Modèles de justice constitutionnelle
Dissertation : Modèles de justice constitutionnelle. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Samantha Guyon • 13 Mars 2020 • Dissertation • 2 119 Mots (9 Pages) • 764 Vues
Dissertation : Les modèles de justice constitutionnelle
Napoléon Bonaparte aurait dit « Il faut qu'une constitution soit courte et obscure. Elle doit être faite de manière à ne pas gêner l'action du gouvernement. », or, de nos jours beaucoup de pays ont adopté un système démocratique où les droits et libertés sont protégés par la Constitution. Une justice constitutionnelle a été mise au point afin d’éviter l’utilisation de normes juridiques non conformes à la Constitution.
La justice constitutionnelle est l’ensemble des institutions et des techniques grâce auxquelles est assurée la suprématie de la Constitution, autrement dit, on définit la justice constitutionnelle comme tout juge qui applique une règle constitutionnelle à un litige qui lui est soumis. Hans Kelsen théorise cette idée et la définit comme « la garantie juridictionnelle de la Constitution ».
Cette réflexion se basera seulement sur les modèles de justice constitutionnelle, traitera de la période du XVIIIème siècle jusqu’à nos jours et concernera l’Amérique et l’Europe. C’est ce que l’on appelle le droit comparé. En effet, deux modèles se démarquent particulièrement : le modèle de justice constitutionnelle américain de Judicial Review et le modèle de justice constitutionnelle européen.
Il est intéressant de se questionner sur les différents modèles de justice constitutionnelle étant donnée que ceux-ci sont particulièrement variés.
De quelle manière le modèle américain et le modèle européen de justice constitutionnelle peuvent être comparés ?
Même si les deux systèmes mettent en avant une opposition évidente (I), celle-ci est nuancée et relativisée par la pratique (II).
I- Deux systèmes clairement opposés
Une opposition se dégage des deux modèles notamment leur naissance provenant de sources différentes (A) et également leurs caractéristiques (B).
A) Deux modèles issus de différentes sources
En premier lieu, le contrôle de constitutionnalité des normes aux États-Unis aussi appelé Judicial Review s’est construit après un arrêt fondateur de la Cour suprême des États-Unis en 1803. Cet arrêt opposait Marbury à Madison. En effet, en 1801, après que les fédéralistes aient été au pouvoir pendant plusieurs années, T. Jefferson, républicain, a remporté les élections présidentielles. J. Adams, le président sortant, a donc utilisé le temps qu’il lui restait avant la fin de son mandat pour mettre en place des mesures préventives permettant de limiter les effets de la politique antifédéraliste que le nouveau président allait instaurer à son arrivée. Tout d’abord, il a voulu se préserver une influence sur le pouvoir judiciaire, pour cela, et au moyen de sa majorité au Congrès, il a créé de nouveaux postes de juges et a nommé à leur tête des partisans du fédéralisme. Adams a fait adopter tous les actes d’affectation des nouveaux magistrats, certains d’entre eux n’ont pas été remis à leurs destinataires avant l’arrivée au pouvoir de Jefferson, ce qui a créé une complication. Jefferson a donc demandé au nouveau secrétaire d’État, James Madison, de ne pas donner ces actes, cela concernait notamment William Marbury nommé juge pour le district de Columbia par l’ancien président. Marbury a alors décidé d’agir devant la Cour suprême et lui a demandé d’adopter une injonction afin d’obliger Madison à le nommer juge pour le district de Columbia. Finalement, malgré le droit de Marbury à être nommé juge, la Cour suprême a conclu que la loi attribuant la faculté à la Cour suprême d’adresser une injonction est contraire à la Constitution. Elle a donc décidé d’écarter cette loi, de fait Marbury n’a pas pu être nommé juge.
C’est la première fois que la Cour suprême écarte l’application d’une loi fédérale en raison de sa non-conformité avec la Constitution fédérale. Cet arrêt permet d’affirmer deux principes fondamentaux du constitutionnalisme moderne. Le premier affirmant qu’une Constitution est une loi fondamentale qui tire son autorité du peuple et qui ne peut pas être modifiée de la même façon qu’une loi ordinaire (Constitution rigide). Le second impose aux juges, quel que soit leur niveau sur le plan de l’échelle juridictionnelle, de vérifier la constitutionnalité des lois et censurer celles qui sont inconstitutionnelles.
Le modèle européen, quant à lui, s’inspire du juriste autrichien Hans Kelsen, notamment de son ouvrage « La garantie juridictionnelle de la Constitution » . Kelsen indique dans celui-ci que le Parlement lui-même n’est pas en mesure d’annuler des normes non constitutionnelles et donc il est nécessaire d’attribuer cette tâche à « un organe différent de lui, indépendant de lui et par conséquent aussi de toute autre autorité étatique qu’il faut charger de l’annulation ses actes inconstitutionnels ». Il affirme que chaque État doit adapter cela à sa Constitution, mais qu’il restera toujours des caractéristiques communes.
Il faut retenir que ce modèle n’est pas appliqué par tous les États d’Europe, comme par exemple la Grèce qui a choisi de reproduire le modèle américain ou le Portugal qui, lui, mixe les deux.
B) Deux modèles différenciés par leurs caractéristiques
Tout d’abord, dans le modèle américain, le contrôle est dit diffus et décentralisé c’est-à-dire que n’importe quel juge, lorsqu’il applique un texte, doit vérifier sa conformité à la Constitution. Par ailleurs, toutes les lois fédérales, ou celles des États fédérés, sont tenues de respecter la Constitution. C’est donc le rôle des juges des États fédérés et le juge de l’État fédéral de veiller au respect de cela. La justice constitutionnelle est alors appliquée par tous les juges quel que soit leur niveau sur le plan de l’échelle juridictionnelle. Cependant, la mission principale de la Cour suprême est d’assurer l’unité en matière de contrôle de constitutionnalité des lois.
Le modèle européen, contrairement au modèle américain, est dit concentré, c’est- à-dire, une juridiction spécifiquement compétente est instaurée pour contrôler la constitutionnalité des lois. Celle-ci prend différents noms en fonction des pays : Conseil constitutionnel (France), Cour constitutionnelle (Allemagne et Autriche). Ce choix de modèle concentré permet d’écarter les risques de conflit de jurisprudence en matière d’interprétation de la norme constitutionnelle
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