Peut-on ne pas être soi-même ?
Dissertation : Peut-on ne pas être soi-même ?. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Amandine Rousseau • 1 Mai 2021 • Dissertation • 3 186 Mots (13 Pages) • 420 Vues
Peut-on ne pas être soi-même ?
L’idée du « soi » et du « je » renvoie à la notion d’identité. Qui suis-je ? L’identité revêt un aspect de permanence dans le temps. Un sujet reste le même (idem). Mais on peut également y associer l’identité personnelle, ce qui fait ma personne. Mais on ne peut pas aborder le sujet du « soi », de l’identité, sans mentionner la conscience, connaissance qui est avec soi, qui nous accompagne. On peut d’ailleurs distinguer deux consciences : la conscience morale qui exprime notre capacité à distinguer le bien du mal et notre conscience de nous-même, la capacité que nous avons à penser nous-même, à représenter nos pensées et nos actes. Le cogito de Descartes « je pense donc je suis », souffle déterminant de la pensée philosophique bousculera la vision des philosophes du « soi », repris notamment par Locke dans son idée que la conscience de soi accompagne toujours la pensée, je pense donc je sais que j’existe. Pourtant, si la conscience accompagne toujours la pensée, la conscience n’est pas toujours omniprésente en sa personne, lorsque l’on s’arrête de penser, peut-on considérer que l’on arrête d’être soi, que l’on est plus soi-même ? Et si l’on ramène la conscience à la conscience morale, alors transgresser ses devoirs en tant qu’être moral pourrait-il revenir à ne pas être soi ? Ou encore, si la conscience accompagne la pensée, cela signifie-t-il qu’il existe des états autres que la conscience qui ne serait pas inclus dans le « moi » ? Que signifie être soi même et dans quelle mesure l’est-on ou pas ?
En premier lieu, voyons que « soi » et sa conscience peuvent être difficilement différenciés. « Soi » pourrait se définir comme sa personne, son identité personnelle, ce que nous sommes et ce que nous nous considérons comme être. L’identité personnelle selon Locke est un « Etre pensant et intelligent, capable de raison et de conscience, et qui peut se consulter soi-même comme le même, comme une même chose qui pense en différents temps et différents lieus » (Locke, Essai philosophique concernant l’entendement humain, Livre II, chapitre 27, paragraphe 9). Ainsi, l’identité personnelle d’un homme semble être un pilier majeur de sa constitution en temps que sujet pensant. C’est ce qui lui permet d’avoir conscience de lui-même, de sa capacité à penser. Ainsi, le « soi » se base sur la conscience de l’homme, qui quant-à-elle est toujours accompagnée de la pensée. Etre « soi-même » se caractériserait aussi par l’aptitude d’un homme à réfléchir sur ce qu’il entoure et sur sa condition de personne. L’identité personnelle est ainsi un concept intime. La conscience, qui serait donc étroitement liée à l’identité personnelle, est également un concept intime puisqu’elle est évocatrice du lien d’une personne avec son « soi » intérieur. C’est grâce à la conscience que l’homme sait qu’il existe et donc qu’il peut penser. On retombe sur notre théorie initiale affirmant que la conscience d’exister est ce qui permet à l’homme de penser car le fait d’exister se base sur la capacité de l’homme à avoir conscience de lui-même, de son existence. On peut ainsi dire que la conscience détermine l’identité personnelle. Mais citons le cas du sommeil. Par définition, l’homme qui dort ne pense plus, n’est plus conscient. On pourrait alors considérer qu’un homme endormi, puisque être soi-même se caractérise par le fait de penser et d’être conscient, n’est plus lui-même, il perd son identité personnelle temporairement, pour la retrouver lorsqu’il se réveille.
La conscience serait indissociable de la personne dans la mesure où elle est à l’origine des actions passées et présentes. J’ai conscience de ce que j’ai fait et de ce que je fais, mes actes et mes pensées m’appartiennent en tant que personne, donc ma conscience correspond à ma personne. Si je suis conscient des actes que je commets et que j’ai commis, alors j’existe et je suis moi-même lorsque je commets ces actions. Il en va de même avec les perceptions. Je suis conscient de ce que je perçois, de ce que je sens, de ce que j’entends, je m’en souviens « étant impossible à quelque être que ce soit d’apercevoir, sans s’apercevoir qu’il aperçoit » (Locke, Essai philosophique concernant l’entendement humain, Livre II, chapitre 27, paragraphe 9). L’homme a conscience de ces actes ce qui lui permet d’être « soi-même ». Ainsi, lorsque l’on pense et que l’on a conscience de ce que l’on fait, alors on est soi-même. Ajoutons à cela que si nos actions passés et nos actions présentes déterminent le « soi » alors nous sommes le même que nous étions dans le passé. Mais citons le cas de l’oubli, qu’il soit pathologique ou naturellement dû au fait qu’il arrive d’oublier certaine chose. Si l’on part du principe que la conscience se détermine par la capacité d’un homme à être conscient de ce qu’il fait ou de ce qu’il a fait, alors si il ne se rappelle plus de ce qu’il a fait par le passé, alors un homme qui oublie, n’est plus lui-même, il perd une partie de son identité, de ce qu’il est. Ces actes et ces perceptions ne font alors plus partie de lui, plus partie de sa conscience.
C’est une théorie soutenue par Locke dans laquelle identité, personne et conscience se mélange et ne font qu’un. Mais l’on peut considérer que être soi-même et la conscience sont deux choses bien distinctes, qui vont engendrer un nouveau sujet, une nouvelle identité : le sujet moral.
En second lieu, étudions alors le sujet moral. Ainsi, l’homme serait un être moral. Avec cette situation, l’homme a donc des devoirs envers lui-même et envers les autres. Mais si l’homme est un être moral, doté d’une conscience morale, alors toute transgression des devoirs de l’homme envers lui-même serait un manque de conscience. Selon Kant « la plus grande transgression du devoir de l’homme envers lui-même considéré uniquement comme être moral (…), est le contraire de la véracité : le mensonge. » (Kant, Doctrine de la vertu, 1795, Du devoir de l’homme envers lui-même considéré uniquement comme être moral, partie I : Du mensonge). C’est une transgression du devoir de véracité de l’homme envers les autres car si l’homme se qualifie comme un être pensant, alors il se doit de transmettre sa pensée aux autres et non pas de la falsifier, car cela serait « mal » et que la conscience morale se caractérise par la distinction entre le bien et le mal. Cela reviendrait à bafouer sa propre morale. Mais si l’on caractérise le fait d’être soi même par le fait d’être un être morale, alors bafouer sa morale reviendrait à ne plus être soi même.
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