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Mondialisation et récession du pouvoir juridique de l'état

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Par   •  27 Novembre 2016  •  Commentaire de texte  •  1 874 Mots (8 Pages)  •  931 Vues

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                De même que la croissance du commerce international déplace les espaces économiques et que le développement des médias internationaux estompe les frontières culturelles et idéologiques, la globalisation s'empare du droit et provoque en lui des phénomènes de brassage, d'interconnexion, de transversalité qui transforment sa morphologie.
C’est l’idée que met en avant Jean-Bernard Auby, professeur des Universités à Sciences Po, dans son ouvrage
« La globalisation, le droit et l’état » publié en 2010. En effet, l’écrivain appuie sur le fait que la mondialisation a un impact sur la puissance juridique étatique, tout en passant par un renoncement  de la souveraineté, par la concurrence de nouveaux producteurs de normes mais aussi par la mise en place de nouvelles facultés comme celle de former un droit dérivé; mais il n’en oublie cependant pas le rôle non négligeable de l’Etat dans la puissance juridique.
Ainsi il est intéressant de se demander en quoi la mondialisation entraine-elle une récession du pouvoir juridique de l’Etat?
Tout d’abord, il conviendra d’étudier les différents acteurs à la fois accélérateurs de la mondialisation mais aussi freins à la puissance juridique de l’Etat (I), puis de s’interroger quant au rôle de l’Etat dans les organisations régionales de par la notion de droit dérivé (II).


I) Des acteurs accélérateurs de la mondialisation mais freins à la puissance juridique de l’Etat

Aujourd’hui, la puissance juridique connait certaines limites en raison des nouveaux acteurs moteurs de la mondialisation, comme c’est le cas des organisations régionales (A) mais aussi des nouveaux producteurs de normes à l’origine d’une crise juridique étatique (B).

A) Le pouvoir juridique de l’Etat limité face aux organisations régionales


1) L’abandon d’une certaine forme de souveraineté des Etats

        « Les Etats ont consenti de véritables abandons de souveraineté à des entités internationales. Situations dont l'exemple le plus avancé est celui de l'Union européenne, dans laquelle la souveraineté est réellement partagée entre l'Union et les Etats membres ». En effet, comme l’énonce Jean-Bernard Auby, certains états, en intégrant des organisations régionales ou des groupements d’états, ont finalement perdu leur souveraineté au profit de ce groupement. C’est par exemple le cas de la France au sein de l’Union Européenne. Tout d’abord on peut estimer que les transferts de compétences à l’Union Européenne sont tels que les états auraient finalement perdus leur souveraineté. Par exemple, normalement faire sa monnaie fait parti du pouvoir de commandement d’un état; ainsi selon cette thèse, avec la politique monétaire de l’euro, la France a perdu sa souveraineté, elle a donc perdu son caractère d’état et c’est l’UE qui devient un état. On peut alors dire que l’UE est devenu ce qu’on appelle un « état fédéral ». Toutefois, on peut estimer au contraire que les états qui composent l’UE restent de véritables états (des états souverains). Autrement dit, les différents transferts de compétences à l’UE n’auraient pas porté atteinte à la souveraineté des états.

2) La supériorité des droits internationaux face aux droits nationaux

Aussi, dans
« l’Etat post-moderne retour sur une hypothèse », J.Chevalier conçoit également le fait que les organisations régionales se construisent au dessus des états. Comme par exemple avec la mise en place d’accords, comme par exemple l’ALCA (accord de libre commerce des Amériques) mis en place par l’ALENA et le Mercosur afin de favoriser le libre-échange entre ces deux organisations régionales : les décisions de ces organisations priment ainsi sur celles des pays. De même pour l’UE, les droits de l’Union Européenne priment sur les droits nationaux du fait de la place des traités dans la pyramide des normes (soit la seconde position, après la Constitution).

Outre les organisations régionales, il y a également les FTN, les ONG et les organisations internationales qui influent sur la puissance juridique étatique.

B) Une crise juridique étatique à l’issue des nouveaux producteurs de normes


1) Les principaux et nouveaux acteurs de la mondialisation et du droit : FTN et ONG

        «Dans la globalisation, l'Etat est concurrencé par d'autres producteurs de normes, privés ou publics d’ailleurs ». En effet, ici est montré qu’avec la mondialisation, l’Etat connait une certaine crise. Il y'a tout d’abord une crise qui se joue avec la création de nombreux contre-pouvoirs qui concurrencent les Etats et qui remettent en cause leur pouvoir suprême au sein des relations internationales.  C’est le cas des institutions telles que les grandes entreprises ou les multinationales, comme le cite J.Chevalier « ces firmes tendent à ignorer les frontières étatiques et à construire des dispositifs de régulation de leurs relations mutuelles indépendants de l’intervention étatique ». De plus, ce dernier montre que les ONG engendrent notamment une remise en cause du pouvoir étatique sur les relations internationales, en effet elles « pèsent sur les négocations menées par les représentants des états » mais elles ont aussi un grand pouvoir décisionnel sur les problèmes internationaux (comme China Labor Watch qui défend les droits des travailleurs en Chine, notamment en conflit avec Apple). L’Etat n’est donc plus le seul régulateur international, ni la seule puissance juridique; les Etats doivent s’accorder aux décisions de nombreux autres acteurs il y a donc un phénomène de « mondialisation du droit ».

2) Les organisations internationales, nouveaux créateurs de normes

Aussi, Auby cite les organisations internationales, «le droit de la Convention européenne des droits de l'Homme, le droit de l'OMC aussi, présentent les mêmes caractéristiques de navires juridiques qui ont largement rompu les amarres avec la puissance juridique des Etats auxquels ils s'appliquent et qui ont été à leur origine ». Plus clairement, l’auteur sous-entend que les organisations internationales, les dispositifs de coopération (comme la Banque Mondiale, le FMI, l’ONU etc) construits par et pour les états brisent les liens entre les états et leur puissance juridique. Ces organisations ont de plus en plus de responsabilités, que ce soit au niveau économique (comme l’OMC qui assure la régulation du commerce) ou politique (exemple de l’ONU qui veille à la paix dans le monde) et les Etats doivent s’y soumettre.

II) Un rôle dans les organisations régionales à peser notamment de par la notion de droit dérivé

L’Etat a donc un rôle contestable dans les organisations régionales, il peut apparaitre comme soumis du fait de la création du droit dérivé (A) mais il a cependant un poids juridique non négligeable (B).

A) La soumission des Etats à leur propre instauration : le droit dérivé

1) Le droit dérivé, un droit créé par les Etats membres d’une organisation

        «Les Etats acceptent de plus en plus fréquemment de laisser se créer des gisements de normes qui sont théoriquement sous leur dépendance, mais qui en réalité fonctionnent vis-à-vis d'eux d'une manière très largement autonome. Une forme accentuée du phénomène se rencontre dans les cas où ils dotent des institutions internationales de la faculté de produire du droit dérivé ». En fait, les états sont plus consentants dans la création de normes qui sont au final autonomes. Ils dotent ainsi leurs institutions du droit dérivé, qui est essentiellement constitué par les actes pris par les institutions communautaires dans l'exercice des compétences prévues par les traités. Auby cite donc l’Union Européenne, qui est dotée d’un droit communautaire dérivé composé des actes décidés par les institutions communautaires en application des traités de l’UE, dans les domaines de compétence de l’UE. Encore une fois, ceci montre que les Etats se partagent le monopole juridique avec d’autres acteurs, car beaucoup d’Etats se sont rendus compte que la mondialisation des échanges ne leur permet plus d’exister de façon isolée.


2) Un droit  toutefois supérieur au droit national de par son adaptation à la majorité

De plus, comme l’auteur l’énonce: « le droit dérivé s'adapte à la majorité, et non à l'unanimité... Le lien avec la volonté de l'Etat apparaît comme étant fortement limité ». Tout d’abord, il est nécessaire de rappeler que la procédure législative ordinaire prévoit que une fois que la Commission a présenté une proposition d’acte, le Conseil vote les projets de textes à majorité qualifiée (vote nécessitant l'accord de 55% des membres du Conseil, soit au minimum 16 pays sur 28) car dans une Union à 28 États membres, l’unanimité devient plus difficile à atteindre. Ainsi, si les propositions d’actes sont votés à majorité qualifiée, le droit dérivé est également issu de la majorité puisque selon sa définition il est composé de ces dernières. Par conséquent, comme le montre l’auteur, le poids de la décision de l’Etat devient donc minime car un Etat membre peut être contre une proposition d’acte et celle-ci peut quand même être acceptée s’il y a majorité qualifiée. La primauté du droit communautaire s'impose donc au droit national et à l’ensemble des autorités nationales, y compris les autorités décentralisées telles que les collectivités territoriales; le pouvoir juridique de l’Etat est donc limité.

Cependant, l’Etat est à l’origine de cette notion de droit dérivé, il peut également faire varier sa position au sein d’une organisation, son rôle est donc à nuancer.

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