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Les différentes catégories d’élément moral : Les fautes non-intentionnelles délictuelles

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Par   •  22 Février 2023  •  Cours  •  16 952 Mots (68 Pages)  •  231 Vues

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Titre 2 : La réalisation des infractions

Sous-titre 2 : L’élément moral de l’infraction

Chapitre 2 : Les différentes catégories d’élément moral

Section 2 : Les fautes non-intentionnelles délictuelles

L’élément moral se caractérise par l’intention ou la non-intention. Article 121-3 du Code pénal. Ce sont les exceptions des alinéas 2 à 4 qui vont être étudiées. Il y a une multiplication de la prise en compte de la faute non-intentionnelle en droit pénal comme les accidents de la route. On a ici un rapport étroit avec le droit civil. Si le droit civil procède à une mutualisation des risques, en droit pénal, on cible le responsable pour individualiser la répression. En droit civil, faute, dommage et lien de causalité.

Dans l’élément matériel, on inscrit le dommage. D’ailleurs, le dommage n’est pas étudié en droit pénal général mais il reste important. La gravité du dommage permet de décliner des infractions différentes de son point de vue. On fait un trait le lien de causalité. Sans lien de causalité entre la faute et le dommage, il ne peut pas y avoir de répression. Ensuite, dans la faute, comportement matériel mais il y a aussi une dimension psychologique. La faute est donc plus dans l’élément moral. Le fait que le lien de causalité appartienne à l’élément matériel et la faute au matériel et au moral conduit à un raisonnement différent du droit civil. Le 121-3 s’appuie sur cette logique.

Sous-section 1 : Le lien de causalité

Il est la condition sine qua non de la qualification des fautes non-intentionnelles. Selon la loi du 10 juillet 2000 qui a réformé le 121-3, le lien de causalité est l’axe de classification des fautes non-intentionnelles. Elle distingue deux types de causalité. Elle distingue entre le direct et l’indirect. Qu’il s’agisse de lien de causalité direct ou indirect, il faut nécessairement que le lien de causalité soit certain.

§1 : La certitude du lien de causalité

Le lien de causalité doit toujours être certain. On ne condamne jamais sur le fondement de simples probabilités ou possibilités. Le doute profite toujours à la personne poursuivie.

A. La définition générale

La certitude n’est pas définie par les textes, ni par la jurisprudence mais derrière cette notion se cache une exigence de continuité juridique et logique. La certitude s’applique aussi bien à la causalité directe et à l’indirecte. Trois arrêts rendus le 5 octobre 2004 le disent ; la certitude est appliquée à tous les types de causalité. Dans le premier arrêt, c’est un accident. Un piéton est engagé sur un passage protégé avec le feu vert. Une voiture qui tourne le renverse et le conducteur explique qu’il avait le soleil dans les yeux. Le piéton est blessé à la jambe et il est emmené à l’hôpital et lors de l’intervention, il décède suite à l’infection nosocomiale. L’automobiliste est poursuivi pour homicide involontaire. Les juges du fond le condamnent. La Cour de cassation procède à une cassation de l’arrêt de condamnation. Ce qu’il faut comprendre de cet arrêt est que la certitude exige une continuité logique dans l’établissement du lien de causalité. Dans cet arrêt, les juges du fond ont identifié la cause du décès. Or, à aucun moment n'ont-ils établi un lien juridique entre la faute reprochée et la mort de la victime. Les juges du fond auraient dû démontrer que la faute non-intentionnelle avaient causé des blessures nécessitant une intervention qui avait permis l’infection.

Dans le second arrêt, il s’agissait ici d’une moissonneuse-batteuse dont l’huile s’était enflammée et avait donc causé un incendie qui a détruit 600 hectares. Deux pompiers sont décédés dans un retour des flammes. On a poursuivi le propriétaire de l’engin pour homicide involontaire. On lui reprochait de ne pas avoir respecté le carnet d’entretien de la machine agricole. Les juges du fond l’ont condamné en considérant que la faute avait été la cause de l’incendie qui a nécessité l’intervention qui a causé la mort des victimes.

Le troisième arrêt repose sur un cumul de causalités. Il s’agissait d’une personne qui avait loué un jetski et la location est soumise à une réglementation particulier. Le loueur avait accepté de louer l’engin à une personne sans permis bateau. Il a percuté de plein fouet un autre et a tué la passagère. On engage ici des poursuites du chef d’homicide involontaire contre le conducteur de jetski. Mais on poursuit aussi le loueur pour homicide involontaire avec une faute d’irrespect du règlement en lien de causalité indirecte avec le dommage. Les juges du fond entrent en voie de condamnation. Le pourvoi est rejeté car la Cour de cassation considère que la certitude a été prouvée par les juges.

Sous ce terme de certitude, il faut donc chercher une chaîne de causalité et s’assurer de sa continuité logique qui doit être constatée juridiquement par les juges. La certitude est donc souvent considérée comme une forme de continuité. Cela permet de lui donner une définition plus large. Il est très rare que les juges considèrent qu’il n’y a pas de certitude car ils ne parviennent pas à établir la continuité. 4 mars 2008, Chambre criminelle. Il s’agissait d’une personne qui a blessé mortellement l’adjoint au maire à la carabine pendant un épisode de trouble mental. L’expertise a montré que la personne était en pleine crise et vivait une abolition du discernement. On ne pouvait retenir sa responsabilité pénale. Ici, le fait que cette personne avait parfois des accès de violence a été signalé à la DAS. Les deux fonctionnaires qui ont reçu le signalement ont été mis en examen pour homicide involontaire. La Cour d’appel les a condamnés en considérant qu’ils s’étaient abstenus d’ordonner une expertise donc on n’a pas pu l’hospitaliser et elle a donc pu tirer et tuer. On est dans le cadre d’un lien indirect. La Cour de cassation, ce qui est rare, a cassé l’arrêt en relevant l’absence de certitude entre la faute reprochée au prévenu et le décès de la victime. On est ici dans une accumulation de probabilités.

Les hypothèses d’accidents médical, scientifique, technique peuvent amener un nombre élevé de victimes. Par exemple, pendant la pandémie, les ministres de la santé ont-ils commis une faute ? On a ici un arrêt clair sur la manière dont il faut apprécier la certitude du lien de causalité dans le cadre de ces accidents. 20 novembre 2012, Chambre criminelle. Il s’agit en l’espèce de l’explosion de la centrale de Tchernobyl. Un nuage radioactif a traversé l’Europe. En France, on a un service central de protection contre les rayons ionisants et le directeur a dit que le nuage s'était arrêté à la frontière suisse. Plusieurs personnes ont porté plainte quelques années plus tard et ont considéré que la surcharge d’iode avait entrainé des complications médicales (infections ou cancers). L’empoisonnement a été écarté. La Chambre a confirmé l’arrêt de non-lieu total. Elle se fonde sur l’absence de certitude du lien de causalité et donne une indication sur l’appréciation du lien de causalité. La certitude du lien de causalité s’apprécie en l’état des connaissances scientifiques à l’époque des faits. Ici, c’était le point principal sur lequel s’appuyait la défense développée par les ministres pendant le covid par exemple. Pour cette arrêt de 2012, peut-on retenir la tromperie sur les qualités essentielles de la marchandise comme dans l’affaire du sang contaminé ? Non, car elle ne peut être retenue qu’en l’échange d’un bien ou d’un service payant. On voit ici une jurisprudence précise et exigeante avec la certitude du lien de causalité.

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