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Commentaire d'arrêt droit civil prénom

Commentaire d'arrêt : Commentaire d'arrêt droit civil prénom. Recherche parmi 300 000+ dissertations

Par   •  11 Octobre 2021  •  Commentaire d'arrêt  •  3 501 Mots (15 Pages)  •  887 Vues

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Le 12 novembre 1964, les juges de la Haute juridiction ont refusé, dans l’arrêt de l’affaire dite « des prénoms bretons », la subvention d’allocation familiale pour une mère de quatre enfants, car ceux-ci étaient dépourvus d’état civil, et donc sans existence légale, du fait que l’officier d’état civil avait refusé l’inscription des quatre prénoms bretons, tels que Yann ou Morgan, proposés par les parents. C’est à cette fin que le garde des Sceaux de l’époque, Jean Foyer, dans une instruction ministérielle du 12 avril 1966, a considérablement étendu le registre des prénoms en enjoignant les officiers d’état civil à ne rejeter que les prénoms de pure fantaisie tendant à nuire aux interêts de l’enfant.

En l’espèce, une mère et un père, tous deux de nationalité française, d’un jeune garçon, ont souhaité attribuer le prénom « Ravi », notoire en Inde, à celui-ci lors de sa naissance, or l’officier d’état civil chargé d’établir l’acte naissance du nouveau né a estimé que le prénom proposé était contraire à l’interêt de l’enfant et ne l’a de ce fait pas inscrit à l’état civil.

Les parents désireux que le prénom soit accepté, ont recours au procureur de la République, et le litige est alors porté devant un juge qui déboute les demandeurs. Le couple de requérants contestant la décision prononcée, interjette appel à la Cour d’appel de Rennes qui confirme, dans un arrêt du 19 mars 1990, le jugement rendu en première instance. Les appelants se pourvoient alors en cassation en invoquant un moyen unique dans lequel ils font grief à l’arrêt attaqué d’avoir violé l’article 1er de la loi du 11 Germinal an XI en rejetant le prénom « Ravi » au motif que, malgré l’absence de contestation vis à vis du fait que le prénom était emprunté à la tradition de l’Inde, il ne jouissait en France d’aucune notoriété. La 1ère Chambre civile de la Cour de cassation rejette le pourvoi des demandeurs dans un arrêt de rejet rendu le 5 juin 1993 en relevant le caractère trop fantaisiste du prénom.

Pour rendre leur décision, les juges de la Haute juridiction ont dû répondre au problème de droit suivant : L’interêt supérieur de l’enfant doit-il primer sur le principe de liberté des parents à choisir son prénom?

La 1ère Chambre civile de la Cour de cassation a répondu par l’affirmative, en arguant que le principe de contrariété à l’interêt supérieur de l’enfant relève du pouvoir souverain d’appréciation des juges du fond, et que c’est à juste titre qu’ils ont rejeté le prénom déterminé comme trop fantaisiste. Les juges de droit ont ajouté pour appuyer leur décision, que l’interêt de l’enfant doit prévaloir sur le souci d’originalité des parents.

Cet arrêt met ainsi en lumière le caractère primordial de la prise en considération de l’interêt de l’enfant au regard du libre choix des parents à choisir son prénom. En effet, le choix du prénom est déterminant pour l’existence d’une personne, notamment de part sa qualité d’élément d’identification du sujet de droit, il doit de ce fait être choisi avec rigueur. Or la législation, même si strict en théorie, a cédé aux parents avec la pratique une trop grande liberté en la matière et beaucoup d’enfants furent dotés de prénoms sujets à risque et pouvant les exposer à des moqueries ou autre discrimination. C’est pourquoi la jurisprudence a joué un rôle crucial en fixant les limites de cette liberté accordé aux parents, la présente et inédite solution en est la preuve indéniable.

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Ainsi si le présent arrêt a dégagé le principe de prééminence de l’interêt supérieur de l’enfant sur le libéralisme en matière de choix des prénoms dont jouissent les parents (I), il met également en avant le pouvoir souverain d’appréciation des juges laissé par la loi en la matière provoquant nombre de controverses au sein de la jurisprudence (II).

I. L’interêt supérieur de l’enfant prévalant sur le libéralisme en matière de choix des prénoms

La législation applicable en la matière, du fait d’un manque de cadre concret, a cédé, non seulement une liberté considérable aux parents en matière de choix des prénoms, mais aussi la place à la subjectivité en ce qui concerne les fonctionnaires compétents pour trancher sur la validité du prénom, ce qui a conduit à des litiges soulignants de multiples contentions s’agissant du choix du prénom (A). Mais c’est grâce à ces affaires contentieuses, qu’a pu être dégagé le caractère fantaisiste des parents qui peut s’avérer être contraire à l’interêt supérieur de l’enfant (B).

A. Le choix d’un prénom sujet à contestations

L’argument utilisé par le couple de requérants pour attaquer l’arrêt de la Cour d’appel de Rennes est fondé sur une loi proclamée par le Premier consul Napoléon Bonaparte en 1803, relative aux prénoms et changement de noms du 11 Germinal. C’est plus précisément l’article 1er de cette loi qui est invoqué par la partie demanderesse au pourvoi, cet article dispose que seuls les prénoms choisis parmi « les noms en usage dans les différents calendriers », ou parmi « ceux des personnages connus de l’histoire ancienne », pourront être reçus et inscrits par l’officier d’état civil sur l’acte naissance du nouveau né.

Cette loi du 1er avril 1803, faisant partie des lois les plus anciennes et qui resteront en vigueur très longtemps dans les textes législatifs, se veut très stricte, mais elle finira par subir un assouplissement très marqué par la pratique. Et même si la pratique a permis d’accepter nombre de nouveaux prénoms, trop encore restent proscris tels que des prénoms régionaux ou étrangers.

La nécessité d’une instruction claire pour encadrer l’application de cette loi s’est alors fait ressentir, c’est pourquoi la circulaire ministérielle du 12 novembre 1966 a vu le jour, et ce dans le but d’assouplir la jurisprudence. À cette fin sont autorisés les prénoms régionaux, tirés de la mythologie ou encore étrangers, et ne sont rejetés que les prénoms de pure fantaisie pouvant nuire aux interêts de l’enfant.

Dans l’espèce de l’arrêt en question, les parents d’un jeune garçon ont souhaité lui donné un prénom très notoire en Inde du fait qu’il est aussi l’un des surnoms du Surya, le Dieu du soleil dans la religion hindou ; c’est le prénom « Ravi ». L’officier d’état civil était qualifié pour contrôler lui-même la conformité du prénom, il était donc compétent pour accepter ou refuser d’inscrire le prénom proposé à l’état civil de l’enfant

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