La philosophie peut-elle remplacer la religion ?

La philosophie peut-elle remplacer la religion ?

Dans la cité grecque, Socrate fut condamné à boire la Ciguë, à cause de l’impiété et la volonté d’introduire des nouveaux dieux rationnels dans la cité en étaient les raisons. C’est principalement la deuxième raison qui va ici nous intéresser. En effet, dès le 5ème siècle et la cité athénienne, cette volonté d’intégrer des dieux rationnels témoigne de faire intervenir la philosophie, basé sur l’usage de la raison, dans la cité.

On a suffisamment remarqué que la religion et la philosophie peuvent être rapprochées, notamment par les questions communes qu’elles se posent : celles de la place de l’homme dans la nature, du bien et du mal, et d’autres encore. La philosophie est l’ensemble des questions que l'être humain peut se poser sur lui-même et l’examen des réponses qu'il peut y apporter afin de posséder une vision systématique et générale du monde. La religion au contraire de la philosophie, ne va pas rechercher principalement la recherche de justifications. En effet, ces justifications sont toujours développées a posteriori, et bien souvent dans un but plus didactique que véritablement religieux, et en conséquence, elles sont au bout du compte facultatives, au sens où leur absence n’affaiblirait pas la religion en elle-même. Finalement, elles sont inutiles pour l’authentique croyant dont la foi n’a nul besoin d’explication. En outre, quelques théologiens ont “emprunté” aux philosophes certains de leurs concepts et de leurs formes de raisonnement, comme saint Thomas d’Aquin à Aristote. La réciproque existe également, par exemple dans le concept philosophique de Dieu.

Ce sont là quelques-unes des raisons de se demander si la philosophie peut prendre la place de la religion. Ainsi, la philosophie peut-elle, dans un sens, remplacer la religion ou bien sont-elles deux notions discernables que l’on peut simplement rapprocher par des exemples concrets.

Nous verrons d’abord que la philosophie peut à première vue remplacer la religion. Mais dans un deuxième temps nous étudierons que religion et philosophie, sont deux notions distinctes ce qui implique que la religion ne puisse pas être remplacé par la philosophie. Pourtant, nous finirons par montrer que c’est déjà en partie le cas par l’intermédiaire de la mise en place de la religion naturelle conciliant raison et valeurs religieuses.

1. La philosophie peut, à première vue, remplacer la religion.

1. La philosophie se base comme la religion sur la morale

Si la religion est le rapport établi entre l’homme et l’univers, et qui détermine le sens de sa vie, la morale est ce qui montre et éclaire l’activité de l’homme, et qui découle naturellement de tel ou tel rapport respectif de l’homme et de l’univers. De la première conception découlent les morales communes à toutes les religions païennes, lesquelles ont pour but l’effort vers le bien de l’individu, et qui, par conséquent, déterminent toutes les conditions propres à procurer le maximum de bien possible et indiquent les moyens de l’acquérir. De cette conception découlent la morale d’Épicure sous son expression la plus basse. La philosophie alors, au même titre que la religion semble pouvoir se substituer à la religion car le but ultime de la philosophie est également de trouver le bonheur, durable et continu.

1.  La philosophie permet de dissiper l'illusion religieuse (Epicure).

La philosophie permet souvent de sortir de la caverne de l’ignorance et on peut alors accéder à de vraies connaissances, au monde intelligible, le monde des Idées de Platon, on atteint des vérités qui ne peuvent être contredites. La croyance religieuse n’est que l’affaire de la croyance et ainsi la fiction de l'existence de Dieu n'est pas une illusion, dès lors que l’on n'en fait pas une vérité objective pour nous et les autres. Or, c’est important car si l’homme a été́ doté d’intelligence, c’est pour s’en servir et c’est ce qui lui permet de se placer au sommet du règne animal. En effet, dans le Mythe de Prométhée, ce dernier a donné́ l’intelligence seulement aux hommes, après un oubli de son frère Épiméthée.

1.  L'évolution de l'humanité est celle du progrès de la raison.

Le contact avec la religion se fait bien avant d’être en mesure de philosopher, ce qui explique que la place que prend la religion soit importante. Il est vrai que certains ont su se dégager de l’influence de l’éducation religieuse qu’ils ont reçue. Par le progrès de la raison, l’homme est devenu à même de savoir ce qui lui semble vrai ou faux et de prouver cette hypothèse. Cela amène à penser que la philosophie peut prendre la place de la religion dans le sens où l’homme va être soumis à une réelle remise en question de la religion à la suite de l’usage de sa raison.

Il a été montré que la philosophie peut se substituer à la religion mais pourtant en réalité cela semble réellement compromis car ce sont deux notions distinctes. Quelles sont les raisons qui empêche cette substitution ?

1. Pourtant la religion ne peut être remplacé par la philosophie car ce sont tout de même deux notions bien distinctes.

1. La philosophie science explique le comment et non le pourquoi des choses.

Même si une philosophie parvenait à justifier philosophiquement tous les dogmes voire toutes les pratiques d’une religion donnée, cette philosophie n’aurait qu’une conformité extérieure et même fortuite avec cette religion, puisque la seule justification véritable d’une religion est la révélation et que celle-ci est, par définition, hors de portée de toute justification philosophique. Autrement dit, une telle philosophie ne serait pas vraiment religieuse. La philosophie est alors à visée justificative, c’est-à-dire justifiant l’existence des religions, mais n’est pas en mesure d’expliquer comment les religions sont apparus.

1. L’impuissance de la raison

Aucun raisonnement religieux n’a jamais convaincu personne. C’est selon Kierkegaard, parce que la raison n’a pas sa part dans la religion. La religion correspond selon lui, à plonger dans l’absurde, dans le paradoxe absolu. Il la qualifie de scandale irréductible à toute attitude humaine, comme l’illustre le sacrifice par Abraham de son fils Isaac pour la seule raison que Dieu lui a demandé. Cela témoigne de la véritable distinction de la notion entre la philosophie et la religion : l’une d’elle se base sur des valeurs rationnelles et sur des justifications précises alors que l’autre ne se base uniquement que sur une part d’irréel, d’inconnu et donc sur la croyance. Les religions classiques sont basées, selon Émile Durkheim dans les Forces élémentaires de la vie religieuse, sur une communauté, une distinction entre l’espace du sacré et celui du profane mais surtout sur un ensemble de croyances, de dogmes et de pratiques. Les religions permettent donc de réunir les hommes autour d’un culte avec des rites, des cérémonies parfois sans quelconque usage de la raison. Cela fait que la religion permet aux hommes de se rassembler, de créer un lien social.

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