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Cas pratique droit

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Par   •  2 Mars 2019  •  Étude de cas  •  2 445 Mots (10 Pages)  •  639 Vues

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Droit des obligations – cas pratique

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Première consultation : (rupture abusive des pourparlers)

Un investisseur souhaite acheter des actions d’une entreprise. Les deux parties entament des pourparlers aux fins d’aboutir à un accord qui se conclura par la conclusion d’un contrat de vente (10 mois). Or, l’entreprise décide au dernier moment de rompre les négociations pour signer un contrat de vente avec un concurrent. L’investisseur estime qu’il y a caractère abusive car les pourparlers étaient suffisamment avancés, et que la procédure a engendrée du temps passé et des frais d’avocat spécialisé.

L’investisseur apprend que les actions ont été vendues à une tierce personne. La question qui se pose est donc celle de savoir si celui qui a rompu les relations qu’il entretenait avec un éventuel futur contractant peut-être tenu d’indemniser le préjudice subi par ce dernier du fait de la rupture de ces relations.

S’agissant premièrement de la qualification des relations entretenues entre les deux parties. Aux termes de l’article 1113 du Code civil, le contrat est formé par la rencontre d’une offre et d’une acceptation par lesquelles les parties manifestent leur volonté de s’engager. Pour qu’il y ait contrat, les parties doivent donc avoir fait connaître leur consentement à cet accord dans les conditions qu’ils ont déterminées.

En l’espèce, il apparait que l’investisseur et la société Y étaient presque parvenus à un accord. Leur volonté de s’engager définitivement ne s’était donc pas encore manifestée de manière ferme, les représentants de la société indiquant d’ailleurs qu’il nécessitait de l’accord de leur supérieur hiérarchique. Aucun contrat n’a donc été conclu entre eux. En outre, aucun autre accord de volonté n’existait entre les parties, ni avant-contrat, ni contrat de négociation. On peut ainsi en déduire que les relations entre l’investisseur et la société étaient de simples négociations.

Il faut dès lors se demander si la partie qui a engagé les négociations pour finalement les rompre peut engager sa responsabilité civile.

Aux termes de l’article 1112 alinéa 1 du Code civil, l’initiative, le déroulement et la rupture des négociations contractuelles sont libres. Cette disposition prévoit toutefois un tempérament à ce principe en imposant que ces négociations satisfassent à une exigence de bonne foi. Le texte ne précise pas ce que pourrait être un comportement de mauvaise foi. On peut toutefois, pour le déterminer, se référer à la jurisprudence antérieure à la réforme qui devrait sans doute se maintenir sous l’empire des nouveaux textes. Ainsi, s’agissant de la rupture des négociations, la jurisprudence considère qu’il y a déloyauté non seulement lorsque l’auteur de la rupture est animé par une intention de nuire, mais aussi lorsqu’il a agi avec une légèreté blâmable au cours des négociations (Com. 11 juillet 2000). Cette solution, rendue en matière de rupture, peut certainement être étendue à la question de l’ouverture et du déroulé des négociations. (L’arrêt Manoukian illustre cette situation dans laquelle le contractant a laissé paraître qu’il était sur le point de conclure le contrat, a brutalement interrompu le contrat).

Pour déterminer s’il y a eu légèreté blâmable, la jurisprudence tient compte principalement de l’existence de pourparlers suffisamment avancés pour faire croire légitimement à une partie que l’autre est sur le point de conclure (Com., 22 avril 1997 ou Civ. 1re, 6 janvier 1998). À l’inverse, la faute est écartée lorsque la rupture est survenue à un moment où les parties en étaient encore à évaluer les risques et les chances du contrat envisagé (Com., 12 janvier 1999). Plus précisément, la jurisprudence admet que lorsque les discussions ne sont encore qu’à l’état d’ébauche, l’un des partenaires peut y mettre fin sans avoir à justifier d’un motif légitime de rupture (Com., 20 juin 2000). En revanche, lorsque la négociation est plus avancée, l’auteur de la rupture doit justifier d’un motif légitime de rupture pour que celle-ci ne soit pas considérée comme fautive (Com. 11 juillet 2000 ; Civ. 3e, 30 novembre 2017).

En l’espèce, il ressort des faits que l’investisseur et les représentants de la société étaient en négociations depuis plusieurs mois et qu’ils étaient presque parvenus à un accord. Les représentants ont même indiqué qu’il ne manquait plus que l’accord de leur supérieur hiérarchique pour pouvoir signer le contrat de vente et qu’ils reviendraient alors vers l’investisseur. Cette information indique donc que le contrat était prêt à être conclu et qu’il manquait uniquement l’accord définitif du supérieur.

Par conséquent, il est évident que les pourparlers étaient suffisamment avancés et que l’investisseur pouvait légitimement croire que la société était sur le point de conclure, après toutes ces négociations.

De plus, les faits indiquent que la société a finalement vendu ses actions à un tiers. Il n’a de doute que la société a agi avec mauvaise foi. L’investisseur pourra donc engager la responsabilité extra contractuelle de la société.

Pour que cette responsabilité soit engagée sur le fondement de l’article 1240 du Code civil, encore faut-il qu’un préjudice soit caractérisé et qu’il soit réparable. A ce titre, l’article 1112 alinéa 2 dispose qu’en cas de faute commise dans les négociations, la réparation du préjudice qui en résulte ne peut avoir pour objet de compenser la perte des avantages attendus du contrat non conclu. La loi de ratification du 20 avril 2018 a complété cette disposition en ajoutant que ne peut être davantage indemnisé la perte de chance d’obtenir ces avantages. Cette modification ayant, selon l’article 16, I, alinéa 3 de la loi, un caractère interprétatif, elle est d’ores et déjà applicable aux négociations engagées après le 1er octobre 2016. Autrement dit, conformément à la jurisprudence antérieure (Com. 26 novembre 2003 ; Civ. 3e, 28 juin 2006 ; Com. 18 septembre 2012), seules les pertes subies, c’est-à-dire les frais engagés en vue de la conclusion du contrat projeté, peuvent donner lieu à l’allocation de dommages et intérêtts. A l’inverse, le gain manqué et la perte de chance ne l’obtenir ne peuvent faire l’objet d’une indemnisation.

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