Le trafic de Captagon en Syrie

Le trafic de Captagon

Le Captagon est une substance qui peut être absorbée comme une drogue (usage de stupéfiant) et fait l’objet de trafic illégal international. De récentes saisies ont montré que des quantités parfois importantes arrivent au cœur de l’Europe (Italie, Suisse). Le Captagon semble être produit au sein de pays du Moyen-Orient. Nous nous intéressons ici au trafic de Captagon au départ de la Syrie, qui arrive en Europe.

En effet, région où règne le chaos, les frontières entre le Liban et la Syrie sont contrôlées par des milices du Hezbollah, organisation considérée comme terroriste par la communauté internationale, mais qui est aussi la représentation politique de la communauté chiite au Liban.

Sa forte influence dans la région est marquée par son alliance (ou allégeance) à la puissance régionale Iranienne, et au régime autoritaire syrien d’Al Assad. Ainsi, en étudiant le trafic du captagon et le développement de son marché, nous pouvons mettre en avant ce trafic comme passage de la sphère illégale à la sphère légale.

Dans quelle mesure le trafic de Captagon depuis la Syrie vers l’Europe relève-t-il du crime organisé ?

Tout d’abord, nous montrerons à travers notre recherche que le trafic du Captagon dans la région de la Syrie et du Nord de Liban est monopolisé par l’organisation/milice chiite du Hezbollah​, aussi connue sous le nom le Parti​ de Dieu. ​Cette organisation est aussi le parti politique principal Chiite au Liban. En effet, le système politique au Liban est confessionnel, c’est-à-dire qu’il est basé sur du consociationalisme, où les postes politiques sont proportionnellement réservés aux représentants de chaque croyance, de chaque communauté religieuse.  

Ceci dit, la communauté chiite au Liban est donc représentée par le parti du Hezbollah,​ qui a des sièges dans chaque circonscription dans le système politique au Liban puisque le pouvoir est divisé proportionnellement entre les communautés. Outre le fait que cela démontre une structure hiérarchique déjà mise en place, cette information est particulièrement intéressante car elle révèle la marge très étroite qui nous fait passer du légal à l’illégal. Ainsi, il s’avère que l’organisation considérée terroriste par la majorité de la communauté internationale a des sièges au Parlement Libanais, ce qui veut dire qu’elle a aussi le soutien d’une partie (sinon la majorité) du peuple. La crédibilité que cette organisation détient du peuple provient de ses actes de « Résistance » contre l’invasion Israélienne du Sud du Liban en 2006. Lorsque l’Etat n’a pas su défendre la souveraineté du pays, l’organisation du Hezbollah n’a guère hésité à prendre les armes et à combattre l'ennemi national, bien évidemment à l’aide du financement de son allié Iranien. La victoire de la résistance contre les attaques israéliennes, démontrant l’échec de l'État libanais, est une carte constamment utilisée par le Hezbollah afin de justifier sa gouvernance montante et les actes illicites de l’organisation.  

Selon des sources internes, l’une des principales raisons de la facilité de développement de la drogue, ainsi que sa facilité de transport est la mainmise du Hezbollah, et plus spécifiquement Nouh Zeaiter, sur la majorité des usines au Liban. En Syrie, c’est un personnage au nom de Samer Al Assad qui détient le contrôle des usines qui fabriquent le Captagon à Latakia en Syrie. En ce qui concerne le transport de cette drogue, le rapport émis par notre source confirme que c’est la 4e division de l’armée (the fourth Armoured Division; Al-Firqa​ Al-Rab’a en arabe) qui s’en charge, et c’est l’une de ses plus importantes ressources économiques. Ainsi, Tarek Tayseer Salibi et son frère Ahmad Tayseer Salibi, sont deux membres de la 4e division qui sont impliqués dans la production du Captagon. Et cela nous renvoie aussi à la structure familiale qui est l’une des critères d’appartenance à une mafia.  

Enfin, une photo récente a fait l’objet d’un scandale qui nous montre deux proches du président syrien appelés Wassim Al-Assad et Jamil Fawaz Al-Assad à coté de Nouh Zeaiter, le trafiquant et criminel le plus connu et recherché par les forces de l’ordre au Liban.

Le point de départ du trafic de captagon est le premier point intéressant. En Effet, si sa fabrication peut fait l’objet d’une activité complètement illégale (lieu de production complètement dédié par exemple), son trafic emprunte les plus nobles voies d’échanges commerciaux de la sphère légale. Ainsi, le Port de Lattaquié fait partie de ces points de départ vérifiés dans le transport maritime^[1] pour relier le Levant et l’Europe, notamment l’Italie ou la Grèce^[2].

De plus, certaines sociétés-écran sont utilisées pour faire naviguer de port à port la cargaison de captagon pour donner une façade légale à cet itinéraire (notamment, qui est le destinataire de la cargaison pour la faire naviguer vers l’Europe ?). Ces sociétés, dont le but est d’être intraçables, sont généralement basées sur un territoire le permettant, comme la Suisse^[3].

Le transport aérien ne fait pas exception, puisque certains bien transportés dans le cadre de commerce légal peuvent être remplis de pilules de captagon. Ainsi, « des climatiseurs, des chauffe-eau industriels, des camions remorques ou des boîtes de pâtisseries »^[4]  peuvent servir à transporter du captagon dans le cadre d’un trafic international avec l’utilisation de structures ou de couvertures commerciales légales (quand ce ne sont pas des individus eux-mêmes qui transportent de plus petites quantités). Si la trafic par voie aérienne est surtout utilisé pour les Pays du Golfe, il n’est pas à exclure que cette méthode soit également utilisée pour le captagon envoyé vers l’Europe.

Après la production des stupéfiants dans la zone de Homs, des cargaisons sont acheminées par leurs transporteurs jusqu’au littoral pour enchainer avec un trafic maritime vers l’international (passage d’au moins une frontière), mais une partie est aussi envoyée au Nord de la Syrie, où se trouvent des forces kurdes, qui se chargeront de la contrebande jusqu’en Turquie où ils étendent leur influence.

En effet, un chimiste Bulgare nommé Karbozov, expert en production de Captagon, a été arrêté en novembre 2014 au Liban. Cela pourrait indiquer que des agents du Hezbollah créent des réseaux de contrebande avec des criminels syriens, saoudiens et dans ce cas, bulgares et utilisent ces connexions pour exporter des millions de pilules de Captagon vers l'Arabie saoudite, les autres États du Golfe et l’Europe ou pour déplacer du Captagon contrefait produit en Syrie via le Hezbollah dans territoires du Liban vers d’autres pays par voie aérienne ou maritime.

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