Hegel et la démocratie libérale
Dissertation : Hegel et la démocratie libérale. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar BalayetteKosmik • 10 Avril 2017 • Dissertation • 3 264 Mots (14 Pages) • 1 423 Vues
Hegel et la démocratie libérale
« Il faut donc vénérer l'État comme un être divin-terrestre ». Cette phrase, tirée du livre de Hegel Principes de la philosophie du droit, publié en 1821, montre bien sa pensée sur l’Etat, qui le rend populairement perçu comme ennemi de la démocratie, notamment à travers la schématisation de son système politique, dans lequel l’individu n’a qu’un rôle quasi inexistant comparé à celui de l’Etat.
Hegel est un philosophe allemand né en 1770 à Stuttgart, et mort en 1831 à Berlin. Il a étudié la théologie, a été influencé par les écrits des philosophes des Lumières au début de ses études. Il publia deux œuvres majeures à savoir La Phénoménologie de l'Esprit, publié en 1807, Les Principes de la philosophie du droit, publié en 1821. Dans ce dernier ouvrage, traitant de philosophie politique, il fait part de sa conception de l’État, le État hégélien, qui est l’aboutissement d’une conception d’un Etat visant à l’universel. Dans ces œuvres, Hegel partage plusieurs thèses et principes importants, notamment celui de la dialectique. Une dialectique est un raisonnement qui permet de mettre en évidence des contradictions et de les dépasser, et ce à travers trois étapes : négation, conservation, dépassement, et qui est associée au syllogisme avec thèse-antithèse-synthèse. Pour Platon, la dialectique est un moyen d'élévation de l'âme, tandis que pour Hegel elle constitue un moyen de réflexion permettant la réalisation de l'Esprit. Une des dialectiques connues de Hegel est celle du maître et du serviteur.
Hegel a suscité de vives critiques, certains voyant Hegel comme un penseur du totalitarisme. Cette vision d’Hegel est renforcée par sa proximité avec le pouvoir prussien, un pouvoir autoritaire au XIXème, ce qui l’aurait conduit à une certaine partialité, et de justifier le pouvoir prussien à travers sa philosophie. Cette potentielle justification du pouvoir autoritaire prussien tendrait à faire d’Hegel un philosophe inclassable du XIXème, siècle du libéralisme politique. Ce libéralisme politique est aujourd'hui prépondérant dans les régimes politiques contemporains et notamment dans les démocraties. Ces démocraties peuvent être qualifiées de démocraties libérales.
Une démocratie libérale est une démocratie fondée sur le libéralisme économique et le libéralisme politique. Ce régime accorde une large place aux particularités individuelles, protège les individus et laisse la possibilité à chacun de participer à la vie politique. C'est pourquoi aujourd'hui les démocraties dites libérales sont généralement des démocraties représentatives, afin que chacun puisse être représenté et voir ses intérêts défendus. Les fondateurs du libéralisme politique sont nombreux. Un des premiers théoriciens du libéralisme politique est John Locke. Selon lui, il existe des droits naturels et propres à chaque individu, que la séparation des pouvoirs doit garantir et protéger. Le libéralisme économique est une doctrine selon laquelle l’État ne doit pas intervenir dans l'économie, mais plutôt laisser libre court aux initiatives individuelles, et aux mécanismes de marché. Afin de mieux saisir ce qu'est la démocratie libérale, je souhaiterais revenir sur un article de Jurgen Habermas intitulé « Trois versions de la démocratie libérale ».
Pour Habermas la démocratie libérale est une forme d'organisation du pouvoir politique, donnant à tous des chances égales de participer à la formation de la volonté politique, donc de la volonté générale. La démocratie libérale accorde des droits politiques à chacun par ailleurs. Habermas précise que ces droits sont répartis égalitairement, et ont la même valeur pour tous les citoyens. L’État s'appuie alors sur des formes de droits dites modernes, soit un droit positif, « structuré autour de l'individu », afin d'assurer simultanément l'autonomie des sphères publiques et privées. Il doit ainsi permettre la participation de tous les citoyens et la protection de la sphère privée. Pour Habermas il existe trois caractéristiques majeures et atemporelles de la démocratie libérale :
- Autonomie politique des citoyens par des droits assurant l'égalité, la possibilité d'association et de communication entre les citoyens, élections, et concurrence entre partis
- Autonomie privée des individus donc systèmes de libertés, une protection juridique par tribunaux indépendants et séparation des pouvoirs pour que administration respecte loi et droit.
- L’Espace public comme médiation entre État et société civile par séparation État et société, économie étant régulée par le marché, liberté presse, pluralisme médias.
Dès lors, il apparait un conflit entre ce qui est pensé d’Hegel, ce dont certains penseurs l’accusent et la conception de la démocratie libérale. Tandis que l’un serait à la source des dictatures du XXème responsable de la Seconde Guerre mondiale, l’autre se porte garant des droits naturels, des libertés individuelles, et se revendique héritière du siècle des Lumières.
Ainsi, il convient de s’interroger : l’Etat Hégélien est-il en contradiction avec la démocratie libérale ?
Tout d’abord, nous verrons les différentes caractéristiques de base de l’Etat hégélien, avant d’expliquer en quoi Hegel et son Etat peuvent être vus comme libéraux. Enfin, nous expliquerons en quoi l’Etat hégélien est finalement éloigné du modèle de la démocratie libérale.
- L’Etat hégélien, l’avènement de l’Esprit dans la société
- L’Etat
Pour Hegel, l’Idée de « l’Etat moderne » se définit bien plus qu’un simple pouvoir politique, mais comme l’aboutissement de l’évolution humaine. L’Etat est l’incarnation de l’Esprit objectif sur Terre (« L’Etat est le monde que l’Esprit s’est fait lui-même »), donc garant de la vérité objective, et le rapproche donc logiquement de son concept philosophique du Divin (renvoi à la citation du début, en introduction). L’Etat, en tant qu’incarnation de l’Esprit dans la société humaine, a donc un statut de supériorité suprême et il a pour mission de défendre, non pas les droits de quelques-uns (critique des monarchies d’Ancien Régime), mais les droits de tous. Sa mission, sa fin, c’est exclusivement l’universel : par ses actions, il doit uniquement rechercher à atteindre l’universel – qui est à prendre comme l’intérêt général, ce qui est bénéfique à l’ensemble des individus.
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