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Les services publics par nature, une notion toujours d'actualité ?

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Par   •  21 Octobre 2020  •  Dissertation  •  1 918 Mots (8 Pages)  •  1 530 Vues

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Les services publics par nature : une notion toujours d’actualité ?

    Le service public est une notion clé du droit administratif. Elle trouve sa naissance dans l’arrêt Blanco du 8 février 1873, au moment où l’activité de l’administration est d’abord la puissance publique. Léon Duguit décrit le service public comme « l’activité que les gouvernants doivent obligatoirement exercer dans l’intérêt des gouvernés ».

Selon sa définition classique, le service public est une activité d’intérêt général gérée par une personne publique. Cette définition se caractérise par la prééminence du critère organique, la qualification du service public dépend essentiellement de la nature de l’organe qui gère l’activité, cet organe doit être une personne publique, c’est à dire l’état, une collectivité territoriale ou un établissement public. Toutefois, l’activité de service public n’est pas forcément l’apanage des personnes publiques, de nombreux services sont pris en charge par des personnes privées, notamment dans le cadre de concessions. Dès lors que l’on est en présence d’une personne publique, une activité est considérée comme étant un service public, quel que soit le domaine sur lequel elle porte. Une activité de service publique suppose la satisfaction d’un intérêt général, elle doit répondre à un besoin collectif et engendrerait une non satisfaction collective si elle n’était pas rendue. Face à l’élargissement de la notion de service public par la jurisprudence, Maurice Hauriou a développé la théorie du « service public par nature », qui concerne les activités traditionnellement exercées par l’état. Certaines activités seraient de la nature, voire l’essence même de l’état ou de l’administration publique. Il a ainsi proposé de réduire le service public à son domaine naturel, c’est à dire aux seules activités régaliennes de l’état pour lesquelles il y a peu de doute qu’elles aient un caractère administratif, telles que la police, la justice, la défense nationale. Il ne fut pas écouté car dès 1921, la jurisprudence a admis dans l’arrêt Bac d’Eloka que les services publics pouvaient avoir un objet industriel et commercial, ce qui s’éloigne de la conception traditionnelle du service public.

    Il est donc légitime de se demander si malgré la diversification des services publics, les services publics par nature continuent à occuper une place déterminante au sein du droit administratif.

    Si la notion de service public par nature est remise en cause en raison de l’élargissement que connait le service public (I), celle-ci connaît tout de même une réhabilitation (II).

  1. La fragilisation du service public par nature

 

     Les services publics par nature sont remis en cause du fait de l’émergence des services publics industriels et commerciaux (A) ainsi que de part l’ingérence des personnes privées dans la gestion des services publics (B).

A) L’apparition des services publics industriels et commerciaux

     Pendant longtemps, les seuls services publics qui étaient reconnus étaient les services publics administratifs (SPA), ils avaient un objet administratif, ce qui les distinguaient des activités privées réputées industrielles et commerciales. En réalité, dès le 19e siècle, l’état et les collectivités locales avaient pris en charge des services publics à caractère industriel et commercial tels que le transport, la distribution d’eau, le gaz, mais en confiant leur gestion à des personnes privées dans le cadre de concessions. La distinction entre les SPA et les SPIC est introduite par l’arrêt Bac d’Eloka du Tribunal des Conflits du 22 janvier 1921. Cet arrêt reconnait aux personnes publiques le droit d’exploiter des SPIC, celles-ci vont commencer à prendre en charge des activités industrielles et commerciales. Cette classification est essentielle car les SPA relèvent du droit administratif et les SPIC relèvent du droit privé et donc du juge judiciaire. Les qualifications textuelles de services publics sont très rares, il faudra donc se baser sur un faisceau d’indices. Ainsi, l’arrêt Union syndicale des industries aéronautiques du 16 novembre 1956 fixe 3 critères, l’objet, le mode de financement et les modalités de fonctionnement, qui permettent de déterminer si un service public est un SPA ou un SPIC. L’objet désigne la substance même de l’activité, si elle est comparable à une entreprise privée, l’indice penche en faveur d’un SPIC, alors que si elle n’est pas comparable, l’indice va vers un service public administratif. Le mode de financement renvoie à l’origine des ressources. Si les ressources proviennent principalement de redevances versées par les usagers, l’indice penche en faveur d’un SPIC, comme par exemple la distribution de gaz ou d’électricité. Si les ressources proviennent d’impôts ou de taxes, l’activité aura tendance à être un SPA. Les modalités de fonctionnement désignent les conditions dans lesquelles la gestion du service public est organisée. Si le service est géré comme une entreprise et est organisé en vue d’atteindre une rentabilité, il y a une forte présomption de SPIC, alors que si dans son mode de fonctionnement, il caractérise une activité plutôt administrative et n’a pas vocation à réaliser un bénéfice, ce sera plutôt un SPA. En effet, d’après un avis du Conseil d’Etat du 10 avril 1992, le service public d’enlèvement des ordures ménagères est soit un SPIC ou un SPA, selon qu’il est financé par une redevance ou une taxe.

 

B) L’émergence des personnes privées dans la gestion des services publics

     A l’origine, la personne privée ne pouvait gérer des services publics que dans le cas d’une concession, lorsque la personne publique charge une personne privée par le biais d’un contrat de concession, d’assurer le service public à sa place. Cette restriction est devenue inadaptée du fait du besoin croissant de service public. Le Conseil d’Etat refuse d’analyser dans l’arrêt Etablissement Vezia du 20 décembre 1935, l’activité d’aide agricole des « sociétés indigènes de prévoyance » crée par décret comme un service public. Il va toutefois consacrer la possibilité pour les personne privées d’exercer une activité à mi-chemin entre une activité de service public et une activité privée, il s’agit d’une activité privée d’intérêt général. Le Conseil d’Etat va aller plus loin dans l’arrêt Caisse primaire « Aide et protection » du 13 mai 1938, il affirme pour la première fois qu’une personne privée, dans le cas présent une caisse primaire d’assurances sociales, puisse gérer un service public indépendamment de toute concession. Le service public cesse d’être l’attribut exclusif des personnes publiques car on transfère sa gestion à des personnes privées. Cependant, cet arrêt s’abstenait de préciser à quelles conditions l’activité d’une personne privée est un service public. Il a fallu attendre les arrêts Magnier du 13 janvier 1961 et Narcy du 28 juin 1963 pour les connaitre. Il ressort de ces arrêts que trois conditions doivent être réunies pour que l’activité d’une personne privée soit un service public, il faut qu’elle ait un objet d’intérêt général, qu’elle s’effectue sous le contrôle d’une personne publique et qu’elle nécessite la mise en oeuvre de prérogatives de puissance publique. Ainsi, cela explique pourquoi l’arrêt Rolin du 27 octobre 1999 considère que « La Française des jeux », qui est une personne privée, ne gère pas de service public car son activité est dictée par le souci de faire du profit et non pas de satisfaire l’intérêt général.

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