils importants.

La première question que j'ai posée lorsque l'infirmière m'a proposé de réaliser le recueil de données de M. M, a été de savoir, non sans attendre la réponse, si un entretien avait lieu directement avec le patient. Elle m'a répondu qu'effectivement, les patients accueillis sont dirigés dans ces services pour des démences à type Alzheimer, des démences d'autres types, des troubles de comportement, des désorientations, des pathologies ne leur permettant pas de donner des informations pertinentes les concernant. Il faut donc compter sur un proche, de la famille, le médecin traitant, etc. Pour ma part, il s'agissait de m'entretenir avec la famille d'accueil de M. M. Je me dirige donc vers le bureau prévu à cet effet lorsque l'infirmière me demande où je vais. Je lui explique que j'ai déjà assisté à un recueil de données et que l'on avait accueilli la personne concernée dans le bureau d'accueil. Elle m'interpelle et m'apprend que la famille ne peut pas se déplacer et que l'entretien se fera par téléphone. Un peu désarçonné, je vois très vite s'effondrer l'idée préconçue que j'avais du recueil de données dans la chambre au chevet du patient. Le service accueillant trois entrées dans la même après-midi, je m'installe avec l'infirmière dans la salle de relève. Il y a du passage, des aides-soignantes et une infirmière travaillent sur d'autres dossiers dans la même pièce. Je demande s'il n'y a pas lieu plus approprié pour me lancer mais l'infirmière insiste et souhaite que je m'adapte. Je prends le dossier du patient et m'assois à côté d'elle, prêt, mais pas serein.

Je saisis le téléphone. L'infirmière me le reprend. Elle ouvre le dossier et sort les cinq pages que le médecin traitant de M. M adressait à notre service. Elle me demande dans un premier temps de recueillir toutes les informations essentielles de cette lettre. Elle me laisse et ne reviendra que dix minutes après. Je me retrouve donc seul face à une lettre de médecin traitant dont l'écriture est très difficilement déchiffrable. Dans un premier temps, je lis les raisons et les motivations du médecin concernant son choix de diriger M. M dans une unité de soins aigus Alzheimer. J'apprends alors que le comportement de M. M, 77 ans, vivant chez sa famille d'accueil, a récemment évolué. Chutes à répétition, désorientation, troubles du comportement et agressivité. En 2006, une évaluation a constaté qu'il était atteint d'une démence à type Alzheimer. Je me demande alors où et comment a été fait cette évaluation et me demande toujours si M. M serait en capacité de répondre à quelques questions du recueil. Cinq minutes sont passées. Je suis très vite dépassé par le nombre d'informations à noter, à relever, surtout à la lecture des autres pages concernant une liste très exhaustive d'antécédents médicaux, chirurgicaux et du traitement en cours du patient. Loin d'être familiarisé avec le vocabulaire professionnel du service, je suis agréablement surpris de retrouver des termes et des abréviations déjà connus (HTA, EEG, DNID,…). Pour le reste de la lettre, illisible pour moi de par la nature inconnue des termes et la graphie particulière, je profite du passage d'une autre infirmière, en poste depuis peu, pour m'aider à déchiffrer. Elle devine difficilement quelques antécédents médicaux. Ne pas pouvoir correctement recueillir les transcriptions d'un médecin traitant qui se révèlent être complètes et exhaustives, devient un moment très difficile. Je me pose très vite la question de savoir qu'est-ce que je ferai si j'étais en poste. Je n'ai pas le temps de me pencher sur la question car l'infirmière me rejoint. Je lui explique la difficulté que j'ai eue à tout lire et lui montre ce que j'ai trouvé essentiel. Elle acquiesce ce premier recueil, essaie de le compléter et se trouve elle aussi face à un problème de lecture. Elle m'explique alors qu'on reprendra la lettre du médecin plus tard. Elle me propose alors d'appeler la famille d'accueil de M. M. Elle compose le numéro, me tend le téléphone et actionne le haut-parleur. Le téléphone émet assez fort les premières sonneries pendant que l'infirmière demande un peu de silence. Je suis loin d'être dans de bonnes dispositions mais je me rassure en ouvrant mon petit carnet où j'avais noté scrupuleusement toutes les questions posées lors du précédent entretien que j'avais observé. On répond. Je me lance.

Le père de famille répond, et sans me présenter, j'explique que j'appelle au nom de mon service pour poser quelques questions au sujet de M. M. Je ne verbalise pas les termes de « recueil de données » sans trop savoir pourquoi sur le moment. J'ai l'impression que de demander de poser juste quelques questions pourra me permettre d'avoir plus de réponses. Je ne regarde plus mon carnet, je ne regarde plus le dossier, et l'infirmière m'indique avec le bout de son stylo la première question à poser. Je commence alors par un nombre incalculable de questions.

...