Modèles de justice constitutionnelle
Dissertation : Modèles de justice constitutionnelle. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar duralexsedlex1 • 27 Février 2017 • Dissertation • 1 153 Mots (5 Pages) • 2 270 Vues
Dans l’Etat, diverses règles de droit coexistent entre elles. Pour permettre de les articuler entre elles, Hans Kelsen (1881-1973), professeur de droit à Vienne puis à Harvard, a élaboré le très célèbre principe de la « hiérarchie des normes » en vertu duquel chaque norme inférieure dans l’ordre juridique doit respecter la norme qui lui est supérieure, la norme suprême étant la Constitution.
Si la suprématie de la Constitution est désormais une évidence, cette idée a pu être autrefois contestée, notamment par les légicentristes. En effet, Rousseau, en particulier, n’a eu de cesse de défendre la théorie de la souveraineté populaire selon laquelle « le législateur ne peut mal faire », la loi étant l’expression de la volonté générale. Rousseau s’oppose notamment à Sieyès, partisan de la création d’une « jurie constitutionnaire », soutenant qu’« une Constitution est un corps de lois obligatoires, ou ce n’est rien ; si c’est un corps de lois, on se demande où sera le gardien, où sera la magistrature de ce code » [1].
Cette tradition légicentriste en France explique que la solution trouvée lorsque l’on a cherché à introduire un contrôle de la conformité des lois ordinaires par rapport à la norme constitutionnelle, fut toujours de confier le contrôle à un organe de nature politique et cela pour deux raisons, l’une idéologique et l’autre historique. La première raison est liée à l’influence des doctrines de Montesquieu et de Rousseau, et à l’hostilité vis-à-vis de l’idée que les actes des assemblées souveraines pouvaient être soumis à un contrôle des juges; la seconde raison vient de l’hostilité que l’on avait en France vis-à-vis des interférences du pouvoir judiciaire avec les autres pouvoirs.
En 1958, la création, en France, du conseil constitutionnel consacre l’avènement du constitutionnalisme, doctrine fondée sur la suprématie de la Constitution dans la hiérarchie des normes, et selon laquelle la loi ne peut exprimer la volonté générale que dans le respect de la Constitution.
Cette cour constitutionnelle s’inscrit dans la ligne de Hans Kelsen et de la théorie qu’il a développée. En effet, il a publié un article[2] dans lequel il démontre que les règles juridiques du droit interne qui sont subordonnées à la Constitution doivent voir leur conformité à la Constitution contrôlée par un juge, et il va démontrer la nécessité pour un ordre juridique étatique d’instituer une juridiction constitutionnelle spécifique qui va exercer cette justice constitutionnelle.
A la même période Carl Schmitt (1888 - 1985), juriste allemand, qui s’est fortement inspiré de Rousseau, va présenter une théorie qui contredit celle de Kelsen en popularisant un second type de garantie juridictionnelle. Selon lui, ce n’est pas une juridiction constitutionnelle spécifique qui doit exercer cette justice constitutionnelle, mais il faut un gardien de la Constitution : le président de la République.
Si la cour constitutionnelle instituée en France en 1958 démontre indéniablement l’aspect « kelsénien » de la Vème République, il faut néanmoins relever un aspect « schmittien » dans la Constitution de 1958, à travers son article 5 alinéa 1er qui dispose que « le Président de la République veille au respect de la Constitution ».
Dans la plupart des Etats démocratiques, il existe un contrôle juridictionnel du respect de la Constitution par les normes qui lui sont inférieures, mais ce contrôle de constitutionnalité est organisé différemment selon les Etats. En effet, l’idée de cour constitutionnelle, comme il en existe désormais en France, n’est pas universelle. La doctrine s’accorde cependant à distinguer deux grands modèles, européen et américain. A travers l’étude de ces deux modèles, on peut se demander quelles sont les différentes modalités de contrôle de la constitutionnalité des lois ?
D’une part, ces deux modèles de justice constitutionnelle se distinguent par le ou les organe(s) chargé(s) du contrôle (I). D’autre part, ce ou ces organe(s) n’exercent pas la justice constitutionnelle selon les mêmes techniques de contrôle (II).
- Les organes chargés du contrôle de la constitutionnalité des lois
Ces deux modèles, européen et américain, se distinguent principalement par la nature du contrôle de constitutionnalité : concentré ou diffus (A). Cependant, malgré les divergences évidentes de ces deux modèles, on peut relever de nombreuses similarités entre le ou les organe(s) exerçant la justice constitutionnelle (B).
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