La démocratie moderne
Synthèse : La démocratie moderne. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Scorpman • 23 Avril 2020 • Synthèse • 5 098 Mots (21 Pages) • 1 043 Vues
Approche :
La démocratie moderne est fondée sur l’idée de représentation : les électeurs choisissent librement les gouvernants auxquels ils confient la responsabilité du pouvoir ; ils sanctionnent leur action lors des échéances électorales suivantes, prévues par la loi, en les réalisant ou en choisissant d’autres équipes. Mais la légitimité de l’idée même de représentation n’est-elle pas aujourd’hui remise en cause à la fois par la négligence de beaucoup de citoyens, par la volonté des individus en démocratie de participer plus directement à l’exercice du pouvoir et par l’immédiateté de la connaissance de l’opinion par les sondages ? Le temps de la démocratie représentative est-il accordé avec les nouveaux temps sociaux ?
Introduction
Jean Jacques Rousseau a souligné la contradiction entre démocratie et représentation, (cette dernière supposant une certaine aliénation du pouvoir politique à autrui, dans des systèmes où l’on ne gouverne point par mandats impératifs), en réfutant l’éloge fait par Montesquieu de la Constitution anglaise, Rousseau soutient que le peuple anglais n’est point libre. Car il n’est libre que le temps d’une élection (l’auteur ajoute en outre que l’usage qu’il fait alors de sa liberté justifie bien qu’il la perde). Mais la démocratie directe est-elle envisageable et raisonnable ? Techniquement elle est difficilement concevable dans la mesure où les citoyens, contrairement à ceux de la Grèce Antique, à Athènes, travaillent et ne peuvent se réunir sur la place publique pour délibérer en permanence. Les Grecs d'Athènes le pouvaient car ils avaient des esclaves qui assuraient leur quotidien. De plus, même dans ce contexte historique, cela était possible dans le cadre d'une Cité restreinte. De plus la démocratie représentative possède des vertus alors que la démocratie directe prônée par Rousseau des inconvénients majeurs : les élus sont pour la plupart des professionnels de la politique. Généralement, en-dehors d'une compétence générale, ils tendent à se spécialiser dans tel ou tel secteur de l'activité politique. Ils connaissent les dossiers. Tout en se prononçant en fonction de leur philosophie politique, celle-là même qui a conduit les électeurs à les choisir comme représentants, ils font preuve d'une modération qui est le propre même de ceux qui connaissent les dossiers. Chacun peut observer que lorsqu'on connaît bien un domaine particulier, on est à l'abri de jugements à l'emporte-pièce. La complexité des problèmes qui se posent conduit les personnes concernées à avoir des jugements nuancés et généralement pertinents. Chacun conviendra que si des référendums sur des questions sensibles comme la peine de mort, l'euthanasie, la fiscalité etc. étaient la base de nos démocraties, les décisions seraient plus inspirées par la passion, l'émotion, l'ignorance que par la raison. Ainsi, il semble que la démocratie représentative soit la meilleure solution c'est la théorie de la souveraineté nationale qui s’impose dans l'article 3 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 « Le principe de toute souveraineté réside essentiellement dans la nation. Nul corps, nul individu, ne peut exercer d'autorité qui n'en émane ». Cependant, la démocratie représentative peut présenter des défauts sur lesquels il conviendra de s'interroger. La première question qu'elle soulève et la suivante : comment assurer une représentation à la fois juste et efficace, c'est-à-dire permettant à la fois d'exprimer les points de vue de la diversité des citoyens et de gouverner de manière cohérente ? Pour autant, un équilibre avait été atteint, il y a près d’un siècle, or les sociétés démocratiques ont commencé à se défaire avec l’affaiblissement des Etats-providence qui avaient permis de leur donner une certaine consistance. Aussi ne faudrait-il pas saisir le lieu de cette souveraineté ailleurs que dans la simple désignation des élus ?
I – La légitimation de la démocratie représentative
A – Justification du régime représentatif
- Affirmation du principe
Montesquieu rejette la démocratie directe : avec beaucoup de précautions oratoires « Comme, dans un État libre, tout homme qui est censé avoir une âme libre doit être gouverné par lui-même, il faudrait que le peuple en corps eût la puissance législative » mais aussi, passé ces précautions de manière plus directe « Il y avait un grand vice dans la plupart des anciennes républiques: c'est que le peuple avait droit d'y prendre des résolutions actives, et qui demandent quelque exécution, chose dont il est entièrement incapable ».
Il met en avant des considérations pratiques : l’argument du nombre (« Comme, dans un État libre, tout homme qui est censé avoir une âme libre doit être gouverné par lui-même, il faudrait que le peuple en corps eût la puissance législative. Mais comme cela est impossible dans les grands États, et est sujet à beaucoup d'inconvénients dans les petits, il faut que le peuple fasse par ses représentants tout ce qu'il ne peut faire par lui-même ») ; l’argument de l’efficacité (« et est sujet à beaucoup d'inconvénients dans les petits, il faut que le peuple fasse par ses représentants tout ce qu'il ne peut faire par lui-même »)
Et des considérations idéologiques sont suggérées : l’élitisme sous-jacent (« Le grand avantage des représentants, c'est qu'ils sont capables de discuter les affaires. Le peuple n'y est point du tout propre ») et la méfiance vis à vis du peuple (« ce qui forme un des grands inconvénients de la démocratie.»). Montesquieu ne se fonde pas sur la théorie de la souveraineté nationale, même s’il met en avant la Nation…il s’attache précisément à des techniques du régime représentatif : l’électorat fonction : voter est une fonction, pas un droit, les conséquences d’un tel choix : un suffrage restreint (« tous les citoyens, dans les divers districts, doivent avoir droit de donner leur voix pour choisir le représentant; excepté ceux qui sont dans un tel état de bassesse, qu'ils sont réputés n'avoir point de volonté propre » = le suffrage censitaire) ; le mandat représentatif : affirmation du principe par Montesquieu de l’interdiction des instructions précises (« Il n'est pas nécessaire que les représentants, qui ont reçu de ceux qui les ont choisis une instruction générale, en reçoivent une particulière sur chaque affaire, comme cela se pratique dans les diètes d'Allemagne ») justifiée par des raisons d’ordre pratique et non parce que les députés représenteraient l’ensemble du corps électoral (« Il est vrai que, de cette manière, la parole des députés serait plus l'expression de la voix de la nation; mais cela jetterait dans des longueurs infinies, rendrait chaque député le maître de tous les autres, et, dans les occasions les plus pressantes, toute la force de la nation pourrait être arrêtée par un caprice »). Aussi le choix de petites circonscriptions (« L'on connaît beaucoup mieux les besoins de sa ville que ceux des autres villes ; et on juge mieux de la capacité de ses voisins que de celle de ses autres compatriotes. Il ne faut donc pas que les membres du corps législatif soient tirés en général du corps de la nation; mais il convient que, dans chaque lieu principal, les habitants se choisissent un représentant. ») qui justifie à son tour l’absence d’instructions particulières (« Quand les députés, dit très bien M. Sidney, représentent un corps de peuple, comme en Hollande, ils doivent rendre compte à ceux qui les ont commis ; c'est autre chose lorsqu'ils sont députés par des bourgs, comme en Angleterre.»)
...