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Arrêt 11 septembre 1992

Commentaire d'arrêt : Arrêt 11 septembre 1992. Recherche parmi 300 000+ dissertations

Par   •  17 Novembre 2018  •  Commentaire d'arrêt  •  1 781 Mots (8 Pages)  •  707 Vues

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        Le syndrome du transsexualisme, ou syndrome de Benjamin, a été défini en 1982 par le professeur Küss comme « le sentiment profond inébranlable d'appartenir au sexe opposé », s'accompagnant d'un « besoin intense et constant de changer de sexe ».

        L'arrêt rendu par l'assemblée plénière le 11 décembre 1992 s'inscrit dans le cadre juridique d'une demande de changement de sexe pour transsexualisme

        Un homme, enregistré donc comme étant de sexe masculin sur les registres de l’État civil, se considère cependant comme une fille depuis son enfance. A 20 ans, il décide de prendre un traitement hormonal, et à 30 ans il décide d'avoir recours à l'ablation de ses organes génitaux externes masculins, et de se faire créer un néo-vagin.

        Suite à cette opération, il saisi le tribunal de grande instance afin de faire modifier la mention de son sexe en féminin sur les registres de l’État civil, et pour changer son prénom. Le tribunal autorise son changement de prénom mais le déboute quant à la modification de son sexe. Il interjette alors appel devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence qui rend un arrêt confirmatif au précédent jugement le 15 novembre 1990. Il se pourvoit alors en cassation. L'affaire finit devant l'Assemblée Plénière.

La cour d'appel l'a débouté quant à sa demande de changement de sexe au motif que sa conviction d'appartenir au sexe féminin et le fait qu'il se comporte comme une femme ne suffisait pas pour reconnaître qu'il était désormais une femme. Elle a ajouté que le prince d'indisponibilité de l'état des personnes s'opposait au fait que les opérations qu'il avait subies dans le but de se féminiser soient prises en compte.         

        La question posée à l'assemblée plénière est ici double : en cas de transsexualisme, le droit à la vie privée justifie-t-il un changement sexe, et le principe de l'indisponibilité de l'état des personnes peut-il faire obstacle à cette modification de l’État civil?

        Une personne ayant eu recours à une opération pour que son apparence ressemble plus à celle du sexe opposée, auquel elle s'identifie, peut obtenir la modification de la mention de son sexe sur le registre de l’État civil. Cette modification est notamment justifiée par le respect dû à la vie privée régit par l'article 9 du code civil et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et le principe de l'indisponibilité de l'état des personnes ne fait en aucun cas obstacle à ce changement. Par conséquent, l'assemblée plénière casse et annule l'arrêt rendu en cour d'appel, et effectue le changement de sexe du demandeur.

        Dans un premier temps, il sera vu l'importance de l'adéquation entre mental et physique (I) avant d'étudier l'assouplissement des conditions de changement de sexe (II)

I – L'importance de l'adéquation entre mental et physique

        Dans cette partie, il sera d'abord vu le syndrome du transsexualisme (A) avant de s'intéresser au fait qu'un changement de sexe a été autorisé (B)

A) Le syndrome du transsexualisme

Le sexe se compose de deux éléments. Un élément objectif, comportant le sexe anatomique et chromosomique, et un élément subjectif, comportant le sexe psychologique. Normalement, ces deux données concordent, mais il arrive qu'elles diffèrent. Dans le cas de la transsexualité, c'est la donnée psychologique qui n'est pas en adéquation avec les autres. Le transsexualisme est une une pathologie reconnue par l'OMS où la personne ressent son appartenance sexuelle différemment de ce qu’exprime son génotype et son anatomie. Il en résulte une croyance invincible d'appartenance au sexe opposée, de même qu'un besoin de changement de sexe qui se caractérise souvent par des transformations physiques. Dans l'arrêt du 11 septembre 1992, un homme atteint de ce syndrome a entamé un traitement hormonal ainsi que diverses opérations afin de se féminiser, et afin que son apparence coïncide avec la croyance de son appartenance au sexe féminin. Il a ensuite saisi la justice, afin que son sexe psychologique, génétique et anatomique, désormais féminin, soit en accord avec son sexe judiciaire, qui demeure masculin. Si il a été débouté plusieurs fois, notamment car les demandes de changement de sexe n'étaient pas acceptées auparavant, il a finalement obtenu gain de cause et son acte d'état civil a pu être modifié en conséquence. En effet, avant cet arrêt de 1992 autorisant finalement le changement de sexe, celui-ci n'était pas possible. Aucune disposition légale ne venait préciser si le changement de sexe pour transsexualisme pouvait être autorisé. De ce fait, les juges se basait sur le principe de l'indisponibilité de l'état des personnes pour le refuser. Le 16 décembre 1975, la cour de cassation avait énoncé que « le principe de l’indisponibilité de l’état des personnes, au respect duquel l’ordre public est intéressé, interdit de prendre en considération les transformations corporelles ainsi obtenues ». De cet arrêt il résulte que le droit positif prend désormais en compte les situations de transsexualisme en autorisant ce changement de sexe.

B) Le changement de sexe finalement autorisé

Ainsi, l'arrêt du 11 décembre 1992 est un revirement de jurisprudence qui vient changer les règles en matière de changement de sexe. Cet arrêt estime donc que lorsqu'une personne a pris l'apparence et le comportement du sexe opposé, il en va du respect de sa vie privée de l'autoriser à modifier la mention de son sexe sur son État civil, afin que son sexe concorde avec son apparence et ses convictions. En effet, sans la concordance du sexe juridique avec les autres données sexuelles, l'individu se retrouve dans certaines situations dans l'obligation de dévoiler des informations personnelles voire intimes, ce qui porterait atteinte à sa vie privée. L'Assemblée Plénière ajoute que le principe de l'indisponibilité de l'état des personnes ne fait pas obstacle à la modification du sexe sur l'acte d’État civil. En effet, si une personne peut disposer par exemple de biens, elle ne dispose pas de son état. Cependant ce principe, qui avant le revirement était un obstacle au changement de sexe, n'en est désormais plus un. Dans cette affaire, l'Assemblée Plénière finit par invoquer l'article 627 du nouveau Code de procédure civile afin d'appliquer elle-même cette nouvelle règle, en effectuant le changement de sexe du demandeur. D'un point de vue moral, cette décision est une belle avancée. Elle prend enfin réellement en compte la détresse dans laquelle peut se trouver un transsexuel en apportant plus de justice et de compréhension pour gérer la situation de ces personnes. Désormais elles n'auront plus à rester coincées avec une identité judiciaire incompatible avec le reste de leur vie. Cependant, cette nouvelle prise en compte de la situation des personnes transsexuelles menant à la possibilité du changement de sexe en France ne s'est pas faite sans aide.

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