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L'analyse linéaire de "Zulma"

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Par   •  24 Juin 2023  •  Analyse sectorielle  •  1 645 Mots (7 Pages)  •  248 Vues

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Les Amours jaunes,« À la mémoire de Zulma »

INTRODUCTION 

Le poème intitulé "À la mémoire de Zulma" est extrait du recueil "Les Amours jaunes" publié par Tristan Corbière en 1873. Tristan Corbière, de son vrai nom Édouard-Joachim Corbière, était un poète français du mouvement symboliste. Son œuvre se caractérise par son style complexe et énigmatique, explorant des thèmes tels que l'amour, la mélancolie et la marginalité.

Le poème en question se présente comme un sonnet de treize vers, ce qui témoigne d'une rupture avec la forme traditionnelle du sonnet. Il adopte une structure régulière avec des rimes embrassées et une alternance de vers octosyllabiques et décasyllabiques.

Les principaux thèmes abordés dans ce poème sont le pouvoir de l'argent, la jeunesse, l'amour, la perte et la nostalgie. Le personnage de Zulma, bien qu'il ne soit pas directement présent dans le poème, occupe une place centrale. Zulma est une prostituée dont la relation avec le narrateur est évoquée à travers des symboles et des métaphores.

Le poème explore la relation entre l'argent et la jeunesse, mettant en évidence la fragilité de la fortune et la fugacité de la jeunesse. La lune, qui apparaît comme un élément récurrent, est associée à la fois à la chance et à la détresse. À travers le personnage de la prostituée, Tristan Corbière examine comment le pouvoir de l'argent et la jeunesse peuvent être liés et éphémères.

Ainsi, la problématique de cette analyse linéaire sera la suivante : Comment Tristan Corbière associe-t-il le pouvoir de l'argent et la jeunesse à partir du personnage de la prostituée ?

Mouvement n°1 (3 premières strophes) :

Dans les trois premières strophes du poème, les deux personnages principaux sont le narrateur (le "moi" du poème) et Zulma, bien que son nom ne soit pas explicitement mentionné.

On peut affirmer que les deux personnages sont présents car le narrateur évoque leur relation dans la première personne du singulier. Le narrateur se décrit comme étant "jeune de vingt francs", faisant référence à sa situation financière modeste, tandis que Zulma est implicitement présentée comme étant "riche de vingt ans", soulignant la jeunesse de la prostituée.

Le prénom du personnage masculin n'est pas mentionné dans le poème. Cependant, la symbolique derrière cette absence peut être interprétée comme une volonté de représenter le narrateur comme un personnage universel, permettant aux lecteurs de s'identifier plus facilement à lui.

Les deux premiers vers du poème présentent une figure de style appelée chiasme. La structure de ces vers (sujet-verbe-complément-adjectif) est inversée dans la deuxième moitié des vers (adjectif-complément-verbe-sujet). Cette inversion des compléments des adjectifs crée un effet de symétrie et met l'accent sur le contraste entre les deux personnages en mettant en avant leur différence de richesse et de jeunesse.

Les temps utilisés dans les trois premières strophes sont principalement le passé composé et le passé simple. Le passé composé est utilisé pour décrire l'action passée de la mise en commun des fonds ("nous fîmes bourse commune"), tandis que le passé simple est utilisé pour évoquer les actions qui se sont déroulées dans le passé, telles que la formation d'un trou dans la lune et la perte de fortune. L'utilisation de ces temps verbaux suggère que ces événements appartiennent au passé et renforce ainsi la nostalgie et la perte ressenties par le narrateur.

Le champ lexical de l'argent est présent à travers l'expression "vingt francs" et la référence à la "fortune". L'expression "faire un trou dans la lune" est une métaphore qui signifie dépenser de l'argent de manière insouciante ou sans retour sur investissement. Selon Corbière, l'argent occupe un rôle éphémère au sein d'une relation, capable de disparaître rapidement, tout comme le trou fait dans la lune qui représente la perte de leur fortune commune. Il suggère également que la relation entre le narrateur et Zulma est une relation basée sur l'argent et peut être interprétée comme une relation transactionnelle, implicite dans la mention de la prostitution.

Les vers 5 et 8 font référence à la lune, qui est associée à la chance et à la détresse. Ils soulignent la précarité de la fortune et de la jeunesse, symbolisées par les vingt ans et les vingt francs, qui sont sujets à des fluctuations et des pertes inattendues. Ils établissent ainsi un lien direct avec le sujet du poème, qui explore la fragilité de la jeunesse et du pouvoir de l'argent.

La lune symbolise à la fois la chance et la détresse dans le poème

L'utilisation de l'interjection "Hélas" dans le vers 10 exprime un sentiment de regret ou de tristesse. Cette interjection renforce le ton mélancolique et souligne la déception du narrateur face à la perte de sa fortune et de sa jeunesse. De plus, la ponctuation, marquée par des points de suspension et un point d'exclamation, contribue à créer une atmosphère de désillusion et de désarroi.

Le poème utilise également des ellipses dans les vers 6 et 9, où certains mots sont omis pour créer une rupture ou une suspension dans le discours. Cela renforce l'aspect fragmenté de l'expérience racontée par le narrateur, et cela peut également représenter les lacunes ou les pertes dans la relation avec Zulma.

Dans ces premières strophes, le poème met en avant la précarité de la fortune, symbolisée par l'argent, et la fugacité de la jeunesse. Le narrateur associe les vingt francs, représentant la richesse matérielle limitée, avec les vingt ans, symbolisant la jeunesse éphémère. Cette relation entre l'argent et la jeunesse est explorée à travers le personnage de la prostituée Zulma, mettant en lumière une relation basée sur le pouvoir de l'argent et la transaction.

Mouvement n°2 (quatrième strophe) :

La quatrième strophe caractérise la jeunesse comme étant évoquée à travers le prisme du temps écoulé. La répétition de l'expression "bien des" tout au long de la strophe souligne l'idée d'une jeunesse passée, évoquant le passage du temps et la multiplication des expériences. Cela suggère une conception de la jeunesse comme étant éphémère, fuyante et sujette à la transformation.

Le paradoxe entre la "vierge" et la "prostituée" dans la strophe met en lumière la dualité de Zulma en tant que personnage. D'une part, elle est décrite comme étant "toujours vierge et vingt ans", soulignant son innocence ou sa pureté. D'autre part, elle est présentée comme étant "colonelle à la Commune", ce qui fait référence à son rôle dans des activités révolutionnaires ou peut-être politiques. Ce paradoxe met en évidence la complexité et la dualité de la nature humaine, montrant comment une personne peut incarner des facettes contradictoires.

Ce paradoxe peut également être lié à un autre grand sujet abordé par le poème, à savoir la marginalité. En présentant Zulma comme une prostituée et une figure liée à la Commune, le poème explore les marges de la société, les individus qui se trouvent en dehors des normes et des conventions.

La vie de Zulma semble représenter un tourbillon sans fin en raison de l'utilisation de termes tels que "bien des printemps", "bien des vingt ans", "bien des vingt francs". Ces répétitions soulignent la récurrence et la répétition des événements, créant une impression de cycles incessants. Cela renforce l'idée que Zulma est prise dans une spirale où les mêmes schémas se répètent, peut-être en référence à son métier de prostituée ou à sa vie marquée par la marginalité et l'instabilité.

Le dernier vers du quatrain, "Nuit gratuite sans trou de lune", peut être interprété de différentes manières. Il peut faire référence à une nuit sombre et sans espoir, soulignant le désespoir et la vacuité de la vie de Zulma. Le "trou de lune" manquant peut représenter la perte de chance ou de fortune, accentuant ainsi la notion de précarité et de déchéance associée à son existence. Il peut également suggérer que la nuit est dépourvue de tout éclat, privée de la lumière symbolique de la lune, symbolisant l'absence de bonheur ou de satisfaction dans la vie de Zulma.

Mouvement n°3 (dernière strophe) :

La répétition de l'adverbe "puis" suivi de la préposition "après" permet de souligner le passage du temps et la succession d'événements dans la vie de Zulma. Cette répétition crée une structure rythmique et met en évidence la séquence temporelle des événements, soulignant leur enchaînement et leur continuité. Elle renforce également l'idée que la vie de Zulma est marquée par une série de changements et de transitions.

Le premier vers de la dernière strophe, "Puis après : la chasse aux passants", évoque une nouvelle étape dans la vie de Zulma. Il suggère qu'après une période précédente, représentée par la prostitution ou son rôle dans la Commune, elle s'engage dans une activité différente : la recherche des passants, peut-être dans le but de gagner sa vie de manière différente ou de survivre.

Le destin tragique de Zulma est caractérisé par le fait qu'elle est confrontée à des circonstances difficiles et à des épreuves successives. Le poème évoque sa vie marquée par des fluctuations constantes, des pertes financières, des cycles répétitifs et une précarité persistante. Cette caractérisation tragique est renforcée par l'utilisation de termes tels que "la chasse aux passants", qui peut évoquer une quête désespérée ou une lutte pour la survie, ainsi que par la mention de la "fosse commune", évoquant la mort et l'oubli.

La neutralité froide du poète se ressent à travers le ton du poème et la manière dont il présente les événements. Le poète semble détaché émotionnellement de la situation de Zulma, décrivant les événements de manière objective, presque clinique. Cette neutralité peut contribuer à renforcer l'atmosphère mélancolique et désillusionnée du poème, où la tragédie de Zulma est observée sans aucun jugement moral.

CONCLUSION 

En conclusion, Tristan Corbière, à travers le poème "À la mémoire de Zulma", met en évidence la fragilité de la fortune et de la jeunesse, ainsi que la relation entre le pouvoir de l'argent et la jeunesse éphémère. Ce poème nous invite à réfléchir sur les valeurs changeantes de notre société et sur les conséquences de l'association de la jeunesse et de l'argent. Il nous pousse à prendre conscience de la précarité de ces éléments et à questionner les dynamiques sociales qui en découlent.

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