Commentaire de l’arrêt CJUE, 18 mars 2014, Commission européenne c/ Parlement européen et Conseil (Biocides), affaire C-427/12
Commentaire de texte : Commentaire de l’arrêt CJUE, 18 mars 2014, Commission européenne c/ Parlement européen et Conseil (Biocides), affaire C-427/12. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar FEUUUUUUUU • 10 Novembre 2022 • Commentaire de texte • 2 099 Mots (9 Pages) • 730 Vues
Commentaire d’arrêt
Commentaire de l’arrêt CJUE, 18 mars 2014, Commission européenne c/ Parlement européen et Conseil (Biocides), affaire C-427/12
Par un arrêt rendu le 18 mars 2014, la Cour de Justice de l’Union Européenne réunie en grande chambre a précisé la faculté de choix du législateur européen quant à l’attribution d’actes délégués ou d’actes d’exécution à la Commission.
Le Parlement européen et le Conseil ont voté un règlement (n°528/2012) datant du 22 mai 2012 à propos de la mise à disposition sur le marché et l’utilisation de produits biocides. L’article 80 paragraphe 1 dudit règlement prévoit l’adoption par la Commission d’un règlement d’exécution (un acte d’exécution au sens de l’article 191 TFUE) visant à établir les redevances exigibles par l’Agence européenne des produits chimiques.
La Commission a introduit un recours en annulation le 19 septembre 2012 de l’article 80 paragraphe 1 du règlement du 22 mai 2022 sur le fondement de l’article 263 TFUE et réclame la condamnation du Conseil et du Parlement européen aux dépens.
La requérante argue que l’article 80 en son paragraphe 1 prévoit l’adoption de mesures par acte d’exécution fondé sur l’article 191 TFUE alors que cette adoption de mesures devrait s’effectuer par acte délégué prévu par l’article 190 TFUE. En effet, la Commission soutient notamment que ce serait la nature et l’objet du pouvoir qui lui est conféré qui déterminerait s’il faut attribuer un acte d’exécution ou de délégation. Qu’ainsi, la nature et l’objet des pouvoirs soutiendraient l’attribution à la Commission non pas d’un pouvoir d’exécution mais bien d’un pouvoir de délégation qui permet de compléter ou de modifier certains éléments non essentiels de l’acte législatif, ce dernier étant selon la Commission incomplet et nécessitant donc d’être complétée et modifié. La Commission estime conséquemment que le législateur (le Parlement européen et le Conseil) en attribuant le pouvoir d’exécution au motif que l’article 80 était suffisamment détaillé et défini au niveau législatif aurait commis une faute.
La nature et l’objet du pouvoir conféré à la Commission déterminent-ils si ce pouvoir relève d’une délégation législative ou d’une compétence d’exécution ? Considérant que la nature et l’objet du pouvoir est de compléter l’acte législatif, la Commission peut-elle réclamer l’attribution d’un pouvoir de délégation ?
Dans son arrêt rendu le 18 mars 2014, la Cour répond par la négative. Elle énonce que le législateur dispose d’un pouvoir d’appréciation et a tout à fait pu considérer que l’acte législatif était assez précis et ne nécessitait pas la mise en œuvre d’un pouvoir délégué. Ainsi, le juge de l’Union considère que l’attribution d’un simple pouvoir d’exécution prévu par l’article 291 TFUE était possible en l’espèce car l’article 80 paragraphe 1 était suffisamment complet et détaillé.
Sans pour autant relever une définition de l’acte d’exécution ni de critère de distinction avec l’acte délégué, la Cour confirme l’existence de différences sur la finalité des deux actes (I.) et laisse le pouvoir d’appréciation au législateur d’attribuer l’un ou l’autre et se borne à effectuer un contrôle restreint afin de vérifier si cette appréciation n’est pas entachée d’erreur manifeste d’appréciation (II.).
I. L’affirmation d’une distinction entre acte délégué et acte d’exécution fragilisée par l’absence de délimitation précise
Le traité de Lisbonne a introduit la distinction entre les actes d’exécution et les actes délégués et la Cour est venue entériner la distinction de ces deux actes qui sont exclusivement distincts (A.). En revanche, le Juge de l’Union refuse d’émettre une définition claire de l’acte d’exécution et d’établir des critères de distinction quant à l’application des deux compétences d’exécution (B.).
A. La confirmation d’une existence de deux compétences d’exécution distinctes attribuables par le législateur
- La jurisprudence CJCE 17 déc. 1970, Koster a d’abord confirmé une différence entre les actes trouvant directement leur base dans les traités et les actes fondés sur un acte de base et destinés à assurer son exécution, les actes d’exécution (consacrant la pratique de la comitologie). L’arrêt Biocides entérine dans la continuité une sous-distinction de ces « compétences d’exécution » (terme employé à l’article 202, troisième tiret, CE) en deux catégories distinctes, comme l’avait prévu le traité de Lisbonne par les articles 290 et 291 TFUE, reprenant la distinction proposée aux articles I-35 et I-36 de la Convention européenne.
- Selon la haute juridiction, il existe deux différents actes ayant une finalité différente dans l’exécution par la Commission de l’acte législatif. En effet, l’acte délégué a pour but de « compléter ou modifier » l’acte législatif alors que l’acte d’exécution n’a pour but que la « mise en œuvre dans des conditions uniformes dans tous les États membres » de l’acte législatif. La Cour reprend ainsi sans la mentionner expressément l’idée des conclusions de l’avocat général M. PEDRO Cruz Villalon : « À mon sens, une délimitation fondée sur la raison d’être et sur la finalité de chacune de ces notions juridiques me semble de loin la plus appropriée et permettrait de proposer des solutions correspondant à l’esprit du système prévu par les articles 290 TFUE et 291 TFUE ».
- L’existence de tels pouvoirs d’exécution pour la Commission introduits dans le traité de Lisbonne et confirmés dans l’arrêt Biocides confirme son rôle de coordination et d’exécution mentionné à l’article 17 TFUE.
La Cour de Justice de l’Union Européenne confirme ainsi que deux compétences d’exécution existent permettant à la Commission d’effectuer une exécution des actes législatifs du Parlement et du Conseil mais refuse de définir clairement et de donner un critère de distinction de ces actes se cantonnant au texte afin de laisser une marge d’appréciation d’attribution au législateur.
B. Le refus de trouver un critère de distinction d’acte d’exécution et d’acte délégué motivé par le pouvoir laissé au législateur
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