La recherche du bonheur est-elle compatible avec le souci d'autrui ?
Dissertation : La recherche du bonheur est-elle compatible avec le souci d'autrui ?. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar TheoG • 27 Septembre 2015 • Dissertation • 2 498 Mots (10 Pages) • 3 284 Vues
Dissertation
Préalablement à toute réflexion philosophique, la vie peut sembler être faite d’une succession de bonheurs et de malheurs, ou bien certains peuvent mener une vie heureuse et d’autres une vie malheureuse et selon le proverbe, « le malheur des uns fait le bonheur des autres. ». Le bonheur semble être une question de chance « être né sous une bonne étoile », rencontrer les bonnes personnes, voir la vie nous offrir ou non des occasions, des chances. Telle est d’ailleurs l’étymologie du mot bonheur, il signifie l’heureuse chance, la réussite et la bonne fortune, mais aussi un état de conscience pleinement satisfait, une paix intérieure.
Le problème se pose de savoir si la recherche du bonheur est compatible avec le souci d'autrui ?
Pour répondre à cette question, nous réfléchirons premièrement en quoi consiste le bonheur, puis dans un deuxième temps, nous discernerons que la recherche du bonheur peut être considérée comme un but personnel et égoïste pour montrer enfin que notre bonheur dépend de celui des autres, en d'autres termes qu'on ne peut être heureux tout seuls. Enfin, nous conclurons par quelques mots de synthèse.
Malgré leurs divergences de théories, les philosophes s'accordent à dire que la recherche du bonheur porte un caractère universel, qui en fait le but commun à tout homme. Aristote, premier philosophe à avoir pointé le caractère universel du bonheur, nous explique que le bonheur « c'est d'abord cette fin à quoi chacun aspire, un but universel et ce qui anime toute les actions humaines.», ce que Pascal confirme dans ses ‘Pensées’, en écrivant: « tous les hommes recherchent d’être heureux ».
Par définition, le bonheur est un état de la conscience pleinement satisfait, une situation de plaisir absolu ou de confort total. Le bonheur est un accord entre les aspirations humaines et l'ordre des choses ; quand le bonheur est parfait, on parle de "béatitude". Il est durable et se distingue du plaisir qui lui est éphémère.
Le plaisir est un bien-être agréable, instantané, essentiellement d'ordre sensible qui résulte principalement de la satisfaction d'un désir. Trouver la voie qui mène au bonheur est précisément l'objet de la philosophie épicurienne ou stoïcienne.
Au XVIIIème siècle, l'Encyclopédie s'inspirera de la vision d’Épicure pour la définition du bonheur: « Un état tranquille semé ici et là de quelques plaisirs qui en égayent le fond ». Epicure distingue trois types de plaisirs : il nous parle des plaisirs naturels et nécessaires (boire, manger et dormir), qui sont les meilleurs et selon lui, le sage ne doit pas hésiter à s'y adonner. Il évoque les plaisirs naturels et non nécessaires (manger au delà du besoin, le désir sexuel,...) car, bien qu'ils ne soient pas mauvais en soi, le sage doit tout de même s'en méfier et n'en user qu'avec modération. Et pour finir il aborde les plaisirs non naturels et non nécessaires (l'ambition, la richesse, la soif de domination,...), qui sont absolument à éviter car ils ne sont qu’artificiels, insatiables et porteurs de troubles. Le plaisir n’est autre que de la distraction et de l’amusement.
Tous les hommes recherchent spontanément le plaisir et fuient le malheur. Le bonheur peut échapper à l'homme en raison de ses soucis et ses angoisses, mais satisfaire le désir naturel et nécessaire lui procure l’apaisement des tensions, pour une existence sans trouble. En effet, le désir est au fond un trouble de l’âme et le bonheur repose sur le calcul des désirs. La tentation est un trouble de l’âme. Dès les premiers chapitres de la BIBLE, dans la Genèse, nous découvrons Ève confrontée à la tentation des plaisirs des sens, des yeux et intellectuel, alors qu’elle et son mari avaient tout ce qu’il fallait pour être heureux.
Selon l’eudémonisme d’Epicure, le bonheur repose sur la recherche du plaisir, mais pour la morale stoïcienne, le bonheur repose en fait sur le mépris des plaisirs et sur une distinction fondamentale : ce qui dépend de nous (nos opinions, désirs, représentations) et ce qui n'en dépend pas (ce qui appartient au Destin).
Nombre de philosophes modernes critiquèrent la recherche du bonheur comme illusoire et vouée à l'échec. Kant s'interroge sur la manière d'être heureux :
- Par la richesse ? « Que de soucis, d'envies, que de pièges ! ».
En effet, de nos jours beaucoup recherche le bonheur dans l’argent, mais bien peu sage l’homme qui fait dépendre son bonheur de sa fortune, ces proverbes : « l’argent ne fait pas le bonheur ! » et « L’homme heureux n’a pas de chemise » le confirment. La fable de la Fontaine « Le savetier et le financier » nous montre un cordonnier heureux du peu qu’il gagne, tandis que son voisin le financier perd le sommeil à cause de sa fortune et envie la joie de vivre de son voisin savetier.
- Par davantage de connaissances ? Mais est-ce mieux de voir les maux qui nous entourent ?
En effet, le bonheur de l’enfant n’est-il pas dans l’ignorance ou dans l’innocence ?
- Par une vie plus longue ? Mais qui dit qu'une vie plus longue n'est pas une souffrance plus longue?
Le philosophe Boèce explique, dans sa célèbre œuvre néoplatonicienne ‘Consolation de la philosophie’, que la poursuite de la sagesse et l'amour de Dieu sont les véritables sources du bonheur. En effet pour tout croyant, le vrai bonheur est l’amour de Dieu pour lui. Le roi Salomon écrit dans les Proverbes : « Heureux celui qui met sa confiance en l’Eternel ! ».
Il est vrai que la recherche du bonheur peut être considérée comme un but personnel et égoïste, puisque en effet, tous les hommes désirent les mêmes choses, ce qui les mettrait donc dans des positions rivales les uns par rapport aux autres. L'homme serait heureux, en parvenant à avoir ce qu'il désire, au détriment de l'autre, ce qui rendrait sa recherche égoïste. Les hommes seraient donc dans une sorte de « lutte » chacun en concurrence avec l'autre, acharnés à construire leur propre bonheur sans se soucier des autres, ni de ce que pourrait être l'impact de ses actions sur eux.
L'égoïsme fait partie de ce que l'on appelle communément un "défaut", autrement dit un problème dans la manière de se comporter. Le plus souvent, on attribue l'égoïsme à un amour exagéré pour soi-même, un amour tel qu'il n'y aurait pas de place pour qui que ce soit d'autre.
Pour La Rochefoucauld (moraliste du XVIIème siècle, auteur des Maximes), l'amour de soi est au fondement de toutes nos actions, y compris les plus "désintéressées". Nous serions donc nécessairement "égoïstes". Pour l'égoïste, selon Edgar Poe, "Le grand malheur est de ne pouvoir être seul". L'égoïste est essentiellement préoccupé de lui-même ; ses choix, ses activités, ses relations convergent vers un même but : ramener tout à soi, s'approprier ce qui lui semble plaisant ; il ne tient compte ni du monde, ni des intérêts extérieurs, ne se soucie pas des autres et organise sa vie pour ne pas être dérangé. S'il entre en relation avec certaines personnes, c'est qu'il pense pouvoir en tirer quelque chose : du prestige, des avantages, du plaisir…
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