La guerre fait l'État, et l'État fait la guerre.

"La guerre fait l'État, et l'État fait la guerre." (Charles Tilly)

Le 2O octobre 2022, la police islandaise arrête quatre personnes liées à la préparation d’une attaque terroriste. Le terrorisme international est l’une des nouveautés de la guerre contemporaine. En effet, après la fin de la guerre froide, on assite à une rupture majeure dans l’évolution des formes de la guerre, en passant de grands conflits interétatiques impliquant des armées régulières à une époque marquée par des conflictualités nouvelles. Cela conduit à interroger la seconde moitié du vingtième siècle comme une évolution de la situation issu de la guerre. La guerre entretient un rapport singulier au politique et est donc nécessairement liée à l’état, qui est, aujourd’hui la forme quasi exclusive d’organisation du pouvoir politique. C’est ce que le sociologue américain Charles Tilly, en examinant la relation entre l’État et la guerre, met en avant, lorsqu’il énonce "La guerre fait l'État, et l'État fait la guerre." Sa thèse est qu’un État fort et structuré permet de maintenir une armée puissante et que cette armée maintient à son tour tout le pouvoir de l’État. Dans nos sociétés actuelles nous assistons à un affaiblissement de l’État qui rompt avec la période où l’étatisme prédominait.

Peut-on alors affirmer que l’affaiblissement de l’État est lié à la décroissance de la guerre alors même celle-ci prend d’autres formes ?

🡪Nous étudierons dans un premier temps le rapport singulier entre la guerre et l’état.

🡪Puis nous verrons dans un second temps que l’État moderne à d’autres objectifs que la guerre

🡪Et enfin nous montrerons que si la guerre traditionnelle disparait, elle revit sous d’autres formes

Tout d’abord, les premiers philosophes ont constatés la réalité de la guerre considérée comme incontournable. Thucydide, homme politique et stratège de la Grèce Antique mettait déjà en lumière le caractère inéluctable de la guerre du fait de la nature agonistique de l’Homme. L’État, en tant que mode d’organisation de nos sociétés est donc nécessairement confronté à cette réalité. Ainsi, la guerre est le plus souvent considérée comme la fonction principale de celui-ci. En effet, Jean Jacques Rousseau, dans « du Contrat social » considère la guerre comme l’attribut exclusif de l’état. C’est ce qu’affirme d’ailleurs le général de Gaulle lorsqu’il dit en 1952 « La défense ! C’est la première raison de l’État ». Cette centralité de l’état dans les relations internationales sera rendue le plus visible par le théoricien Carl von Clausewitz qui voyait la guerre comme la continuation de la politique par d’autres moyens. Elle est ainsi l’œuvre de « l’intelligence de l’état personnifié » disait-il, dans le génie des stratèges, tels que Napoléon ou plus tard Bismarck.

La guerre est donc une tâche essentielle de l’état, et dans le même temps c’est elle qui a révélé l’état. En effet, à partir de la fin de l’époque féodale, l’espace européen va connaitre un processus complexe de centralisation que Norbert Elias appelle « La dynamique de l’Occident ». Le moteur de cette construction étatique est la guerre : qu’il s’agisse de guerre entre seigneurs rivaux qui ont conduit à l’émergence d’un pouvoir central, ou biens des guerres avec des puissances étrangères qui ont également joué un rôle essentiel dans la consolidation et l’institutionnalisation de l’état. Ainsi, le processus de création de l’état moderne est intrinsèquement lié aux conflits armés qui s’y déroulent. On peut rapprocher cette idée du paradigme du war-making et state-making souvent assimilé à Charles Tilly qui considère que c’est l’activité guerrière qui a contribuée à l‘émergence de l’État et que c’est l’État qui a façonné une manière de faire la guerre menant à la guerre totale telle que la Première et la Deuxième guerre mondiale.

Ainsi, la guerre fit l’état pour que l’état fasse la guerre. Toutefois, il ne peut faire QUE la guerre puisque celle-ci s’oppose à la paix.

Ainsi, de nombreux auteurs proposent de réduire les causes de la guerre. Sont alors soulevés toutes les questions du droit international et du droit de la guerre. Ces questions ont conduit à l’établissement d’un droit internationale régissant la guerre, effective dans la convention de Genève et entériné par le système onusien qui consacre la légitime défense comme seule cause de la guerre et qui simultanément consacre la place centrale de l’état. Ainsi, l’état à un rôle majeur à jouer dans la mise en place de cette régulation.

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