Peut-on être libre sans être citoyen ?
Dissertation : Peut-on être libre sans être citoyen ?. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar lila.fournier • 2 Décembre 2023 • Dissertation • 4 674 Mots (19 Pages) • 173 Vues
Peut-on être libre sans être citoyen ?
Introduction : Si Mandela a pu s'écrier à sa sortie de prison « il n'existe pas de liberté
partielle », c'est sans doute qu'il entendait l'idée d'une liberté absolue, totale, qui ne pourrait
seulement se cantonner à la sphère privée. On lui demandait en effet, en échange de sa
libération, d'arrêter de militer. Or il ne pouvait accepter une telle « liberté ». Si certes, il sortait
de prison et obtenait donc une liberté physique, il ne pouvait plus être libre d'agir et de
s'exprimer en faveur d'« une société libre et démocratique ». Ainsi posé, comment comprendre
cette affirmation de Mandela ? Pourquoi une liberté partielle ne serait pas possible ? Pour
traiter ce sujet, il nous est utile de revenir à une analyse succincte du concept de liberté, qui
nous servira de point de départ.
Le concept de liberté trouve son origine à Athènes dans le cadre de la cité sous le nom de
Eleuteria et se lie intimement avec la citoyenneté.
Historiquement, il n'est de liberté qu'au sein de la Cité, polis, en grec qui donnera notre terme
de politique. En effet, dans la démocratie d'Athènes du VIIème siècle avant J-C, celui qui est
libre est le citoyen. Ce n'est pas l'esclave, la femme, l'artisan ou le métèque, qui eux sont
soumis à leurs besoins vitaux -- ou en dehors de la cité pour le métèque. La liberté dépendait
donc entièrement du statut de citoyen.
Mais, lorsque la démocratie athénienne commence à décliner, lorsque des guerres civiles
éclatent, et que des luttes d'intérêts envahissent l'Agora en lieu et place de la défense du bien
commun, les Épicuriens, mais aussi les Stoïciens, entendent placer le champ de la liberté non
plus en politique dans la sphère publique, mais sur le plan de l'individu, sphère privée. Être
libre, c'est être capable de maîtriser ses désirs, de se maîtriser sans être dépendant des
événements extérieurs. Ainsi, dans le Jardin d’Épicure, on accepte les femmes et les esclaves,
qui peuvent aussi prétendre à la liberté au même titre que les autres. Ce qui ne s'est plus remis
en doute depuis, et s'est même accentué, avec le christianisme. L'un de ses représentants,
Augustin, montre bien que la liberté est un don divin attribué à tous les hommes, et devient le
choix individuel de faire le Bien ou le Mal.
A partir du déclin de la démocratie athénienne donc, on commence à penser la liberté en
dehors de la Cité. Cette transformation du concept de liberté rend les choses plus complexes
qu’elles ne l’étaient. En effet, il était facile de distinguer l'homme libre de celui qui ne l’étais
pas car c’était une condition inséparable de son statut social et politique. Aujourd’hui, qu'est-
ce qui nous permet de dire qu'un homme est libre ou non ? Est-ce qu'on a pu se libérer de la
charge de la cité ? Ou bien devons-nous y revenir ? Il semble bien que la politique ne soit pas
le lieu de la liberté : spectacle de tous les dérapages, conflits, affaires de corruption, discours
de manipulation des masses, ne soit pas un domaine où l'on soupçonnerait trouver l'essence
de la liberté, bien au contraire. Faudrait-il alors pour être libre laisser de côté la cité, et chercher
cette liberté en notre for intérieur, au sein de la sphère privée ?
La cité peut se définir au sens strict comme étant aujourd'hui l’État ; mais aussi au sens large,
la société. En effet, la Cité antique était à la fois une communauté de vie et une communauté
politique dans le cadre d’une ville. Cependant, au sens usuel, le citoyen n'est pas simplement
membre de la société, puisque dans la société on prend en compte les différents statuts des
individus. Il est membre d'un État au sein duquel il est égal aux autres citoyens, a les mêmes
droits et doit obéir aux mêmes lois. Est-ce que cette condition de citoyenneté est nécessaire
pour établir la liberté ? et est-elle encore suffisante ? Ou bien sommes-nous libres en tant
qu'individus, en dehors de l’État et des règles qu’ils nous imposent ?
On se demandera en droit, si l’on peut affirmer légitimement que l'homme est libre en dehors
de son statut politique de citoyen ? Ou bien si cette liberté se rattache directement à la
citoyenneté, lui conférant une puissance réelle ?
Si finalement les hommes ont la capacité d’être libres sans être citoyens, doit-on alors en
déduire que l’Etat est superflu? Plus encore que signifie « être » citoyen ? La citoyenneté est-
elle simplement un statut qu'on attribue ? ou bien une activité pratique de l’individu, qui le
définit et construit son essence ? A ce moment, on peut se demander laquelle parmi ces types
de citoyenneté correspond véritablement a une condition de liberté.
D'abord,
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