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Analyse de deux interprétations de Monteverdi

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Par   •  27 Janvier 2018  •  Commentaire d'oeuvre  •  1 578 Mots (7 Pages)  •  833 Vues

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Analyse comparée de deux adaptations de « Il ritorno d’Ulisse in Patria » par Monteverdi

Traitement musical par Monteverdi

Monteverdi était l’un des pionniers de cet art nouveau qu’est l’opéra au début du 17e siècle. Il a laissé son empreinte sur l’opéra baroque et en a donné ses premiers codes. Ainsi « le retour d’Ulysse dans sa patrie » est un opéra très représentatif des règles de son époque. Il est un reflet de l’opéra baroque du début du 17e siècle.

Nous pouvons noter le découpage de l’œuvre en cinq actes, découpage copiant celui du théâtre mais qui sera par la suite délaissé au profit de celui en trois actes. Les effusions de sentiments sont très présentes dans l’œuvre et montrent bien la volonté de dévoiler les tourments de l’âme humaine qu’avait le baroque. Les arias sont également nombreuses dans l’œuvre bien que celles-ci n’aient pas encore la recherche de somptuosité vocale qui marquera la suite de l’opéra Séria de Venise. « Le retour d’Ulysse dans sa patrie » est donc un bon reflet de ce que fut l’opéra baroque durant les premières années qui suivirent sa création.

D’un point de vue purement musical, le traitement du mythe d’Ulysse apparait comme fortement marqué par le vécu de ses personnages. Monteverdi fait apparaître la psyché de ses personnages via plusieurs astuces musicales. Nous pouvons prendre en exemple l’évolution de Pénélope pendant le déroulement de la pièce. Durant pratiquement toute l’œuvre, celle-ci ne s’exprime que par des chants récitatifs. Le côté morne suscité par ces longs passages récitatifs illustre très bien la solitude que ressent la reine  et montre  que celle-ci a décidé de se fermer à tous sentiments. Ce serment se brise lorsqu’elle retrouve Ulysse à la fin de la pièce. Pénélope n’est alors plus seule et peut laisser exploser sa joie dans une aria finale emplie de passion. Autre exemple, les dieux sont toujours accompagnés par l’orchestre avec une musique typée « ancienne ». Elle se veut grandiose mais a quelque chose de vieillot qui la rend désuète déjà au 17e siècle. Monteverdi tente de faire transparaître bien plus l’âme de ses protagonistes que leur vécu « physique » dans cette œuvre.

Les deux adaptations tentent de rendre au mieux la musique de cette époque. On peut noter l’usage d’instruments du 17e siècle pour mettre en valeur la sonorité désirée par le compositeur. Cependant, Glen Wilson et René Jacobs ont tous deux réinterprété cette œuvre selon leur vision. Ainsi, l’orchestre de Glen Wilson est bien plus imposant que ne l’étaient les orchestres des petits opéras de l’époque. Le compositeur a sans doute voulu combler un spectre musical qui parait assez réduit aux auditeurs actuels. René Jacobs, pour sa part, avoue avoir cherché une véracité historique mais pas celle de la pièce en elle-même. Il a, en effet, confié dans une interview qu’il avait grossi l’orchestre en doublant certains instruments. Son but était de s’approcher de ce que pouvait donner un opéra de cour vénitien du 17e siècle et non de celui d’un petit théâtre public de la même époque[1].

Les deux adaptations ont donc grossi l’orchestration, toutefois cela n’est pas étonnant. En effet, l’orchestre des petits opéras vénitiens de cette époque était fortement réduit. Ceci était dû tant à la taille des bâtiments qu’au budget dont disposait les gérants de ces établissements. Robert Donnington a tenté d’établir l’orchestre type d’un opéra vénitien au milieu du 17e siècle. Selon le musicologue, l’orchestre serait constitué de trois clavecins, quatre cordes, deux luths et une dernière partie non spécifiée[2].  Cet orchestre réduit ne satisferait plus un public actuel car, si on omet les puristes, la majeure partie des amateurs d’opéra préfère une orchestration couvrant un plus grand spectre musical.

Traitement scénique

La différence de mise en scène entre ces deux interprétations de la même œuvre est impressionnante. René Jacobs a décidé de mettre en valeur l’orchestre en l’incorporant à une mise en scène symbolique et minimaliste là où Glen Wilson a opté pour une mise en scène grandiose et impressionnante.


Pierre Audi a choisi de mettre en scène l’œuvre de manière très figurative mais en incorporant subtilement la psychologie des personnages. Cette incorporation se fait de plusieurs façons. L’apparition la moins subtile de cette psyché se déroule lors de la scène du concours de tir à l’arc. La flèche que décoche Ulysse, alors déguisé en mendiant, déclenche le coup de tonnerre promis par Minerve. Celui-ci embrase le décor. Ces flammes indiquent qui brûle dans le cœur d’Ulysse à cet instant. Audi a tellement voulu insister sur cette ferveur et cette haine qu’il a préféré que la flèche que tire le héros grec enclenche le mécanisme qui embrase le décor plutôt qu’elle ne tue directement les prétendants de Pénélope. Il s’éloigne ainsi de la mise en scène originale de l’œuvre. La psychologie des personnages est néanmoins retranscrite essentiellement par le jeu d’ombre et de lumière. Les différentes zones de la scène représentent les lieux différents. Ils sont donc plongés dans le noir lorsque l’action se déroule à un autre endroit. Cependant, les personnages n’étant pas censés jouer un rôle à ce moment-là peuvent rester sur scène mais dans l’ombre. Lors de la première complainte de Pénélope, Ulysse est déjà allongé sur le rivage d’Ithaque. Cela permet d’illustrer l’espoir qui demeure en la reine grecque lorsque celle-ci crie à Ulysse de revenir alors que qu’il n’est qu’à quelques mètres d’elle. L’aria de fin est également un bon exemple, Pénélope se place au premier plan et la lumière sur Ulysse se fait plus faible, elle redevient plus forte lorsque l’aria se termine par l’accolade des deux époux. Ce jeu permet d’insister sur le fait qu’Ulysse a toujours occupé les pensées de Pénélope à tel point que celle-ci peine  à croire en son retour.

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