Approche socio-historique de la question sociale "corps infirmes et sociétés"
Commentaire de texte : Approche socio-historique de la question sociale "corps infirmes et sociétés". Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Maëlla d'Audigier • 5 Mai 2016 • Commentaire de texte • 2 329 Mots (10 Pages) • 1 450 Vues
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Approche socio-historique de la question sociale
Corps infirmes et sociétés, « La Naissance de la réadaptation »
Henri-Jacques Stiker
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Introduction
Philosophe, historien et anthropologue de l’infirmité, Henri-Jacques Stiker est directeur de recherches au laboratoire histoire et civilisations des sociétés occidentales, à l’Université Denis-Diderot-Paris, et président de l’association ALTER (Société internationale pour l’histoire des infirmités, déficiences, inadaptations, handicaps). Il est l’auteur de plusieurs ouvrages et articles comme Le handicap en images, La déficience dans les œuvres d’art (Erès 2003), Les Métamorphoses du handicap de 1970 à nos jours (26 mars 2009) dans lesquels il traite des questions relatives au handicap, tels que l'évolution du terme, des représentations sociales, de l'insertion.
Avec La naissance de la réadaptation dans Corps infirmes et sociétés, l’auteur s’interroge sur les représentations que nous avons des personnes handicapées au travers du concept de réadaptation. Il explique à partir d'un point de vu anthropologique l'histoire mal connue du handicap et de la réadaptation. « La réadaptation constitue l’ensemble des mesures ayant pour objet de rendre au malade ses capacités antérieures et d’améliorer sa condition physique et mentale, lui permettant d’occuper par ses moyens propres une place aussi normale que possible dans la société » (OMS). Comment le regard porté sur le handicap et sa prise en charge dans notre société ont-ils évolué depuis le XXème siècle ?
Dans une première partie, nous étudierons le contexte socio-historique de la réadaptation, sa naissance, et les différents termes employés pour la définir ainsi que tout le vocabulaire qui en découle. Puis, dans une seconde partie, nous développerons la question de la prise en charge, c’est-à-dire, l’adaptation de la personne à la société, des législations ainsi que le clivage créé entre les différentes personnes handicapées, issu des politiques de prise en charge.
I- Le contexte socio-historique de la réadaptation.
A) L’Après-guerre (1918) :
La guerre de 14/18 est considérée comme un marqueur historique et social. La « naissance de la réadaptation » selon Jacques-Henri Sticker y trouve sa genèse. Les gueules cassées, les mutilés de guerre et autres victimes rappellent à la société sa culpabilité et son obligation morale dans la prise en charge de ces héros invalides dont « l'intégrité et l'intégralité » ont été altérées.
Elle impose une nouvelle représentation de l'infirmité. La société s'emploie à réparer les préjudices infligés. Le mutilé est considéré comme celui à qui il manque quelque chose. Cette absence sera comblée physiquement par la prothèse et socialement par l'intégration ou la réintégration au sein de la société. En témoigne, la création de l'Office national des mutilés en 1916 qui vient organiser le développement de la prothèse et sa prise en charge. L'appareillage remplace, la société « ré-intègre ». Cette façon d'aborder l'idée du manque à combler va introduire un glissement dans la terminologie. Le mutilé est assimilé à l'infirme qui par extension vient qualifier tout « infirme civil » ou « diminué mental ».
Un droit nouveau apparaît: celui de bénéficier d’une nouvelle chance, de se "re-adapter", de retrouver « sa » place dans une société qu’ils avaient contribué à sauver ainsi que dans la vie sociale et dans une participation sociale collective
B) Contexte social:
Si la première guerre mondiale, avec les mutilés est un repère, dès 1898 la prise en charge financière des accidentés du travail, avec des victimes atteintes d'une incapacité professionnelle provisoire ou définitive permet la perception d’une indemnité qui préfigure l’idée de réintégration. Cette prise en charge évoluera et atteindra d'autres catégories de personnes telles que les malades professionnels, les agriculteurs et les gens de maison.
Le concept de réadaptation hérité de cette période s'opposera à celui de l'assistance telle qu’elle était pratiquée par la bourgeoisie féminine catholique qui avait pour vocation de s’occuper des infirmes au travers de soins quotidiens. « Au moment où la simple assistance bat encore son plein, s’insinuent des obligations proprement sociales et non plus morales [2]».
Jacques Henri Stiker expose pour cela brièvement la thèse de Jeanine Verdès-Leroux, pour qui la suite de l’Histoire démontre clairement la division des classes sociales dominantes et dominées, du fait que l’Assistance Sociale abandonnerait les «improductifs» à la charité (bourgeoise et catholique). Cependant, pour Jacques Henri Stiker, c’est à cette période que l’intégration de la personne va passer de plus en plus au premier plan, bien avant l’idée même d’assistance. Pour lui, la réadaptation va tendre à faire disparaître la catégorisation de l’infirme pour l’inclure dans le tout social. Ce fait posera la question de la réadaptation à la norme sociale.
Par la suite, la logique d’adaptation de la personne continuera son cheminement. Au travers tout d’abord de la seconde guerre mondiale qui amènera la création de la Sécurité Sociale et de nombreuses associations, puis avec l’intégration de la personne handicapée par un revenu minimum assuré et le droit d’accès à un emploi ou une formation à partir de la loi de 1975.
Enfin, en 2005 la notion de réadaptation est tout à fait intégrée à travers une loi qui promet de grandes avancées, notamment en termes d’accessibilité pour tous à un emploi, à tout lieu et à toute vie sociale.
C) Définition du handicap dont découle la notion d’adaptation
Selon H.J Stiker la notion « d'infirme », héritée des mutilés de la Première Guerre Mondiale, prend une toute autre tournure au début du XXe siècle. On lui préfère une appellation sans consonance négative, cette fois avec le mot « handicap » (Ce mot est né sur les champs de course et est utilisé pour désigner le poids ou la distance supplémentaire destinés aux meilleurs chevaux dans un souci d'égalité des chances).
Cette notion de handicap englobe les handicapés « de naissance » ainsi que ceux qui le sont devenus au cours de leur vie à la suite d'un accident. Elle désigne un désavantage surmontable, contrairement à l'idée d'infirmité. Autour de cette notion s'installe un système très fort et très présent dans le débat que Jacques Henri Stiker cherche à instaurer : celui de la réadaptation. On ne peut comprendre l’émergence de la notion de handicap si on ne se réfère pas à celle de réadaptation et inversement.
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