Costedoat - Assemblée plénière, 25 février 2000
Commentaire d'arrêt : Costedoat - Assemblée plénière, 25 février 2000. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar imeanilovelaw • 5 Octobre 2020 • Commentaire d'arrêt • 1 216 Mots (5 Pages) • 773 Vues
Assemblée plénière, 25 février 2000
Dans un arrêt du 25 février 2000, dit Costedoat, la Cour de Cassation en assemblée plénière a eu l’occasion de se prononcer concernant la responsabilité du préposé dans le cadre d’un dommage commis dans l’exercice de sa mission.
En l’espèce, une société productrices de rizières avait employé les services d’une autre pour déverser par le biais d’un hélicoptère à la diffusion d’un traitement d’herbicides sur ses champs. Sous l’effet du vent, les produits vaporisés avaient atteint et endommagé les cultures voisines.
La victime propriétaire du champ qui avait été endommagé assigne donc en réparation de son préjudice à la fois la société qui avait déversé le produit, ainsi que son pilote d’hélicoptère.
La cour d’appel avait retenu la responsabilité du pilote, préposé de la société d’hélicoptère en considérant que celui-ci avait manqué à son obligation puisqu’il aurait du, en raison des conditions météorologiques, s’abstenir de procéder à sa mission. Un pourvoi est donc formé sur fondement des articles 1382 et 1384 du code civil
Peut-on engager la responsabilité du préposé pour les dommages causés par sa faute dans l’exercice de ses missions?
A cette question, la Cour de cassation répond par la négative. Elle rappelle en effet que la responsabilité du commettant peut être engagée pour les faits de son préposé mais elle vient également préciser que le préposé bénéficie d’une immunité civile pour les faits commis dans l’exercice de sa fonction.
L’arrêt constitue un revirement de jurisprudence majeur en instaurant l’immunité civile du préposé fautif (I) mais cette solution s’est vue très critiquée (II)
- Une évolution de responsabilité partagée à immunité du préposé
- La réponse à une conception de de responsabilité partagée entre préposé et commettant
- Le code civil de 1804 prévoyait à l’origine plusieurs cas de responsabilité pour fait d’autrui. Il prévoyait par exemple le cas de l'engagement de responsabilité du commettant du fait de son préposé. C’est une considération de la responsabilité objective (sans faute du responsable).
- Même si le commettant pouvait voir sa responsabilité engagée, on considérait que l’engagement de responsabilité ne pouvait réellement avoir lieu qu’en cas de faute du préposé (arret de 1866) et il ne fallait pas qu’il s’agisse d’un abus de fonction (arret 19 mai 1988, qui pose 3 conditions cumulatives à l’abus de fonction: le préposé doit avoir agi hors des fonctions auxquelles il était employé, sans autorisation et à des fins étrangères à ses attributions.
- En dehors de ces cas spécifiques, on considérait que l’article 1384 permettant la possibilité pour la victime d’agir à la fois contre le commettant mais aussi contre le préposé. L’engagement de responsabilité était considéré cumulatif. Les deux responsabilité pouvaient être engagées in solidium.
- Exception: l’assureur du commettant pouvait se retourner contre le préposé en cas de malveillance
- la victime pouvait agir contre le préposé ou le commettant seul, ou contre les deux, mais aussi, le commettant pouvait se retourner contre son préposé.
- L’arrêt Costedoat rompt totalement avec ce régime antérieur en posant l’immunité du préposé.
- L’immunité du préposé posée par l’arrêt Costedoat
- Cet arrêt est révolutionnaire puisqu’il va empêche toute action contre le préposé et pose son irresponsabilité!
- Il se place dans la vision d’un arrêt du 12 octobre 1993 où la Cour de Cassation avait considéré que on ne pouvait engage la responsabilité du préposé que dans le cas d’une faute personnelle. Cet arrêt était déjà venu limiter les cas de responsabilité du préposé et se voit sa vision consacré par l’arrêt Costedoat.
- L’arrêt de 2000 pose un principe: l’immunité du préposé pour tout les actes qu’il commet dans le cadre de ses fonctions (exclut les cas où il agit en dehors de sa fonction) « Attendu que n’engage pas sa responsabilité à l’égard des tiers le préposé qui agit sans excéder les limites de la mission qui lui a été impartie par son commettant »
- La responsabilité du préposé ne peut plus être engagée! la responsabilité du commettant se substitue à celle du préposé sauf pour les actes commis en dehors de ses fonctions!
- Il est ensuite précisé par un arrêt du 12 juillet 2007 que le préposé reste en réalité responsable puisque la victime peut agi contre son assurance: c’est plus une immunité qu’une irresponsabilité. L’arret Cousin précise aussi l’arrêt Costedoat: dans le cas d’une faute pénale intentionnelle, on peut engager la responsabilité du préposé
- L’importante critique de la solution Costedoat
- Une « hérésie judiciaire »: la révolte de la doctrine
- La doctrine a beaucoup critiqué la solution de l’arrêt Costedoat. POur elle cette solution nie le principe posé par l’art 1382 du code civil « Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. » ! Costedoat applique une différenciation selon si les actes sont commise dans ou hors du cadre de la mission, alors que l’article pose un principe opposé!
- Le préposé peut commettre une faute sans être responsable !
- La Cour de Cassation avait surtout cherché à protéger l’employé qui agit sous les ordres et qui ne saurait voir sa responsabilité engagée. Engager la responsabilité du commettant, c’est protégé le préposé soumis à ses ordres
- C’est pourtant très critiquable puisque cette solution constitue un manquement à la responsabilité pour faute.
- Aussi, cette solution limite le domaine d’action des victimes et leur possibilité pour être indemnisées (oppsoé à la vision indemnitaire de la responsabilité ). Cela est encore pire dans le cas où le commettant est insolvable! La victime n’a pas de possibilité de recours!
- Un domaine de l’immunité difficilement posé
- Question du domaine de l’immunité: quelle est son étendue en réalité?
- L’arrêt ne précise pas la question et crée un problème d’interprétation… et finalement pour les cas de préposés avec une certaines indépendance il était compliqué d’appliquer l’arrêt… Risque de manque d’objectivité des solutions; c’est le juge qui décidera seul
- Arrêt de 2004: la Cour de Cassation dit finalement que l’immunité s’étend à tout les préposé, quel que soit leur indépendance vis-à-vis du commettant.
- Cette question était compliquée dans le cadre des personnels médicaux!
- L’arrêt Costedoat énonce que n’est pas responsable le préposé qui agit sans excéder les limites de sa mission. Il en résulte qu’il reste responsable lorsqu’il commet des fautes excédant les limites de sa mission; mais dans ce cas, quels sont les critères qui engagent al responsabilité du préposé?
- La doctrine majoritaire propose de retenir le critère subjectif de l’intérêt du préposé: si il a un intérêt personnel, il excède les limites de sa mission.
- Cela est repris par le projet de réforme à l’art 1249 «Le préposé n’engage sa responsabilité personnelle qu'en cas de faute intentionnelle, ou lorsque, sans autorisation, il a agi à des fins étrangères à ses attributions. »
- Jusqu’à présent la Cour de cassation n’a pas eu l’occasion de se prononcer sur cette difficulté. En revanche elle a clairement apporté des exceptions au principe d’immunité: même lorsque le préposé reste dans le cadre de sa mission et même lorsqu’il n’excède pas les limites de sa mission, il pourrait engager sa responsabilité à titre exceptionnel dans certains cas.
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