Les caractères de la Bruyère
Résumé : Les caractères de la Bruyère. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Grigrigrigro • 6 Avril 2024 • Résumé • 1 829 Mots (8 Pages) • 80 Vues
Introduction :
Lorsqu'il rédige les Caractères à la fin du règne de Louis XIV, La Bruyère observe attentivement les courtisans de Versailles, qu'il fréquente, pour mieux les peindre à travers une galerie de portraits satiriques et mordants. Il fait partie du mouvement du classicisme. Comme son contemporain Molière, il a recours à l'humour pour critiquer les défauts de son temps. Ainsi, on pourrait rapprocher l'œuvre de La Bruyère et celle de Molière car La Bruyère emprunte de nombreux éléments au théâtre dans son ouvrage. [PROBLEMATIQUE]
Tout d'abord, Les Caractères sont constitués d'un vaste éventail de saynètes et de maximes vivantes qui rappellent le théâtre. De plus, La Bruyère, comme Molière, applique la devise de la comédie « Castigat ridendo mores », c’est-à-dire qu’elle « corrige les mœurs par le rire. » Enfin, la dimension théâtrale des Caractères réside surtout dans la mise en scène par le moraliste de la comédie du monde.
L’honnête homme
La Bruyère utilise un modèle issu du classicisme afin de corriger les travers des hommes : l'honnête homme. C’est un homme mesuré, convenable, cultivé, qui possède une capacité à s'exprimer de manière élégante et persuasive. Ainsi, les portraits satiriques sont à lire comme des contre-modèles de l’honnête homme. Observons le portrait d’Arrias dans le livre V. Arrias est avant tout un hâbleur égoïste, aveuglé par son narcissisme. Il vient bousculer les codes du savoir vivre en communauté : Il s’agit là de l’anti-modèle de l'honnête homme qui accapare la parole pour attirer la lumière sur lui. Dans ce passage, La Bruyère porte une réflexion sur les attributs langagiers à éviter. L'égocentrisme est donc incontestablement une caractéristique contre les règles de la conversation. La Bruyère utilise ces contre-modèles du classicisme pour mettre en relief les qualités de l'honnête homme et pour montrer les vices et les défauts que celui-ci doit éviter. Ces personnages représentent donc une dimension importante de l'œuvre de La Bruyère, qui permettent au lecteur de mieux comprendre les valeurs et les idéaux que l'auteur souhaite transmettre.
Theatrum mundi
Les moralistes du XVIIe siècle considéraient la société comme un grand theatrum mundi ("théâtre du monde"), où chaque individu jouait un rôle pour montrer sa richesse et son succès. Ils estimaient que cette façon de vivre était trompeuse et superficielle, où tout le monde cherchait à être vu. Par exemple, La Bruyère affirmait que les gens allaient à Paris "pour se regarder au visage et se désapprouver les uns les autres". Ils comparaient les courtisans à des acteurs. Cette manière de vivre était jugée néfaste car elle encourageait la fausseté et détruisait la sincérité, une valeur importante à l'époque. Pour La Bruyère, la cour et la ville étaient des lieux de changement perpétuel, où rien n'était stable. On retrouve cette idée d'agitation dans son portrait de Simon et Clitandre, où il décrit "l'empressement, l’inquiétude, la curiosité, l’activité". Il identifie la cour et la ville également comme les principaux décors de cette comédie, où les individus maîtrisent leur rôle à la perfection. Par exemple, il décrit Arfure dans la mairie, s'enrichissant en arrivant dans "un char" et en portant une robe à "lourde queue", évoquant ainsi une scène de spectacle baroque..
Observateur discret
Plutôt que l’attaque direct, La Bruyère utilise un moyen indirect pour critiquer la Cour : il adopte le regard naïf d'un étranger. Ainsi, il met en lumière les excès de la Cour : les plaisirs sensuels, les comportements excentriques des femmes, les perruques ridicules. Il en va de même pour la religion : les rituels figés et absurdes cachent mal la soumission du peuple au Roi. Le choix du regard étranger de La Bruyère préfigure, quelques années plus tard, le regard satirique d'Usbek sur les coutumes et les institutions françaises dans les "Lettres Persanes" de Montesquieu. On peut retrouver l'utilisation de ce regard étranger dans la remarque 74 du chapitre sur la cour, où il décrit le fonctionnement d'une région où le roi est comparé à Dieu, en utilisant ce point de vue extérieur.
Témoin de cette comédie
Au-delà de simplement observer de manière indirecte, La Bruyère est aussi un témoin de la comédie sociale. À travers ses remarques, il met en lumière cette comédie sociale où chacun joue un rôle, par nécessité ou par vanité. Dans la société de l'époque, tout est une question d'apparence, derrière laquelle se cache la véritable nature des individus. C'est particulièrement vrai à la cour : "Il y a un pays où les joies sont visibles, mais fausses, et les chagrins cachés, mais réels".(VIII 63) Tout le monde porte des masques. Les Parisiens vont dans les endroits à la mode uniquement pour être vus et pour montrer leurs carrosses, leurs chevaux, leurs vêtements. Même des gens modestes comme les brodeurs et les confiseurs essaient de paraître importants et imitent la royauté. Les caractères de La Bruyère dévoilent les masques que tout le monde porte. Il n'est pas le seul écrivain à avoir observé son époque et à avoir dévoilé ce jeu des apparences au sein de la société. On peut également citer "Illusions perdues" de Balzac. À travers le personnage de l'abbé Herrera, qui offre sa protection au héros, Balzac révèle les profondes réalités de la société à l'époque de la Restauration, qu'il découvre après ses propres observations.
L’argent
Dans le livre 6 de La Bruyère, intitulé "Des biens de fortune", l'auteur critique la domination de l'argent sur la vertu et le mérite. À cette époque, la société était organisée selon un système d'ordres comprenant le clergé, le tiers état et la noblesse. La Bruyère constate que la valeur de l'argent prend le dessus sur le mérite aristocratique, en raison de l'ascension de la bourgeoisie. Un personnage nommé Giton, par exemple, représente les riches qui se permettent tout grâce à leur fortune, même s'ils n'ont pas travaillé dur pour l'obtenir. La Bruyère écrit à son sujet : "il dort le jour, il dort la nuit". Ainsi, l'argent est devenu un symbole de décadence. En revanche, ceux qui n'ont pas d'argent, comme Pédon dans le livre 6, sont rejetés par la société et incapables de s'intégrer socialement.
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