Légitimation du pouvoir impérial à Rome
Dissertation : Légitimation du pouvoir impérial à Rome. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar mathieu96 • 15 Décembre 2019 • Dissertation • 1 972 Mots (8 Pages) • 597 Vues
« Le concept et la légitimation du pouvoir impérial dans la pensée politique romaine. »
"Omnia vincit amor et nos cedamus amori " qui signifie "L'amour triomphe de tout, nous aussi cédons à l'amour". Cette phrase a été prononcée par Virgile, grand écrivain du « siècle d'Auguste » en 37 av. J.-C. Au première abord, on peut penser que cette citation n'a aucun rapport avec notre sujet mais en l'analysant plus profondément, on en comprend toute la portée.
En latin, le mot amor (« amour ») est l’anagramme de Roma. C’est donc un palindrome. Et si l'on se replace dans le contexte, ce vers extrait du recueil de poèmes des « Bucoliques » de Virgile pouvait se comprendre dans un sens clairement politique. Ici, l'amour, donc Rome représente Octave, le maître de la ville qui triomphe de tout. Il incite dans son oeuvre à céder comme lui à l'Amour donc à soutenir Octave. C'est en quelque sorte une propagande déguisée en sa faveur contre Antoine. Car la même année, l’Empire fut partagé après la mort César : à Octave, Rome et l’Occident ; à Antoine, Alexandrie et l’Orient.
Que nous disent les termes du sujet ?
La question de la légitimation induit la capacité d'une personne ou d'un groupe à faire admettre sa domination, son autorité sur les membres d'une communauté ou d'une société. Aussi, la légitimité ne se fonde pas uniquement sur le droit, mais peut mettre en œuvre différents critères comme les origines, la tradition, la religion, la richesse, le statut, les titres etc. La légitimité a donc un sens plus large que la légalité.
Lorsque l'on parle de pouvoir impérial, il faut s'intéresser à un élément fondateur du pouvoir à Rome et évidemment du pouvoir impérial au fil des siècles qui est la notion d'imperium, création monarchique romaine qui conférait à son détenteur le pouvoir de mort sur tout qui refusaient de lui obéir. Plus tard sous la République, l'imperium a pris une tournure plus juridique ne pouvant être appliqué que dans le cadres des magistratures investi par la lex curiata de imperio, la loi annuelle votée par les assemblées populaires. Celle ci conférait aux magistrats, en particulier aux consuls, la fonction gouvernementale légitimitée par les auspices religieux (auspicium) sous la bénédiction du dieu Jupiter. En plus de l'imperium, les magistrats étaient investis de la potestas, un pouvoir de contrainte qu'ils exerçaient pour une durée limitée sous l'autorité du Sénat qui lui utilise l'auctoritas, l'autorité par des senatus consultes qui avaient valeur exécutoire car inspirées des dieux. L'imperium impliquait essentiellement des pouvoirs d'ordre militaire comme le droit pour le magistrat de commander des troupes en campagne mais aussi le titre d'imperator aux généraux victorieux, élément déterminant pour notre sujet.
Mais avant d'en arriver à la fondation du régime impérial, il semble nécessaire de faire un bref retour en arrière pour comprendre quelles ont été les causes de l'effondrement de la République qui va aboutir à une monarchie déguisée pourtant honnie par le peuple romain. C'est véritablement au dernier siècle de la République qu'un monde politique va s'achever, bouleversé par de multiples crises sociales, politiques et économiques qui vont contribuer à la fin de la paix sociale et à de multiples guerres civiles. Selon de nombreux auteurs comme Philippe Nemo, la crise de la République peut être datée à partir de 130 av JC. D'autres comme Michel Humbert et David Kremer distinguent trois phases dans le déclin progressif de ce régime politique.
Tout d'abord, après des décennies de conquêtes, Rome va être frappée par une importante crise économique, résultat de cette expansion perpétuelle. De nombreux déséquilibres sont nés avec un enrichissement des classes nobles qui se sont attribuées l'exploitation de l'ensemble des territoires conquis, l'ager publicus, au détriment des autres classes. Et c'est précisément contre cette injustice économique que vont lutter Tiberius Graccus puis son cadet Caius Graccus. Leur volonté était clair. Prendre le pouvoir et réformer la République notamment au niveau agricole en confisquant les terres tombées dans les mains des nobles pour les redistribuer aux classes populaires. Mais leur opposition avec le Sénat aristocratique va conduire à leur assassinat à quelques années d'intervalle. Ces épisodes n'ont fait que fragiliser l'équilibre social de la République. L'échec des Gracques eut pour conséquence de redistribuer les cartes en matière de politique avec l'émergence de deux grands partis qui vont se disputer le pouvoir jusqu'à l’avènement d'Auguste. D'un côté les populares, le parti populaire et de l'autre les optimales, le parti sénatorial.
Après cette période de troubles, il n'y a plus la volonté de réformer mais de faire revenir le calme à Rome. Il faudra attendre l'arrivée au pouvoir d'un personnage comme Sylla en 80 av JC qui sera nommé « dictateur perpétuel ». Il va rétablir l'ordre après plusieurs années de guerres civiles en restaurant la domination du Sénat. Après avoir réussi sa mission, Sylla abdique à la surprise générale et meurt peu de temps après ce qui va avoir pour conséquence de fragiliser son œuvre notamment en ce qui concerne la place du Sénat qui à partir de là, va voir son pouvoir se dégrader et ne plus avoir aucune autorité.
Une vingtaine d'années après la mort du dictateur Sylla, une alliance secrète va naître entre Pompée, Crassus et César appelée le triumvirat en vue de renverser le Sénat et les partisans de la constitution républicaine défendue notamment par Cicéron. Il s'agit d'un pacte inconstitutionnel formé pour s'emparer du pouvoir et contourner les principes de la République. César avec l'appui des populares et de ses compères se fera élire Consul et prendra des mesures économiques et militaires pour s'assurer le soutien de l'armée mais aussi des classes populaires. Aussi, il prendra le gouvernement pour 5 ans des provinces gauloises et partira à la conquête du reste de ce territoire pour gagner prestige, argent et fidélité de son armée.
Il semble d'ailleurs judicieux d'évoquer brièvement la pensée de Cicéron sur les événements de son temps et notamment sur la tournure qu'à pris la République romaine. Cet homme politique et penseur a été un témoin privilégié du déclin de ce régime et a laissé des écrits importants pour expliquer sa vision des choses. On pense ici à ses traités « De la République » en 54 av JC et « Des Lois » en 52 rédigés dans une période de troubles politiques. Il s'inspire de Platon pour dégager la meilleure forme de gouvernement possible et définir le meilleur citoyen. Selon lui, l'idée serait d'adopter une constitution mixte basée sur l'imperium contrebalancée par le peuple, libertas pour atteindre l'équilibre et ne pas dériver vers le regnum, la monarchie. Aussi, Cicéron définit le meilleur citoyen comme étant celui qui, plein de sagesse saura être au service de la cité en étant le tuteur, le mandataire de l'Etat, et non pas le maître. Sa fonction première sera de maintenir l'équilibre qu'il s'attache à décrire dans la parfaite légalité. C'est en cela qu'il condamne le pouvoir personnel et notamment des personnages comme Pompée et surtout César qui selon lui ne pensent pas « au bonheur des citoyens et au salut de l'Etat » mais en leurs propres intérêts.
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