Commentaire d'arrêt, Civ 2è, 10 juin 2004
Commentaire d'arrêt : Commentaire d'arrêt, Civ 2è, 10 juin 2004. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Morinos • 7 Mars 2016 • Commentaire d'arrêt • 1 539 Mots (7 Pages) • 8 882 Vues
Civ. 2ème, 10 juin 2004, Bull. civ. II, n°296.
Cet arrêt de la 2ème chambre civile de la Cour de cassation, rendu le 10 juin 2004, traite de l'appréciation par le juge de la présence d'une faute civile en matière sportive lorsque les arbitres du jeu ont quant à eux considéré qu'il n'y avait aucune faute sportive de commise.
Un joueur de polo est grièvement blessé lors d'une collision avec un joueur de l'équipe adverse à l'occasion d'un match. Les arbitres présents lors de la rencontre ont déclaré que le joueur n'avait commis aucune faute de jeu.
La femme de la victime, qui agit en qualité de représentante légale de son mari, engage un recours contre le joueur de l'équipe adverse ayant provoqué l'accident, ainsi que contre la compagnie d'assurance de ce dernier, afin de mettre en jeu la responsabilité civile du joueur en cause. Un jugement est rendu en première instance. Un appel est interjeté, ce qui conduit la Cour d'appel de Caen à rendre un arrêt le 19 février 2002 dans lequel elle condamne le joueur ayant provoqué l'accident à réparer intégralement le préjudice subi par la victime, considérant que celui-ci avait effectué un marquage brutal et dangereux contraire aux règles du jeu, de nature à engager sa responsabilité civile envers la victime. Le joueur et son assurance forment donc un pourvoi en cassation afin de faire annuler la décision rendue par la Cour d'appel de Caen.
Pour défendre leur pourvoi, les demandeurs font valoir que selon les règles officielles du polo, c'est l'arbitre qui détermine si une violation des règles du jeu est bel et bien caractérisée, et qu'il ne revenait par conséquent pas au juge de porter une appréciation différente de celle de l'arbitre. Ainsi, selon les demandeurs, si les arbitres avaient écarté toute faute de marquage, les juges civils ne peuvent retenir une faute civile de nature à engager la responsabilité du demandeur.
De plus, les demandeurs énoncent que la Cour d'appel a dénaturé sa décision en omettant le passage essentiel d'une attestation faite par un des arbitres présents lors de la rencontre concernant la faute commise, et viole ainsi l'article 1134 du Code civil.
Ainsi, la responsabilité civile d'un sportif peut-elle être engagée alors même que l'arbitre du jeu ne retient aucune faute de jeu durant un match, au regard de l'article 1382 du Code civil ?
La deuxième chambre civile de la Cour de cassation, par un arrêt rendu le 10 juin 2004, rejette le pourvoi en considérant que le principe posé par les règlements organisant la pratique d'un sport n'a pas pour effet de priver le juge civil de sa liberté d'apprécier si le comportement d'un participant a constitué une infraction aux règles du jeu de nature à engager sa responsabilité civile. Ainsi, le juge civil peut retenir l'existence d'une faute même en l'absence de faute sportive reconnue par l’arbitre du jeu. De plus, la Cour retient que le moyen formé sur la dénaturation de la décision de la Cour d'appel ne peut être recevable, puisqu'il ne vise qu'à remettre en cause l'appréciation souveraine des juges du fond devant la Cour de cassation de la réelle valeur que peut avoir une attestation rédigée par un arbitre.
Cet arrêt nous amène à nous interroger sur la place qu'occupe l'arbitre sportif, et surtout sur la valeur de ses décision en matière de responsabilité civile (I) pour comprendre la liberté d'appréciation détenue par le juge de la faute en matière sportive (II)
I) La valeur des décisions de l'arbitre en matière de responsabilité civile
L'arbitre tient une place clé en matière sportive, étant le « juge sportif ». Cependant, son jugement ne peut pas primer sur celui des juges lorsqu'une l'existence éventuelle d'une faute de nature à engager la responsabilité doit être décelée (A). Il existe en effet un fossé plus qu'évident entre la faute sportive et la faute civile (B).
A) L'impossible supériorité de l'arbitre en matière d'appréciation de la faute
Dans cet arrêt, le demandeur fonde l'une des branches de son moyen sur le fait que l'arbitre a fait une attestation confirmant en détails pourquoi il y aurait absence de faute du joueur mis en cause, et qu'il n'a été retenu par les juges du fond qu'un seul passage selon lequel l'arbitre mentionne la fatigue du cheval pour expliquer l'accident. Cependant, ce raisonnement n'est clairement pas suffisant pour expliquer l'existence d'un dommage et évincer toute faute de nature à engager la responsabilité civil de l'auteur du dommage. S'il y a eu une collision, rien ne prouve que le cheval en cause ne serait pas également tombé s'il avait été en pleine forme. De ce fait, la Cour d'appel a totalement discrédité l'attestation
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