Les frontières ont-elles encore un sens?
Dissertation : Les frontières ont-elles encore un sens?. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar dolino76 • 18 Décembre 2016 • Dissertation • 2 912 Mots (12 Pages) • 5 550 Vues
Les frontières ont elles encore un sens ?
Haushofer, père de la géopolitique allemande, identifie les frontières comme « les limites du cadastre planétaire ».
La frontière semble être une invention humaine permettant de sectoriser les espaces et définir les régimes juridiques, politiques, économiques applicables. Les frontières ont l’avantage d’apporter une certaine stabilité, un ordonnancement fixe, mais elles ont l’inconvénient de ne pas pouvoir s’adapter en temps réel aux changements, notamment géopolitiques.
Une frontière est une discontinuité géopolitique, à fonction de marquage réel, symbolique ou imaginaire. Cependant, le terme de frontière incorpore plusieurs notions que l’on peut regrouper en deux catégories. La frontière peut être matérielle, c’est à dire qu’elle existe géographiquement. Elle une limite palpable, pouvant se matérialiser concrètement par une montagne, une rivière, un lac. Cette frontière matérielle est issue du droit international, négociée, ratifiée.
La frontière peut être dans sa deuxième acception, abstraite elle existe dès l’instant ou un groupe, un espace se différenciera par des critères propres et intrinsèques tels que la langue, le lieu d’habitation, une culture. Le groupe se reconnaitra via les critères qu’il s’est lui même fixés. Les frontières ont donc des typologies différentes, ainsi que des fonctions différentes.
Les enjeux découlant des frontières sont emprunts de paradoxe. Synonyme de front elles peuvent évoquer le danger et les tensions. Elles ont pour autant vocation à stabiliser les relations entre deux entités, et sont un lieu de échange et de connexion. De plus, une frontière est une notion imaginaire, et pourtant se matérialise par des séparations bien physiques (Mur, check point).
Enfin la mondialisation semble faire tomber en désuétude ce concept, cependant, les conflits frontaliers, identitaires et commerciaux n’ont jamais été aussi importants.
La définition des frontières nécessite également de savoir à quelle échelle on se place. Elles peuvent délimiter une commune, un département, un pays, une région du monde, voir un continent. Le problème est que les frontières se superposent. Les frontières peuvent aussi être sociales (lieu d’habitation, profession, loisir, niveau de revenus). Dans une conception classique (que nous retiendrons ici) la frontière est celle de l’Etat puisqu’elle lui permet de délimiter son territoire, et donc son imperium. La superposition des territoires est donc en sus la question de la superposition des zones de pouvoir.
Les frontières ont été fixées par des guerres, par la violence, des négociations. Les limites de la France, n’ont pas été toujours celle que l’on connaît actuellement. La cartographie contemporaine française actuelle date de l’après guerre. Encore aujourd’hui subsistent quelques incertitudes. Par exemple l’interprétation du tracé de la frontière franco-italienne au niveau du mont Blanc diffère entre les cartes françaises (qui placent le sommet du mont Blanc entièrement sur son territoire) et les cartes italiennes (qui le partagent entre les deux pays). Des adaptations mineures sont également intervenues jusqu’en 2006 avec le Luxembourg (échange de parcelles).
Depuis quelques années les problématiques concernant les frontières sont plus dématérialisées, l’enjeu est celui du numérique, des flux économiques et culturels. Les frontières au sens premier deviennent donc obsolètes face à ces mouvements immatériels.
L’idée est que la frontière permet de délimiter le territoire, c’est-à-dire un élément indispensable de la définition de l’État. Elle fait parti du contrat social, puisque fixant la sphère de l’imperium. La frontière permet d’assoir « la propriété » de l’Etat sur son territoire. Elle Son absence emporte en principe impossibilité de création de cette personne morale. Les mouvements libéraux prônent une certaine porosité, voir disparition des frontières, une ouverture sur le monde, qui serait bénéfique à l’Etat bien que remettant partiellement en cause la notion de territoire. Mais inversement les frontières ne s’ouvrent pas totalement, ne laissant pas pénétrer ce qui pourrait remettre en cause l’ordre social et l’imperium.
Les frontières ont elles encore un rôle déterminant pour l’Etat dans une société de plus en plus globalisée ?
Les frontières permettent avant tout une délimitation nécessaire du pouvoir étatique. Les Etats sont donc à la fois les acteurs du tracé des frontières, mais également les destinataires (I). Cette conception des frontières semble aujourd’hui tomber en désuétude, et doit s’adapter à la réalité géopolitique (II).
I. Le rôle premier des frontières : la délimitation de l’assise territoriale et juridique de l’Etat.
Les frontières, bien qu’en proie à des transformations, font partie de l’essence même d’un Etat (A). Cependant bien que leur forme évolue, leur rôle reste sensiblement le même (B).
A. Les frontières, cadre de la souveraineté de l’Etat.
L’État en droit international se définit comme une entité abstraite, dématérialisée par l'alchimie d'une fiction juridique. De la confrontation entre égales souverainetés résulte la nécessité d'une délimitation qui fait apparaître la frontière destinée à empêcher tout empiétement sur une autre souveraineté. L'organisation globale des espaces géographiques à partir de territoires souverains engendre une société d’États juridiquement homogènes.
La contestation des territoires a toujours existé, et est d’autant plus forte quand les frontières sont tracées artificiellement et imposées. Prenons ainsi l’exemple de l’édification du Mur bâti en 2002 par Israël afin de délimiter la frontière avec la Palestine. Ce dernier est contesté tant sur le plan humanitaire, juridique et politique. La cour de justice internationale considère d’ailleurs qu’Israël est dans l'obligation de réparer tous les dommages causés par la construction du mur dans le territoire palestinien. La frontière est donc à la fois le symbole de la puissance étatique, mais se confronte également au droit international, et représente ainsi également les limites de l’imperium étatique.
Les frontières jouent un rôle primordial dans le maintien de l’Etat, de l’application territorialisée de son régime juridique. Ainsi les
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