Rapport de stagela maison d'accueil spécialisé du centre hospitalier Edouard Toulouse
Rapport de stage : Rapport de stagela maison d'accueil spécialisé du centre hospitalier Edouard Toulouse. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Г Ξ Π • 13 Novembre 2018 • Rapport de stage • 5 411 Mots (22 Pages) • 826 Vues
I. PRESENTATION DE LA STRUCTURE
La Maison d'Accueil Spécialisée du Centre Hospitalier Edouard Toulouse, dont la création a été autorisée par le Préfet de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur en date du 26 juin 2005, a été conçue pour être un lieu de vie ouvert à des personnes majeures atteintes d'une déficience ou d'un ensemble de déficiences graves, somatiques, sensorielles, intellectuelles ou psychiques stabilisées. L'agrément est le suivant : "Accueil de personnes adultes âgées de 18 ans minimum, ayant une déficience mentale se surajoutant à des handicaps moteurs et/ou sensoriels, ayant perdu totalement leur autonomie, et tributaires d'une surveillance médicale et de soins constants, à l'exclusion des handicapés présentant des troubles psychiatriques prédominants". Il faut toutefois souligner qu'au delà de 60 ans, sauf contre-indication clinique, le résident peut-être orienté vers une structure adaptée aux personnes âgées. En outre, Tous les admis dans un secteur de psychiatrie restent rattachés à leur secteur d'origine, tout au long de leur séjour à la M.A.S.
En respect des termes d'un décret du 26 décembre 1978, Art 2 : " Les maisons d'accueil spécialisées doivent assurer de manière permanente aux personnes qu'elles accueillent : - L'hébergement;
- Les soins médicaux et paramédicaux;
- les aides à la vie courante et les soins d'entretien nécessités
par l'état de dépendance des personnes accueillies;
- Les activités de vie sociale, en particulier d'occupation et
d'animation, destinées notamment et selon les cas, à
préserver et améliorer des acquis et prévenir les régressions
de ces personnes".
Les personnes accueillies ont toutes le statut d'adulte handicapé qui se caractérise le plus souvent par :
- Une mesure de protection et la nomination d'un tuteur;
- L'attribution de l'Allocation aux Adultes Handicapés (AAH) à 20 ans;
- L'immatriculation à la Sécurité Sociale avec l'ouverture d'un compte bancaire pour le versement des prestations;
- La Commission des Droits et de l'Autonomie des Personnes Handicapées (CDAPH) prononcera une inaptitude au travail et reconnaîtra un droit à percevoir l'AAH.
La caractéristique principale de la majorité des résidents de la M.A.S du C.H.E.T est un état de dépendance majeure tant sur le plan intellectuel que psychoaffectif lié à des pathologies psychiatriques et neurologiques importantes telles que l'autisme, la psychose, les démences (Liste non exhaustive).
La M.A.S du C.H.E.T propose une organisation sociale fondée sur le respect et la citoyenneté de chacun de ses résidents. Elle développe des actions thérapeutiques et éducatives visant à améliorer leur autonomie et favoriser leur épanouissement personnel. L'objectif de l'établissement est d'offrir à chaque résident un cadre de vie lui permettant de vivre sereinement et en sécurité dans le respect de son intimité, de sa dignité, de sa liberté et de l'ensemble de ses besoins. La finalité de la prise en charge de chaque résident vise un objectif d'intégration sociale dans un contexte spécialisé, le plus adapté possible aux souhaits de chacun.
L'équipe plurisciplinaire de la M.A.S se compose d'un médecin psychiatrique et d'un généraliste, un cadre de service, une secrétaire médicale, des Infirmiers Diplômés d'Etat (IDE, 5 de jour et 3 de nuit), 30 Aides-soignants, 2 éducateurs spécialisés de jour, 3 moniteurs-éducateurs de jour, 11 agents des Services Hospitaliers Qualifiés, Une assistante sociale, une psychologue et une ergothérapeute.
II. TACHES DEMANDEES A L'EDUCATEUR SPECIALISE
Pour commencer, il faut savoir que l'éducateur spécialisé travaille en corrélation avec les différentes aides-soignantes présentes sur l'unité. Cela demande un minimum d'entente entre les deux professionnels, et je ne parle pas que d'amabilité : l'éducateur doit notifier chaque détail qui lui semble important au personnel aide-soignant et inversement. Ces remarques sont ensuite reportées sur un support écrit et un autre informatique, une sorte de journal de bord des résidents ; les événements les plus importants (qui concernent la santé par exemple) seront également mentionnés sur le dossier individuel de chaque patient.
Les tâches demandées, ou plutôt les actions à entreprendre par l'éducateur sont réparties en trois larges notions importantes qui se rejoignent (mais que je vais expliquer séparement) : L'autonomisation (ou ré-autonomisation), l'écoute, et la valorisation.
En premier lieu, parlons de l'autonomisation. L'éducateur, c'est donc la personne qui suit au quotidien les résidents, de façon collective et individuelle, du lever au coucher, en passant par toutes les étapes qui composent une journée. Tout au long de celle-ci, les patients vont être confrontés aux différentes complexités journalières telles que le moment de la toilette, le petit-déjeuner, le déjeuner, ou encore les activités internes ou externes à l'établissement.
La rôle de l'éducateur spécialisé est d'amener les résidents à être le plus autonome possible lors de l'accomplissement de ces différentes tâches. Au sein de ce type de structure, beaucoup de patients vont se réveler incapable physiquement et/ou psychiquement d'effectuer certaines nécessités comme se laver ou s'habiller: Avec l'aide de l'équipe pluridisciplinaire, l'éducateur doit savoir dans un premier temps déterminer quelles sont les personnes aptes à pouvoir accomplir seules leurs différentes besognes ainsi que lesquelles de ces dernières (par exemple, une personne peut savoir enfiler ses chaussures sans avoir la dextérité pour faire ses lacets).
Ce "repérage" ne se fait donc pas uniquement grâce au diagnostique médical, mais également en vérifiant directement auprès de la personne si la capacité est acquise, en la sollicitant le plus possible et de façon toujours respectueuse et adaptée, dans l'execution de cette dernière. Il faut savoir que ce travail d'observation est un travail qui doit se faire tous les jours car les capacités des résidents peuvent varier selon divers facteurs (Fatigues soudaines liées à une ou plusieurs pathologie(s), fonctions motrices en situation de détérioration croissante, crises de délires plus ou moins importantes, difficultés à la concentration, liste non exhaustive) C'est là qu'intervient l'éducateur, qui doit être attentif aux différents signes. En fonction de ceux-ci, il doit donc savoir solliciter l'individu dans ses tâches quotidiennes, jusqu'à l'aboutissement (éventuel), qui sera de se conduire tout seul.
En ce qui concerne l'argent, il faut savoir que la quasi totalité des résidents de la M.A.S sont des personnes qui n'ont pas les capacités de pouvoir gérer leur budget personnel. L'éducateur, dans son rôle d'accompagnateur, détient par conséquent également la responsabilité de la gestion de l'argent de chaque résident. C'est à dire qu'il doit reporter chaque dépense sur un document prévu à cet effet, avec ticket de caisse à l'appui. En cas de problème lié aux fonds ou de manque anormal d'argent sur le compte d'un résident, c'est donc lui qui devra fournir des explications.
Dans ce que je viens d'expliquer intervient une notion essentielle, nécessaire au développement personnel de chacun dans sa propre vie et au sein du collectif: l'écoute.
Les usagers ont, d'une manière générale, besoin d'une écoute régulière de la part de l'équipe pluridisciplinaire. L'éducateur, proche d'eux, va alors, aidé des paramètres dont il dispose (les informations sur les résidents, la "façon" dont certains ont de fonctionner, et donc l'approche qu'il faut plébisciter) prendre l'initiative de nouer un dialogue sur une problématique personnelle. Evidemment, cette démarche se révèle plus ou moins "poussée" selon l'importance de la pathologie, c'est à dire qu'avec une personne qui est atteinte lourdement de troubles mentaux, et qui peut même ne pas avoir la faculté d'interagir sur elle-même et/ou son environnement, il sera difficile d'avoir une écoute avancée, et la relation entre l'éducateur et cet usager aura tendance à plutôt rester rudimentaire et en surface (Par exemple, Nathalie, une usagère, marche a peine, ne parle pas, et ne sait se manifester que lorsqu'elle rit ou qu'elle exprime ce que l'équipe pense être de la colère -traits durcis, sourcils froncés, poings agités, mais pas de sons exprimés- ). Avec cette personne, un des seuls suivis que l'on peut espérer est de l'aider à conserver le plus longtemps possible sa motricité, aussi minimime soit-elle, en la stimulant le plus possible. Lui expliquer tout ce que l'on essaye d'exercer avec elle est aussi quelque chose de fondamental selon mon éducateur référent Jean-Michel, car si l'on ne comprends pas exactement ce qu'elle perçoit de son environnement -et la manière dont elle l'interprête-, on peut tout de même émettre l'hypothèse qu'elle se rend compte de certaines choses qui composent son quotidien.
Or, auprès d'un patient qui dispose de ses sens de façon à peu près "normale", dont ses facultés lui permettent de se manifester clairement, qui peut comprendre et répondre à des consignes, il est potentiellement possible d'entamer un suivi progressif sur une ou plusieurs problématique(s) personnelle donnée(s). Le but de la démarche est que la personne se sente dans un premier temps écoutée, qu'elle sente que l'équipe pluridisciplinaire est là pour elle, et que même si il y a un nombre conséquent d'usagers au sein de la M.A.S, qu'elle sache que le suivi personnel est possible. Dans un second temps, si la démarche s'avère productive, ce qui est généralement le cas puisque l'importance de la sollicitation est adaptée selon les capacités et augmenté ou diminuée selon les résultats obtenus, l'objectif est que le patient se sente fier de ce qu'il a réussi à accomplir. Dans un troisième temps, l'intention de ces cheminements est d'amener petit à petit le patient à une (ré)autonomie plus importante de jour en jour, comme nous l'avions déjà vu dans le premier point.
Troisième et dernière notion, la valorisation. Ce paramètre est le chaînon complémentaire pour pouvoir espérer aller vers de sérieux progrès dans l'autonomie des patients. Inutile d'utiliser des exemples précis, puisque l'on parle tout simplement d'encourager l'usager dans ses démarches quotidiennes; c'est à dire qu'il faut d'abord -je vais généraliser, certaines étapes peuvent être inutiles pour certaines personnes- passer par l'étape première qui consiste à impulser le désir d'accomplir seul au patient ses différentes nécessités en prenant toujours le soin de lui expliquer le but de la démarche. Pour impulser cette volonté, il faut savoir faire comprendre à la personne que l'épreuve n'est pas insurmontable pour elle, qu'elle peut y arriver, et je le reprécise, il faut lui expliquer la constructivité de l'action. Enfin, si la personne parvient à executer la tâche en question, sa gratification personnelle et les congratulations de l'éducateur seront à la fois la récompense et également le germe d'une possible détermination à vouloir d'abord réitérer l'action en question, puis petit à petit se pencher sur d'autres tâches éventuellement plus complexes, en tout cas différentes mais toujours nécessaires dans ce grand travail sur l'estime et la confiance en soi.
Je terminerais par rajouter qu'il est important de soutenir les individus dans chaque démarche, chaque jour.
III. TERRITOIRE GEOGRAPHIQUE ET AMENAGEMENT DE LA M.A.S
La Maison D'accueil Spécialisé se dresse au sein du centre hospitalier Edouard Toulouse, à Notre-Dame-Limite, 118 chemin de Mimet, dans le 15ème arrondissement de Marseille (13015). L'établissement bénéficie d'une proximité avec beaucoup de commerces, dont le centre commercial Grand Littoral, et est desservi par deux lignes de bus. Avec ce type de transport ou en voiture, il est possible de se rendre à la zone commerciale Plan de Campagne, située à 20 minutes.
L'aménagement de la M.A.S a été conçu de manière spécifique: afin d'offrir un hébergement de qualité, l'établissement propose un lieu d'habitation répondant aux spécificités de l'usager: unités de vie, larges couloirs, espaces de travaux sensoriels, jardins intérieurs (patios), salle polyvalente, salons, salles de bains adaptées.
Il faut savoir que le centre hospitalier Edouard Toulouse est un vaste complexe accueillant non seulement différentes structures, mais également de larges espaces verts où l'on peut se promener et se détendre. Les locaux répondent aux règles d'accessibilité et de sécurité en vigueur, ainsi qu'aux normes particulières existantes pour l'accueil de personnes handicapées.
IV. ACTIVITES ET PARTENARIATS
La M.A.S bénéficie, de par son large cadre, d'ores et déjà d'un accès à tout un panel d'activités qui se déroulent dans le centre hospitalier. Il y a un stade qui peut faire office de terrain de football comme de handball, une salle dans laquelle se déroulent des événements ponctuels tels que des projections cinématographiques, des pièces de théâtre, ou encore des petits concerts de musique; Il y a également, et il me semble que c'est un des grands points positifs du centre, un établissement où a été aménagé une grande cafétéria, tenue par des employés spécialisé et dans laquelle ce sont des patients qui travaillent, généralement à mi-temps. Bénéficiant d'un revenu, l'objectif est de les habituer ou réhabituer à exercer une activité professionnelle à responsabilités, et d'être confronté à d'éventuels inconnus (les clients, qui sont la quasi-totalité du temps du personnel ou des patients) pour favoriser le développement social et l'inclusion.
A propos des activités extra-centre, La ville de Marseille a mis à disposition de la structure la possibilité d'effectuer des activités équestres au sein du centre hippique Pastré, situé à la pointe rouge. Ainsi, chaque jeudi matin, de 10h à Midi, cinq ou six patients sont emmenés en navette accompagnés d'au moins deux éducateurs. Une fois là-bas, l'équipe encadrante leur montre la manière avec laquelle il faut s'y prendre pour préparer les chevaux. Une fois en selle, le but de l'exercice et d'essayer à faire en sorte que les usagers orientent leur monture à travers un parcours d'obstacles, et ce, de façon plus ou moins autonome. Cette entreprise est un moyen, dans un premier temps, de mettre un patient face à une épreuve qui nécessite de faire des prises de décisions "rapides" et de savoir respecter des consignes pour pouvoir faire des choix pertinents. Evidemment, les résidents ne sont pas totalement laissé seuls pendant l'exercice : le rôle de l'éducateur et de la personne en charge de l'activité sur place sont de rassurer, aider si besoin, et surtout encourager, valoriser.
Dans un second temps, -ce que l'on appelle- l'équithérapie, c'est aussi la relation avec l'animal, c'est à dire qu'il faut savoir le manipuler avec respect, faire attention à ne pas lui faire mal, et apprendre à détecter le problème si quelque chose ne va pas ou que le cheval a peur par exemple. Mais plus important encore, et c'est l'exercice qui est surement le plus compliqué, c'est celui de la maîtrise de sa propre peur face à cette animal imposant et une fois sur son dos. Tout un travail est mis en place autour de cette démarche de la gestion des émotions: Le patient est d'abord rassuré verbalement, on peut lui tenir la main, pour l'emmener, à son rythme, près du cheval. Puis, petit à petit, à caresser l'animal et à le brosser. la personne peut se sentir plus en confiance si elle voit un camarade effectuer l'exercice devant elle. Le rôle de l'éducateur, c'est de savoir s'adapter au rythme de l'usager, tout en discernant les moments où l'on peut se permettre d'insister (Selon la relation entre l'éducateur et l'usager, ainsi que le caractère de ce dernier), en faveur d'un nouveau pas vers l'objectif final, et sans que cela détruise les efforts déjà accomplis.
Il me semble important de préciser que lors de cette activité, l'éducateur encadre les résidents avec , comme je l'ai dit, la personne en charge de l'activité sur place; c'est une personne qui dispose d'un Brevet Fédéral d'Encadrement Equi Handi, qui est destiné aux enseignants d'équitation qui souhaitent accueillir dans leur structure, dans les meilleures conditions possibles, des publics en situation de handicap. Il va leur permettre d'appréhender les enjeux particuliers liés à la "différence" occasionnée par le handicap. La formation porte sur les différentes formes de handicaps, ainsi que sur l'environnement spécifique et les partenariats qui s'y rattachent : institutions spécialisées, personnels soignants et éducatifs (Liste non exhaustive)
Jean-Michel a également mis en place une activité extra-centre que l'on ne peut pas à proprement parler définir comme un partenariat, dans le sens que cette activité est payée inidividuellement par la source de revenus dont disposent chaque résidents. Le mardi matin, Jean-Michel se rend avec 2 résidents (parfois plus, mais dans ce cas au moins deux éducateurs doivent être présents) à la piscine municipale LaMartine, située à quelques centaines de mètres de la M.A.S. Une fois là-bas, et parce que c'est également ce jour de la semaine où les élèves des écoles primaires alentours viennent avec leur professeurs d'EPS, les maîtres nageurs ont l'habitude de nous octroyer exclusivement une parcelle de la piscine pour éviter le chahut éventuel qui pourrait déstabiliser certains patients.
Au niveau du temps accordé à l'activité, sachant qu'il faut environ 35 minutes pour s'y rendre et se préparer ainsi que le même temps pour repartir, et que généralement les patients se fatiguent vite, la durée totale de la baignade est d'environ 45 minutes. Durant ces trois quarts d'heure, l'objectif est en premier lieu de mettre la personne en confiance, lorsque cela est nécessaire, dans cet environnement parfois perçu comme étant hostile par ceux et celles qui ne savent pas ou peu nager, ou qui ont des problèmes respiratoires. Pour se faire, il faut, comme avec l'équithérapie et avec beaucoup d'autres démarches, avancer au rythme de l'usager, tout en l'encourageant et en le rassurant.
V. MES OBJECTIFS
En premier lieu, et c'est un bon début, mon but était de m'intégrer au sein de l'équipe pluridisciplinaire, et découvrir la façon dont les différentes professions collaboraient. J'ai été agréablement surpris de l'entente entre les services; mon ancien stage en Ehpad m'avais laissé quelques craintes sur ce plan ci, et sur le pouvoir de l'affect sur la posture professionnelle. Une fois ces craintes dissipées, j'ai pu discuter de mes différents points de vue avec eux. Je dois dire que je pense m'être, au bout d'environ deux semaines, très bien adapté à l'équipe, puisque je m'entendais plutôt bien avec les éducateurs(trices) ainsi que les autres corps professionnels, du peu que j'aie pu côtoyer ces derniers du moins.
Deuxième objectif principal, instaurer une relation entre les usagers et moi. A ce sujet j'avoue qu'au début, j'avais un certain nombre d'appréhensions et je ne considérait absolument rien comme acquis comme on pourrait le faire sur certaines notions, car l'univers psychiatrique m'était jusqu'à ce stage de six semaines totalement inconnu. J'ai donc adressé beaucoup de mes interrogations au personnel encadrant, et particulièrement à mon éducateur référent Jean-Michel avec qui je passais beaucoup de temps. Il m'as donné de précieux conseils grâce auxquels j'ai pu aborder de manère plus confiante certaines personnes. J'ai compris qu'il ne fallait jamais croire que l'on a "cerné" le tempérament d'un résident en seulement quelques semaines, et qu'il y a des pathologies qui peuvent changer le comportement de quelqu'un en un instant.
Une apparthée pour dire que j'en ai d'ailleurs fait les frais le 23 mars au matin, pendant la douche: un résident de 51 ans schizophrène du nom de Philippe avec qui nous pouvons nous permettre, Jean-Michel et moi, d'avoir des discussions pleines d'humour et de sarcasmes, était en train de s'habiller. A un moment donné, l'éducateur est sorti de la pièce pour passer un coup de téléphone. Continuant à discuter avec Philippe, notre conversation était portée sur les bétises qu'il avait pu faire étant adolescent. A un moment donné, il me montre son poing levé en me disant qu'il ne fallait pas que je fasse le "mariole"; vu que nous étions en train de rire une seconde avant, je lui répond avec le même ton que "c'est moi qui vais le maîtriser" (Nous avions eu ce genre de conversations sarcastiques plus de dix fois auparavant sans aucun problème, Jean-Michel aussi) et là grosse erreur, je me retourne vers un autre résident et donc lui fait dos. Résultat, je me prend à ma grande surprise une chaise médicale de plein fouet dans le dos, ce qui me laissera une douleur pendant une petite heure. Suite à cela nous avons discuté l'éducateur, Philippe et moi, et il s'est excusé. Cependant, j'ai compris qu'il ne fallait jamais tourner le dos à un résident, et qu'une crise de délire pouvait expliquer ce geste et sa possible mauvaise interprétation de ma réponse. Le lendemain, nous nous reparlions comme si rien ne s'était passé.
Avec les résidents de la M.A.S, il y a des jours où tout se déroule sans encombres. Mais il y a certaines fois où la journée est une succession de problématiques, comme des pleurs, des altercations, des cris, des automutilations. C'est pour cette raison qu'un lien de confiance entre eux et moi était nécessaire, pour que je puisse m'approcher d'eux et leur parler sans les effrayer, car beaucoup de résidents associent la proximité à une éventuelle hostilité. Le regard joue beaucoup aussi, il y a par exemple une résidente, Razika, si quelqu'un la regarde dans les yeux trop longtemps, et ce même à 5 mètres d'elle, celle-ci va se mettre à hurler et à se frapper la tête contre un mur en vous accusant de l'avoir frappée.
J'irais jusqu'à dire qu'au delà d'un travail de confiance, il faut apprendre à connaître les résidents pour savoir de quelle manière il est plus préférable de les solliciter. Même si il a jugé que j'avais obtenu aisément leur confiance, je dois remercier mon tuteur de stage qui m'as beaucoup aidé lorsque je me retrouvais dans une impasse, ce qui arrivait régulièrement au début.
Malgré tout, l'apprentissage de la manière d'aborder ces personnes reste un travail permanent, qui nécessite bien plus de 6 semaines de stage.
Mon second objectif fut de tout simplement les occuper dans la vie quotidienne. Il faut savoir que bien que les résidents disposent d'un grand complexe tout autour de la M.A.S, peu d'entre eux peuvent réellement en profiter librement. Cela se solde par le fait que la majorité d'entre eux restent enfermés dans la structure la plupart du temps; hors les heures des repas et d'activités, le temps peut paraître très long. J'ai donc entrepris d'attirer leur attention sur différents ateliers, comme faire du dessin ou de la danse. Pour le dessin, j'ai été surpris de voir que certaines personnes dont je n'aurais pas soupçonné le moindre intérêt pour cette activité, s'y employer de façon enthousiaste et très impliquée. J'ai également découvert des capacités dont personne ne m'avait parlé jusqu'à maintenant et que je pensais quasiment perdues pour certains, comme savoir écrire: Georges par exemple, un résident de 63 ans souffrant de troubles bipolaires duquel j'ai parlé pour mon Etude Professionnelle, m'as montré ses talents pour le dessin et a écrit son nom ainsi que ceux de certaines aides-soignantes. De plus, durant ce travail, il était très concentré et très calme, même souriant par moment.
Nous allions aussi faire des balades dans le jardin et le potager, qui appartient à une surface extérieure fermée dans laquelle je pouvais emmerner les résidents sans risques. Lors de ces promenades, j'entreprenais des conversations plus ou moins cohérentes avec ceux qui le voulaient bien, et quelques-uns d'entre eux avaient beaucoup de choses à raconter, par rapport à la famille, les sentiments intérieurs, le personnel, la vie à la M.A.S.. Le but n'est pas de devenir leur confident, mais les 'pousser' à dire ce qu'ils ont sur le coeur si jamais nous discernons, l'équipe encadrante ou moi, une humeur inhabituelle.
Mon troisième objectif rejoint celui de Jean-Michel et défini le rôle de l'éducateur spécialisé au sein de la M.A.S: essayer de préserver au maximum l'autonomie des résidents. J'en ai déjà expliqué les grands principes dans le grand II, les "Tâches demandées à l'éducateur spécialisé". Si je dois rajouter quelque chose à ce sujet, je dirais que mon référent, après m'avoir observé avec eux, me faisais suffisamment confiance pour me laisser souvent seul avec les résidents, même au moment de la toilette ou des repas.
VI. MON PROJET INDIVIDUEL
Après avoir trouvé à peu près ma place au sein de l'équipe encadrante et avoir plus ou moins côtoyé individuellement les résidents de l'unité dans laquelle j'ai été affecté, je me suis penché, avec l'approbation et les conseils de mon éducateur référent Jean-Michel, sur un projet que je pourrait établir avec un jeune homme de 31 ans du nom de Jean -Nom modifié-.
Jean est une personne qui souffre de troubles schizophrèniques et d'un grand manque de confiance en lui. Définissons la schizophrénie : Elle se caractérise par : Des hallucinations visuelles ou auditives; des délires (perception erronée de la réalité); une désorganisation de la pensée et du comportement; ce que l'on appelle la catatonie, qui se caractérise par une inertie, s’accompagnant d'une absence d'activité. Enfin, la schizophrénie est un trouble mental caractérisé par une perte de contact avec la réalité et d’un repli sur soi. Ce résident a tendance à se dénigrer dans ce qu'il entreprend ou ce qu'il pourrait potentiellement entreprendre. Cela le conduit à rester enfermé dans sa chambre et "ruminer sur son sort en essayant de trouver des justifications à sa situation" (Phrase entre guillemets car rapportée par mon référent de stage). Le problème qui ressort beaucoup et qu'il rejette souvent la faute sur son entourage ou sur la M.A.S, en se créant toutes sortes de scénarios et de circonstances aggravantes dans sa tête. Jean demande aussi beaucoup l'avis des autres pour prendre une décision et prend peu d'initiatives. L'éducateur sollicite donc des moments pour qu'ils se retrouvent seuls et qu'ils puissent discuter de cette situation. Avec lui, il met en place des dispositions qui vont lui permettre d'avoir plus de pouvoir de décision sur sa vie quotidienne: cela passe par des choses qui peuvent paraîtres simple, comme sélectionner ses habits pour le lendemain, sélection faite d'habitude par les aides soignantes qui s'occupent aussi du linge. L'éducateur lui a également grandement conseillé à s'inscrire dans une discipline (Il existe des collectifs sportifs au sein de l'hôpital), car Jean est un adepte de sport, et notamment de handball. Dans cette situation, l'écoute de l'éducateur est primordiale car elle permet à Jean de pouvoir mettre des mots, à son rythme et dans un cadre de confiance, sur sa façon de percevoir d'une façon générale sa vie et ses enjeux, ainsi que de ses éventuels projets et la manière dont il souhaiterait les aborder.
Le projet que j'ai décidé de mettre en place avec lui porte sur la gestion de son argent. Jean-Michel, habituellement, garde son A.A.H qu'il perçoit tous les mois, puis lui laisse de l'argent de poche selon ses besoins pour la semaine, ou sur demande. Il subsiste cependant un problème réccurent avec ce système, qui est que même si Jean sait compter, il n'as pas la notion de l'argent: Il lui arrive souvent de perdre son porte-monnaie ou juste son contenu, lorsqu'il laisse l'argent traîner dans ses poches, et s'en rendre compte plusieurs heures après ou même pas du tout, jusqu'à ce qu'on lui fasse la remarque. Il peut aussi sélectionner trop de produits en magasin, et se retrouver à la caisse sans avoir les moyens de payer. En ce sens il est donc nécessaire de le réguler au niveau de ses fonds. Jean-Michel lui demande également de bien penser à ramener un justificatif (ticket de caisse) à chaque dépense effectuée, afin qu'il puisse pouvoir en rendre compte auprès du cahier des gestions financières de chaque résidents et aussi à sa hiérarchie. Il faut préciser que Jean est un résident sous tutelle dans l'établissement, c'est à dire qu'il ne peut pas s'absenter du centre hospitalier Edouard Toulouse de sa propre initiative, et qu'il doit passer par son éducateur pour chacunes de ses sorties à l'extérieur. Cela dit, c'est une personne qui a fait ses preuves par rapport à la confiance que l'on peut lui octroyer, et en ce sens Jean-Michel lui accorde la quasi-totalité de ses sorties, surtout que ces dernières ne sont pas non plus très fréquentes.
Revenons à mon projet: J'ai donc proposé à Jean de bénéficier de plus de main-mise sur son argent, et pour cela essayer de reporter ses dépenses sur un cahier personnel, toujours à l'aide des justificatifs de paiements. Cette méthode lui permettra de se rendre compte plus clairement de ce qu'il lui reste comme argent pour la semaine, une fois les dépenses effectuées. Au delà de lui donner, petit à petit, une vision plus affinée de la valeur de l'argent et des petites économies que l'on peut effectuer à chaque fois, ce procédé vise également à développer son autonomie. Accessoirement, Jean-Michel, en contrôlant la bonne tenue du tableau, pourra s'en servir pour se tenir au courant des dépenses qui ont été faites et desquelles les justificatifs ont été oubliés par Jean, chose qui arrive régulièrement.
Ensemble, nous avons créé un tableau dans lequel il va dorénavant reporter ses dépenses, et le faire le plus assidument possible, de préférence à chaque fin de journée lorsqu'il sera sorti effectuer des dépenses. Ce tableau regroupe quatre onglets, que sont la Date du jour, L'/les article(s) acheté(s), L'argent dépensé, L'argent restant.
Ce travail se révèle un peu complexe pour Jean, qui a beaucoup de difficulté à se concentrer sur plusieurs tâches différentes, et aussi tendance à "bloquer" lorsqu'il fait quelque chose. C'est à dire par exemple que lorsque qu'il est au toilettes, si l'on ne le sollicite pas, il pourrait y passer facilement une bonne heure. Au début, pour savoir de quelle manière de je devrais me positionner professionnellement, j'ai décidé de suivre Jean, avec son accord, lorsque celui-ci voulait sortir, généralement pour acheter le journal et une boisson. Puisque je savais qu'il sortait d'habitude seul, je lui ai bien précisé que l'on pouvait discuter tout au long du trajet mais que j'étais bien là en tant que "spectateur" de sa démarche auprès du magasin. Jean sait effectuer ces tâches, mais il a tendance, comme je le disais, à beaucoup demander l'avis des autres lorsqu'il en a l'occasion. C'est pour cette raison que je lui ai demandé à ce qu'il fasse comme d'habitude une fois dans la boutique, sans me demander quoi que ce soit.
Bien sûr, l'exercice ne s'est pas exactement passé comme je l'avais prévu, puisque Jean ne pouvait pas faire totalement abstraction de ma présence. J'ai du donc plusieurs fois le pousser à choisir de lui-même ses produits et à passer en caisse tout seul. Par la suite, j'ai aussi du plusieurs fois lui demander de retourner voir la caissière qui avait omis de lui remettre un justificatif.
Même si il lui arrivait de vouloir renoncer, Jean mis quand même beaucoup de détermination à exercer ce travail sur lui.
L'exercice s'est révélé plutôt productif mais il reste pas mal de travail à faire sur le long terme, car il subsiste encore beaucoup de manque de confiance en soi et d'égarement chez Jean. J'ai continué le projet jusqu'à la fin de mon stage, et mon référent m'as dit qu'il continuerai à entretenir le cahier avec lui, ainsi que d'apporter des améliorations au fil du temps. J'ai pu voir quelques résultats mais la durée courte du stage ne m'as pas permis de voir tous les progrès que ce système aurait pu apporter à Jean.
VII. CONCLUSION
Pour conclure, je dirais franchement que ce stage m'as énormément enrichi, j'ai pu voir comment cela se passait vraiment dans un hôpital psychiatrique et cela a littéralement balayé mes a priori et appréhensions. En toute honnêteté c'est un endroit qui éveillait ma curiosité mais qui m'impressionnait pas mal aussi, même lors du dépôt de ma candidature là-bas, je me suis dis en repartant que j'aurais sérieusement du mal à franchir le pas. Je ne suis pas mécontent de cette expérience, et serais favorable au fait de réitérer cette immersion. C'est pour des enrichissements tels que celui-ci que j'ai aussi intégré la formation à l'IRTS. Au delà du stage en lui-même, je tiens à remercier les personnes parfois exceptionnelles que j'ai eu la chance de rencontrer là-bas.
...