Patriotisme économique
Fiche de lecture : Patriotisme économique. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar omaamri • 9 Décembre 2014 • Fiche de lecture • 1 436 Mots (6 Pages) • 639 Vues
Qu'il s'agisse de la Pologne qui interdit à une banque italienne de fusionner ses actifs locaux, de la France ou de l'Espagne qui se précipitent pour fusionner leurs entreprises énergétiques nationales pour prévenir un assaut programmé par d'autres entreprises européennes. Qu'il s'agisse des Etats Unis qui entendent protéger leurs firmes des appétits arabes ou chinois au nom de la sécurité ou qu'il s'agisse enfin de gouvernements européens qui entendent protéger Arcelor de l'appétit d'un entrepreneur d'origine indienne, une même orientation protectionniste parait à l'oeuvre, partout dans le monde.
La France, qui par ailleurs est la nation développée la plus extravertie, entend être le champion du " patriotisme économique ". La France, c'est-à-dire l'Europe, est avec les Etats-Unis la zone économique la plus ouverte en matière d'échanges de produits. Par ailleurs, en matière de stocks de flux directs d'investissement, la France est le pays développé le plus ouvert du monde (40% du PIB). Un salarié sur 7 en France travaille pour une entreprise industrielle contrôlée par l'étranger, c'està-dire bien plus que tous les autres pays européens développés.
Mais la France semble faire une fixation sur la nationalité de l'entreprise. Elle y voit apparemment la clé d'un développement autonome. Il faut donc prendre au sérieux le discours sur le " patriotisme économique " ne serait-ce que pour évaluer les risques de dérive protectionniste. L'argument académique est connu : la prise de contrôle par une entreprise étrangère d'une entreprise nationale ne produit en soi aucun effet négatif sur l'activité, l'emploi, les résultats. Certes l'acquéreur tente d'optimiser son périmètre d'activités, il peut même être conduit à rationaliser, à restructurer l'outil acquis, mais il a tout intérêt à valoriser les actifs et à promouvoir les compétences. D'où vient alors que l'idée contraire soit largement partagée dans le public et parmi les politiques ?
L'hypothèse qui est implicitement faite est que la nationalité du capital de ses dirigeants et l'implantation du siège social ont des effets déterminants sur la localisation des activités, la protection de l'emploi national, et le développement de la recherche et du tertiaire supérieur. La preuve systématique de cette assertion est trouvée dans la ventilation des activités de production et de recherche dans et hors du territoire national (ex : Surpondération de la production en France par rapport à la consommation en France des firmes automobiles). Mais outre que cette preuve n'en est pas une car la ventilation des activités et des localisations d'une firme à l'instant t est l'expression de l'histoire plus que de la dynamique de développement et que d'autre part des entreprises à capitaux nationaux font aussi des rationalisations lorsqu'ils acquièrent des entreprises étrangères (Danone-Lu). Cette assertion a pourtant le mérite de l'évidence empirique aux yeux du public, Pechiney depuis son acquisition par Alcan a été dépouillé de ses compétences en matière d'électrolyse au profit de sites canadiens (il a reçu en échange les compétences aval pour tout le groupe Alcan). Renault quand il a restructuré ses sites de production a préféré fermer Vilvoorde en Belgique plutôt q'un site national. Enfin la défense de la recherche en sciences du vivant a été décisive dans le soutien que le Gouvernement français a apporté à Sanofi dans sa conquête d'Aventis. Quels enseignements tirer de ces exemples dont il ne faut pas exagérer la portée en l'absence de travaux empiriques systématiques sur les effets d'un changement de contrôle sur la localisation des activités
Ces exemples illustrent un premier paradoxe français, celui de la contradiction entre mondialisation et volonté de maîtrise nationale. Si la nationalité du capital importait tant, il ne fallait pas libérer les mouvements de capitaux sans conditions, il ne fallait pas célébrer comme une grande victoire nationale chaque sortie d'un de nos champions nationaux en Europe, en Amérique ou en Asie, il ne fallait pas agir auprès de Bruxelles pour que nos monopoles nationaux publics en cours de transformation (EDF) puissent aller faire leurs emplettes en Italie (Edison). En d'autres termes, entre le développement national autocentré et les risques et opportunités de la mondialisation, il faut choisir. Or s'il est incontestable que la France a fait le choix de la mondialisation, si ces grandes entreprises ont souvent été pionnières, l'opinion publique reste très réticente, pour ne pas dire acquise aux thèses altermondialistes. Les entreprises du Cac 40 ne font plus qu'un tiers de leur activité en France et de leur fait la France est surreprésentée dans les classements
...