Valeur juridique des PGD
Dissertation : Valeur juridique des PGD. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Chloé Hirsch • 9 Mars 2021 • Dissertation • 2 285 Mots (10 Pages) • 1 525 Vues
“Le sens d’un texte n’est pas devant lui mais derrière lui” - Jean Ricoeur dans Du texte à l’action.
Cette citation peut correspondre aux PGD. En effet les principes généraux du droit sont des règles non écrites de portée générale qui ne sont formulées dans aucun texte mais que le juge considère comme s’imposant à l’administration et à l’État et dont la violation est considérée comme une violation du droit.
Les PGD constituent une source de légalité originale puisqu’ils sont une création du juge et s’imposent à l’administration en dehors de tout texte. Cependant cela ne veut pas dire que leur origine ne peut pas résulter d’un texte. En pratique, ils sont souvent formulés en s’inspirant de l’esprit d’un voire de plusieurs textes. Le juge va prendre dans un texte le contenu du principe et le généraliser au-delà de son champ d’application initial. Le juge fait alors comme s’il appliquait une norme qui existait déjà afin qu’on ne puisse pas lui reprocher de violer l’article 5 du Code civil interdisant au juge de prendre des règles générales.
Concrètement, les PGD permettent au juge de prendre des décisions, des arrêts conformes aux exigences du consensus social. Ils tirent leur fondement d’une certaine conception de notre société en transcrivant dans le droit positif des règles morales ou sociales qui sont des valeurs communément partagées.
A l’origine les PGD ont été instaurés pour trois principales raisons. Ils avaient tout d’abord pour objectif de combler les lacunes des textes et de permettre le respect de l’article 4 du Code civil qui oblige le juge à statuer. Les PGD avaient également pour but de rétablir la légalité pendant des périodes de troubles juridiques notamment en période de guerre où les droits et libertés peuvent être violés par des décisions idéologiques et non juridiques. Enfin, ils permettaient de conférer le caractère de règle de droit à des règles juridiquement indéterminées.
Le premier arrêt consacrant expressément un PGD est l’arrêt ARAMU de 1945 sur les suites de guerre. Mais auparavant, l’arrêt du 8 février 1873 Gugave et Bransiet peut être considéré comme la première manifestation de PGD. Puis, bien que le terme de principe général du droit ne soit pas évoqué, l’arrêt Dame veuve Tromper Gravier consacre un principe déjà esquissé que “lorsqu’une décision administrative prend le caractère d’une sanction et qu’elle porte une atteinte assez grave à une situation individuelle, la jurisprudence exige que l’intéressé ait été mis en mesure de discuter les motifs de la mesure qui le frappe” en 1944.
Aujourd’hui les PGD sont une arme pour écarter un acte de l’administration jugé néfaste alors qu’aucun autre élément de la légalité ne permettrait de le censurer.
L’arrêt CE Sect. 26/6/1959, “syndicat général des ingénieurs-conseil” fournit la simplicité de principe concernant la valeur juridique des PGD. D’après cet arrêt, l'ensemble des actes administratifs sont soumis à leur autorité. Ils auraient alors une valeur supra-réglementaire. Cependant vers la fin des années 60 plusieurs difficultés sont apparues quant-à la place des PGD devenant une question complexe et suscitant débat.
Si ces principes généraux existent depuis plus de 75 ans, leur valeur juridique fait toujours débat et reste incertaine. Il apparaît donc pertinent de se questionner à propos de la place qu'ils occupent. Pour tenter de la déterminer, nous verrons dans une première partie deux théories relatives à la hiérarchisation des principes généraux du droit (I) puis dans une seconde partie nous tenterons d'identifier les différents acteurs participant à l'élaboration des principes généraux du droit (II).
I) Les théories relatives à la hiérarchisation des principes généraux du droit
Plusieurs théories ont été développées quant à la valeur des principes généraux du droit dans la hiérarchie des règles de droit.
Certaines personnes considèrent simplement qu’ils ont la valeur des normes desquelles ils découlent. D’autres, comme René Chapus, juriste français, considèrent qu’ils occupent une place infra-législative et supra-décrétale (A). Cette théorie est cependant remise en question, notamment par Alain-Serge Mescheriakoff, juriste, qui considère que ces principes ont une valeur législative (B).
A) La Théorie de René Chapus : une valeur infra-législative et supra-décrétale
René Chapus a notamment développé sa thèse dans son ouvrage « De la valeur juridique des principes généraux du droit et des autres règles jurisprudentielles » publié par Dalloz en 1966.
Selon sa théorie, la valeur d’un principe général du droit se détermine par son application et non par son origine. Ces principes découlant des juges administratifs, il analyse leur situation.
La place du juge administratif est supérieure aux règlements car il peut annuler des actes administratifs mais inférieure à la loi car il doit s’y soumettre. De plus, il estime que les principes généraux du droit ne peuvent être créés qu’en l’absence de loi et qu’ils doivent aller en son sens. La place des principes se situera donc au même rang, puisqu’ils pourront annuler des actes administratifs mais pas aller à l’encontre du droit originaire.
Le juge ne peut pas donner de place plus ou moins importante que celle qu’il occupe aux principes.
Dans le cadre de sa mission de contrôle de la légalité des actes administratifs, le juge n’est pas considéré comme un « traducteur » des textes mais comme un « serviteur des lois » et un « censeur des décrets ». Sa place se situe par conséquent « entre celle de l’organe législatif et celle de l’autorité administrative ».
Dans son ouvrage « Droit administratif général », des éditions Domat, il expliquera sa théorie par sa citation « L’œuvre du juge administratif, en tant qu’il s’exprime lui-même (et non comme interprète du droit écrit), ne peut se situer qu’au niveau qui est le sien dans le domaine des sources formelles du droit. Pour le connaître, une constatation suffit : le juge administratif est soumis à la loi dont il ne peut pas apprécier la validité ; il est au contraire en mesure d’invalider les actes des titulaires du pouvoir réglementaire ».
Dans « De la soumission au droit des règlements autonomes », il précisera que « Le niveau auquel se situe la valeur juridique des principes généraux du droit ne peut résulter que du rang de leur source formelle. En droit français, il est de principe que la valeur d’une norme juridique est en relation avec le rang de l’organe qui l’édicte (la hiérarchie des normes d’origine commune se déterminant d’après les formes et procédures d’édiction) ».
Cependant, sa théorie a créé des controverses quant à la place du juge lors de la création des principes généraux du droit.
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