Commentaire d’arrêt CE Section 21 juin 2013, Communauté d’agglomération du pays de Martigues
Commentaire d'arrêt : Commentaire d’arrêt CE Section 21 juin 2013, Communauté d’agglomération du pays de Martigues. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Eliot Gil • 5 Novembre 2019 • Commentaire d'arrêt • 1 999 Mots (8 Pages) • 887 Vues
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Commentaire d’arrêt CE Section 21 juin 2013, Communauté d’agglomération du pays de Martigues
« La Section du contentieux du Conseil d’État a eu elle-même à cœur d’entériner sa mission spécifique, sans rien la défigurer ni la dépecer, s’agissant cette fois de l’étendue de ses devoirs d’information aux parties. » Bernard Pacteau, Le rapport public sauvé des eaux RFDA 2014. L’ancien commissaire du gouvernement, rapporteur public voit son rôle décrit plus précisément dans une décision du Conseil d’État en section du 21 juin 2013 Communauté d’agglomération du pays de Martigues.
En l’espèce un préfet autorise le stockage de déchets dans le quartier d’une commune. Le Comité d’intérêt de ce quartier demande l’annulation de l’autorisation d’exploitation du stockage au motif que les déchets qui doivent y être stockés ne sont pas ultimes, c’est-à-dire qu’ils sont susceptibles de faire l’objet d’une réutilisation ou d’une récupération de tout ou partie de leur contenue. C’est pour cela que le Comité d’intérêt intente un recours pour excès de pouvoir devant le tribunal administratif qui accueille sa demande et annule pour erreur manifeste d’appréciation l’arrêté. La Communauté d’agglomération (ci-après « la Communauté), défendant l’arrêté préfectoral, décide donc de porter appel contre ce jugement. Enfin, la Cour administrative d’appel l’ayant débouté de sa demande, la Communauté se pourvoit en cassation devant le Conseil d’État.
Il résulte de la décision étudiée que la Communauté fonde son pourvoi sur deux moyens. Le premier conteste la régularité de l’arrêt de la Cour administrative d’appel et le second son bien-fondé. Il est donc reproché aux juges du fond de ne pas avoir respecté le principe du contradictoire puisque les parties, ayant eu accès au sens des conclusions du rapporteur public avant le prononcé de celles-ci, n’ont les motifs qui ont poussés le rapporteur public à rejeter la requête. Le deuxième moyen porte sur la nature des déchets et la manière dont celle-ci détermine le respect ou non de la loi.
Alors, pourquoi le RP n’est-il pas tenu de donner le contenu de ses conclusions avant leur prononcé ? A quoi est-il tenu cependant à peine d’irrégularité ? Le Conseil d’Etat répond par la négative puisque dans un premier temps le rapporteur public n’est tenu de donner ses conclusions avant le prononcé de celles-ci et, dans un second temps, bien que la justification de ces décisions soient requises, ne pas les fournir ne constitue pas ne soi une cause d’irrégularité.
Comment la Cour de cassation a-t-elle défini le rôle du rapporteur public et ses modalités d’interventions au travers de ses conclusions ?
En effet, le rapporteur public détient un rôle spécifique (I), sa manière d’intervenir dans le procès représente toujours un débat auquel le Conseil d’Etat répond (II).
- Une redéfinition du rapporteur public plus précise par le Conseil d’Etat
Cette décision expose le rôle et les fonctions du rapporteur public qui peut tendre à être ambiguë. Cet arrêt permet donc au Conseil d’Etat de répondre à ces questions en réaffirmant la mission et la finalité du rapporteur public (A), tout en expliquant sa position quant au principe de contradictoire et face au délibéré (B).
- La mission et la finalité redéfinies du rapporteur public
« Le rapporteur public a pour mission d’exposer les questions que présente à juger le recours sur lequel il conclut » affirme le considérant 4 à l’occasion de la réponse faite par le Conseil d’Etat au moyen fondé sur l’irrégularité de l’arrêt de la Cour administrative d’appel. Cela fondé sur l’article 7 du Code de Justice administrative, mentionné également dans cette décision qui détermine le statut « indépendan[t] » et la mission du rapporteur public. Cette mission, reprise par les juges administratifs de l’arrêt « Gervaise » de 1957, est d’éclaircir le contentieux afin de le rendre accessible aux parties en y précisant les points juridique et factuels déterminant pour apporter une solution au litige « circonstances de fait et de l’espèce et les règles de droit ».
Ainsi, chaque partie du contentieux peut accéder aux conclusions et adapter son comportant face à celles-ci « assister à l’audience publique » ou « présenter des observations orales » et « envisager la production d’une note en délibéré ». En effet, le Conseil d’Etat réaffirme dans cet arrêt le rôle primordial du rapporteur public qui doit permettre aux parties de « saisir la réflexion [de la jurisprudence] ». On constate donc une véritable responsabilité qui est conférer à cet acteur qui se doit de rendre accessible le raisonnement du juge.
Par ailleurs, le rapporteur public est véritablement « impartial » et c’est pour cette raison que la dénomination de rapporteur public a été préféré dans le décret du 7 janvier 2009 à celle de commissaire du gouvernement puisque celui-ci à une quelconque autorité, que ce soit le gouvernement ou l’ordre juridique. Alors, cet acteur considéré par C-J Hamson comme assez jeune pour être porte-parole d’une idée nouvelle et assez mûr pour avoir appris à être prudent a le droit mais surtout le devoir de rendre des conclusions uniquement dictées par sa « conscience ».
- L’ambiguïté quant à sa position face au principe de contradictoire et à son accession en délibéré
« L’exercice de cette fonction n’est pas soumis au principe du caractère contradictoire de la procédure ». Le juge rappelle ici un principe fondamental qui est inscrit à l’article L 5 du Code de la Justice administrative, affirmant que l’instruction est régie par le principe de contradictoire et y ajoute un second principe communément admis par la jurisprudence depuis l’arrêt Esclatine du Conseil d’Etat de 1998. Celui-ci veut que le rapporteur public ne soit pas soumis au principe du contradictoire applicable à tout type de recours. Cependant, cette jurisprudence est contredite par l’arrêt France c/Kress de la CEDH de 2001 qui estime que le rapporteur public, prenant parti pour l’une des parties au procès. Ainsi, l’arrêt étudié s’affirme dans la continuité du Conseil d’Etat, il affranchit le rapporteur du principe de contradictoire. Pour cela, il utilise le verbe « soumis » qui indique que ce principe est perçu comme une véritable entrave à l’exigence d’indépendance totale et donc que forcer le rapporteur à respecter le principe de contradictoire reviendrait à le soumettre. Ainsi, le principe de contradictoire est garanti tant qu’il n’outrepasse par l’instruction.
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