Commentaire : L’ordonnance pour la réformation de la justice, Montils-Lès-Tours, Avril 1454.
Commentaire d'arrêt : Commentaire : L’ordonnance pour la réformation de la justice, Montils-Lès-Tours, Avril 1454.. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Léa Brahmi • 17 Septembre 2017 • Commentaire d'arrêt • 2 240 Mots (9 Pages) • 2 169 Vues
Commentaire : L’ ordonnance pour la réformation de la justice, Montils-Lès-Tours, Avril 1454.
Cicéron affirme que « La coutume est le droit qu’un long espace de temps a rendu obligatoire par la volonté de tous et sans l’intervention de la loi ». La première ébauche de l’unification du droit fut l’ordonnance de réformation de Saint Louis prise en 1254. La coutume désigne en effet, un usage oral de force obligatoire, consacré par le temps et applicable à tous, sur un territoire donné. De plus, ces coutumes se formaient localement et étaient appliquées par des instances seigneuriales, municipales ou royales. A côté de ceux-là, certaines autorités, comtes, ducs ou pouvoirs municipaux, avaient déjà fait procéder à une mise par écrit de la coutume locale. Leur initiative conférait au texte un caractère officiel que n’avait jamais acquis les coutumiers privés. Néanmoins, l’initiative, la confirmation ou la promulgation, n’étaient dues qu’à une autorité publique inférieure et non à l’intervention du roi souverain.
A l’aube des temps modernes, la monarchie compte intervenir pour l’ensemble du royaume. L’organisation de la procédure de rédaction et les tâches dévolues à chacun doivent permettre de combiner réalités locales et autorité royale. La première intervention du roi consista à prendre l’ordonnance de Montils-lès-Tours, en 1454, et à décider que les coutumes ainsi rédigées auraient valeur officielle. Cette ordonnance prise par Charles VII vise, selon le titre qui lui est conféré, la réformation de la justice. Elle traite de multiples aspects de l’organisation judiciaire. A ne considérer que le texte lui-même, on peut se demander si ce n’est qu’accessoirement que le roi a ordonné la rédaction des coutumes. La question n’est abordée qu’à l’article 125, le dernier du texte, en des termes peu précis. La rédaction des coutumes telle qu’elle est prévue dans cet article correspond à une déclaration d’intention de Charles VII, une volonté nettement affirmée.
Ainsi, nous pouvons nous poser la question de savoir quels ont été les objectifs et les conséquences de la rédaction des coutumes dans une optique de réformation de la justice ?
Les objectifs sont fixés et Charles VII indique les fonctions qu’il s’attribue à lui, qu’il confie aux instances locales ainsi qu’aux agents dépendants de lui. Ces objectifs sont nécessaires quant à l’amélioration du droit français et à l’unification du droit (I), cependant la description d’une procédure à mettre en œuvre demeure incomplète, ce sont les instances locales qui s’occupent de rédiger les coutumes (II).
I. La prépondérance de l'autorité royale dans les objectifs de la rédaction officielle des coutumes
La codification des coutumes est nécessaire pour réaliser les objectifs de Charles VII (A), il découlera de cette prépondérance royale une unification du droit sur l’ensemble du royaume (B).
A. Une nécessaire codification
Dans l’ordonnance de Montils-lès-Tours sur la réformation de la justice, Charles VII envisageait cette rédaction des coutumes comme devant permettre un meilleur fonctionnement des tribunaux. L’article 125 précisait notamment le but de la réforme entreprise : la rédaction des « coutumes, usages et styles des pays de notredit royaume » lignes 5 à 6. En effet, au XVème siècle le droit oral français ne comprend pas seulement la coutume, mais également des usages et des styles de procédure. Ces styles de procédure sont considérés comme étant l’ancêtre de la jurisprudence, cependant, ils ne font pas autorité de plein droit, comme la coutume et l’usage. L’usage est une manière d’agir, ancienne, constante, notoire et générale alors que la coutume est un usage auquel on se conforme parce que l’on a conscience d’y être tenu. De ce fait, toutes les coutumes sont des usages, mais tous les usages ne sont pas forcément des coutumes.
Si l’ensemble de ce droit oral était rédigé par écrit, « les procès seraient plus brefs, les parties seraient soulagées de dépenses et frais de justice », lignes 6 à 7. De fait, la justice était extrêmement coûteuse pour les plaideurs et considérablement plus lente que de nos jours. La rédaction des coutumes fut présentée comme un remède à cette situation. Le contenu des coutumes sera connu de tous, des juges, des avocats et des parties. En effet, « les juges jugeraient mieux et de façon plus sûre » lignes 7-8. Le contenu des coutumes sera donc certain, puisqu’il s’agit d’une rédaction officielle. On sera donc contraint de se référer à la règle de droit dans la forme où elle figurera dans le texte promulgué, sans pouvoir en invoquer une autre. Ainsi, seul ce texte pourra être invoqué devant les tribunaux, dans la forme où il aura été rédigé. La preuve d’une coutume se fera facilement, par simple consultation de l’écrit. En même temps, la rédaction fixera le droit. Si l’évolution des coutumes offre des possibilités d’adaptation aux changements de la société, elle génère des incertitudes préjudiciables à une bonne justice.
B. Une entreprise d’harmonisation du droit
« Voulant mettre de la certitude dans les jugements autant que faire se pourra et ôter toutes sortes de variations et contradictions » lignes 12-13. En outre, la rédaction supprimera les « contradictions ». Cela a un triple point de vue.
Cela affirme tout d’abord la suppression des contradictions existant à l’intérieur d’une même coutume, résultant de la formation empirique de la règle, qui gêne considérablement juges et praticiens.
De plus, il est question de la suppression des contradictions entre coutumes voisines, à l’intérieur d’une même région. Dans l’Ouest de la France, par exemple les ressorts territoriaux étaient de très faible superficie. Pourtant, beaucoup de ces
...