Origines et enjeux de la philosophie négro-pharaonique
Analyse sectorielle : Origines et enjeux de la philosophie négro-pharaonique. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar vyak • 7 Janvier 2014 • Analyse sectorielle • 9 025 Mots (37 Pages) • 1 087 Vues
NAISSANCE DE LA PHILOSOPHIE ET RENAISSANCE AFRICAINE
(Origines et enjeux de la philosophie négro-pharaonique)
Nsame Mbongo, Philosophe et sociologue
Docteur d’Etat, Université de Douala
BP. 12952 Douala. Tel. 347 04 01, 9791573
Email : nsambongo@yahoo.fr
RESUME
La philosophie, en tant que pensée sociale, est le lieu de problèmes fondamentaux qui engagent le
destin historique des peuples et la responsabilité politique des Etats. Bien que déclarée souvent non
philosophique, la pensée africaine n’échappe pas à la règle. Mais que faut-il entendre précisément
par philosophie dans un continent où les mythologies, les mentalités et même les devinettes passent
pour philosophiques aux yeux de certains ? Il importe d’établir clairement qu’en philosophie, la
raison fréquente le mythe tout en l’évitant. Dès lors, il apparaîtra que la naissance de cette activité
intellectuelle et existentielle est à mettre en rapport avec l’antiquité africaine. Pourtant, les
vicissitudes de l’histoire ont plutôt fait triompher le « miracle grec ». Il n’en reste pas moins que
l’Afrique a de bonnes raisons de revendiquer l’héritage philosophique pharaonique en vue de sa
Renaissance globale.
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Introduction
La question de la naissance et de la renaissance de la philosophie met face à face
l’Afrique et l’Europe depuis le XIXe siècle. Des esprits profonds tels l’ancien esclave africain
américain Frederick Douglass (1817-1895), le Libérien d’origine antillaise Edward Blyden
(1832-1912), ministre du culte, ministre plénipotentiaire, professeur d’université, intellectuel
éclectique maîtrisant le grec, le latin, l’hébreu, etc., et le Sierra Leonais James Africanus
Horton (1835-1883), médecin, officier de l’armée britannique, chercheur naturaliste et
penseur, sont parmi les théoriciens les plus en vue qui défendent la thèse d’une Egypte
pharaonique négro-africaine mère des sciences, des arts et de la philosophie.
En Europe pendant ce temps, Hegel (1770-1831) et Gobineau (1816-1882) classent les
Noirs entre les hommes et les animaux. Et, la thèse du « miracle grec », lancée entre autres
par des penseurs révolutionnaires du XVIIIe siècle, à la recherche d’un modèle démocratique
ancien, affronte les idées des rares voyageurs et spécialistes qui évoquent le caractère nègre de
l’Egypte antique. L’écrivain Volney (1757-1820) fait partie de ces derniers.
Au XXe siècle, le débat rebondit après le black-out colonial. Cheikh Anta Diop (1923-
1986) consacre la quasi-totalité de son immense oeuvre à la démonstration de l’africanité de la
civilisation pharaonique et de la dimension universelle de son génie intellectuel. Toute une
école de pensée lui emboîte le pas en Afrique, en Europe et aux Amériques. Et Aujourd’hui,
Théophile Obenga, son plus illustre successeur, doit croiser le fer avec des « africanistes
eurocentristes » déterminés à détruire la réputation scientifique des égyptologues de
l’afrocentricité dits « afrocentristes ».
S’il ne revient pas à l’histoire de la philosophie d’établir que l’Egypte antique était
négro-africaine au plan racial, son rôle est essentiel pour traiter des origines pharaoniques et
africaines de la philosophie, et en dégager les enjeux majeurs. Nous partirons de la conception
hégélienne de la philosophie, en tant qu’elle fait autorité mais aussi en tant qu’elle constitue
un obstacle épistémologique à surmonter pour rétablir l’Afrique dans ses droits culturels.
Notre approche des luttes théoriques liées à la naissance de la philosophie éloigne par ailleurs
son africanité de bien des interprétations obscurantistes qui l’encombrent aujourd’hui.
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1. De l’origine de la philosophie
1. 1 L’origine grecque de la philosophie selon Hegel
Voici l’acte de naissance et la carte d’identité nationale de la philosophie, dressés par
Hegel : « L’apparition de la philosophie exige la conscience de la liberté, il s’ensuit que la
philosophie réclame un peuple dont l’existence se fonde sur ce principe ; nous demandions
dans ce but que la pensée soit auprès d’elle-même, c’est-à-dire que l’esprit se sépare de
l’élément naturel, qu’il ne soit plus plongé dans la matière, dans l’intuition, dans le vouloir
qui est nature. La forme qui précède ce degré est l’unité de l’esprit et de la nature. Cette unité,
étant primitive, et au début, n’est pas la véritable. Ils se trompent tous ceux qui considèrent
l’unité de l’esprit et de la nature comme la meilleure attitude de la conscience. Ce degré est
plutôt le plus bas, le moins vrai, il n’est pas produit par l’esprit lui-même. C’est d’une manière
générale la position de l’Orient.
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