Commentaire Sur Le Baptême De Clovis à partir du Récit De Grégoire De Tours
Mémoire : Commentaire Sur Le Baptême De Clovis à partir du Récit De Grégoire De Tours. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Choucoulat • 31 Mars 2014 • 3 667 Mots (15 Pages) • 8 811 Vues
Le baptême de Clovis
Récit de Grégoire de Tours
Source : Source : Grégoire de Tours, Historia Francorum, II, MGH. SS. RM, éd. B. Krusch, I, Hanovre, 1885, p. 91-93 ; éd. 1951, p. 75-78. trad. dans Ch.-M. de La Roncière, Ph. Contamine, R. Delort, M. Rouche, L'Europe au Moyen Âge. Documents expliqués, tome I, 395-888, Paris, col. U, Armand Colin, 1969, p. 39-44.
Le règne de Clovis est un règne important pour l’histoire des Francs et l’histoire de France, mais aussi pour l’histoire du christianisme en Occident, puisqu’il voit un roi franc païen – Clovis – se tourner vers le christianisme. Clovis – issu de la dynastie des Mérovingiens, né vers 466, devenu roi des les Francs en 481, et mort en 511 – est le fils du roi franc salien Childéric Ier et de la reine Basine de Thuringe. Son règne est principalement connu grâce à Grégoire de Tours (de son vrai nom Georgius Florentinus) qui écrivit une Historia Francorum (« histoire des Francs »), plus de soixante ans après la mort du roi.
L’Historia Francorum dont est extrait le document, rédigée dans le dernier quart du VIe siècle, est une histoire universelle composée de 10 livres (notre texte étant un extrait des chapitres XXX et XXXI du deuxième livre) ; elle commence avec la création du monde et se termine en 591. Grégoire (qui vécut dans la seconde moitié du VIe siècle), alors évêque de Tours, écrit cette histoire dans un latin sans élégance, avec des barbarismes, et y transmet sa propre vision des événements, vision marquée par l’idéologie : en effet, pour lui, Dieu intervient dans la vie des hommes et le baptême de Clovis entre dans le plan que Dieu a conçu pour les Francs.
Au moment où Grégoire rédige son œuvre, il est à noter que Tours est sans doute le plus grand centre religieux de la Gaule, tirant sa notoriété du pèlerinage très fréquenté qui s'était organisé auprès des reliques de saint Martin.
Dans cet extrait, Grégoire raconte comment Clovis, roi des Francs, aurait invoqué Dieu et se serait converti au christianisme, sur un champ de bataille, rejetant les dieux germaniques qu’il vénérait auparavant. Le récit continue en nous présentant l’instruction religieuse chrétienne que reçut Clovis et le rôle de Remi, évêque de Reims, dans la préparation au baptême du roi, pour s’achever sur la cérémonie du baptême.
Ce texte nous permet donc de nous interroger sur les enjeux du baptême de Clovis, passant du statut de roi franc païen à celui de roi franc chrétien. Ainsi nous faudra-t-il analyser les circonstances de la conversion de Clovis au christianisme, avant de nous intéresser à son baptême.
Intéressons-nous tout d’abord à la conversion de Clovis, ce roi franc païen, époux d’une princesse chrétienne, qui fut amené à se battre contre un autre peuple germanique : celui des Alamans, combat au cours duquel il se serait converti, conversion qui n’est pas sans rappeler celle de Constantin plus d’un siècle et demi auparavant.
Clovis est, au départ, un roi franc païen qui a épousé une princesse chrétienne. Clovis (dont le nom apparaît explicitement dès la ligne 6) est le roi des Francs, un peuple germanique attaché à ses croyances polythéistes présentées comme des « idoles » (l.2) que Clovis présentait comme ses propres dieux (« mes dieux » à la ligne 12). Notons ici que Grégoire de Tours, en bon évêque, oppose à ces « idoles » le Dieu du christianisme, « le vrai Dieu » (l.1) ; les croyances polythéistes des peuples germaniques (comme par exemple leur dieu de la guerre Odin) ne peuvent être pour lui que de fausses croyances. Par ailleurs, Clovis est également – comme tout roi germanique de cette époque – un roi conquérant qui est présent sur le champ de bataille (à la tête de son armée composée d’hommes libres) et qui cherche à étendre son royaume comme nous l’indique « la guerre [qui] fut déclenchée contre les Alamans » (l.3). Ce roi germanique règne alors sur des sujets gallo-romains christianisés de longue date, ce qui apparaît avec la présence d’évêchés dans son royaume : les évêques jouent un rôle important auprès des populations dans cette période troublée qu’est celle de la fin de l’empire romain d’Occident et de l’émergence des royaumes germaniques, les évêques encadrent alors les populations pour lesquelles ils apparaissent comme l’une des rares institutions stables à l’instar de « Remi, évêque de la ville de Reims » (l.21), très influent au Ve siècle, avec lequel Clovis et sa femme entretiennent de bonnes relations. Son épouse – la « reine » (l.1) Clotilde dont le nom apparaît dès la ligne 8 – est d’ailleurs mentionnée dès le début de notre extrait. C’est une princesse burgonde, élevée dans le christianisme, qui épouse ce roi encore païen et sème chez lui l’idée d’une possible conversion puisqu’elle « ne cessait de prêcher pour qu’il connaisse le vrai Dieu et abandonne les idoles » (l.1). Souhaitant appeler Dieu à l’aide, c’est d’ailleurs à « Jésus-Christ, que Clotilde proclame fils du Dieu Vivant » (l.7-8) que Clovis s’adressera.
Cette invocation au Dieu des chrétiens a lieu durant la bataille contre les Alamans.
Les Alamans étaient un peuple germanique installé aux frontières orientales du royaume de Clovis. La guerre engagée entre les Francs et les Alamans est mentionnée à la ligne 3 et sa datation est importante car, aux dires de l’auteur, elle détermina la décision de Clovis de se convertir au christianisme lorsqu’il fut « poussé par la nécessité à confesser ce qu’il avait auparavant refusé de faire volontairement » (l.3-4), c’est-à-dire invoquer le nom de Dieu (le Dieu des chrétiens). Cette datation est discutée par les historiens ; Grégoire la place « la quinzième année [du] règne de Clovis » (l. 20), calculant ainsi les dates « à la romaine », c’est-à-dire par année de règne ; Grégoire date ainsi les événements importants du règne mais ces dates tombent trop curieusement les années en 0 ou en 5 pour que sa datation ne soulève pas de doutes. Il semblerait en fait que Clovis ait engagé au moins deux batailles contre ce peuple. Celle-ci serait donc la deuxième, celle qui eut lieu à Tolbiac et qui marque la soumission des Alamans (« ils firent leur soumission à Clovis », ligne 17), et que l’on date généralement aux environs de 496. Quoiqu’il en soit, dans le cadre d’une alliance avec les Francs ripuaires, Clovis engagea cette bataille contre les Alamans, un peuple
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