Légalité criminelle
Dissertation : Légalité criminelle. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Marie Hamon • 29 Octobre 2024 • Dissertation • 2 376 Mots (10 Pages) • 47 Vues
Droit pénal général: |
Nullum crimen nulla poena sine lege, pas de crime, pas de peine, sans loi.
Cet adage latin, consacré aux articles 111-2 et 111-3 du code pénal, signifie que sans loi, aucune peine, ni aucun crime (au sens large du terme) ne peut exister. En d’autres termes, un individu ne saurait être poursuivi, condamné sans qu’il y ait un texte qui détermine l'incrimination et la peine applicable avant qu’il commette ou soit suspecté d’avoir commis l’acte reproché. Mais pourquoi ne peut-il y avoir d’incriminations et de peines sans loi? Pour protéger l’individu contre l’Etat par nature répressif. La légalité criminelle est conçue depuis longtemps comme un combat pour la liberté individuelle et contre l'arbitraire[1]. Le droit pénal est amené -certes au nom de l'intérêt général- à priver des individus de la jouissance de certaines libertés. Ces libertés font partie des libertés fondamentales, c’est pourquoi un garde-fou est nécessaire. Ce garde-fou est le principe de légalité criminelle. Le principe de légalité criminelle a valeur constitutionnelle depuis la décision du Conseil constitutionnel du 19 et 20 janvier 1981. Le principe de légalité criminelle protège l'individu à travers des caractéristiques que la loi doit revêtir pour être conforme à ce principe constitutionnel. En effet, la loi doit être claire, précise afin de garantir la sécurité juridique. La loi pénale étant une loi répressive, pouvant conduire à supprimer une liberté de manière plus ou moins temporaire, l’incrimination et la peine qu’elle contient doivent être prévisibles et ne peuvent pas être une solution improvisée. Autrement dit, la légalité criminelle est un des principes les plus importants en matière de droit pénal puisqu’il garantit l’équilibre entre le respect des libertés des individus et l’Etat répressif par nature. L’importance de ce principe réside notamment dans sa concrétisation dans différents textes importants notamment à l’article 8 de la Déclaration des Droits de l’homme et du citoyen, à l’article 7 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ou encore à l'article 15 Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Bien que cette consécration démontre l’importance de ce principe, certains auteurs de doctrine comme P. Conte estiment que le principe de légalité criminelle est fragilisé voire en déclin. A l’inverse d’autres estiment que ce principe tend à évoluer de manière positive.
Dans quelle mesure l'appréhension actuelle de la légalité criminelle témoigne-t-elle d’une évolution du concept?
Il s’agira de démontrer que le déclin de la légalité criminelle (A) témoigne en réalité d’une mutation de ce principe (B).
- Le déclin du principe de légalité criminelle
Le déclin du principe de légalité s’explique d’une part par le déclin législatif du principe de légalité criminelle (A) renforcé par le déclin jurisprudentielle de la légalité criminelle (B).
- Le déclin législatif du principe de légalité criminelle
Le déclin du principe de légalité criminelle est dû notamment à un déclin législatif du principe de légalité criminelle. En effet, comme défini précédemment, les objectifs du principe de légalité criminelle sont notamment la clarté, la sécurité juridique, la prévisibilité juridique ou de plus plus, le législateur contrevient à ces objectifs participant ainsi au déclin de la légalité criminelle. En effet le législateur, dès qu’une affaire de nature pénale est fortement médiatisée et emporte l’opinion publique, il va avoir tendance à réagir par l’adoption de lois. En effet, le problème devient politique et par la loi, le législateur va tenter de “régler” ce problème. Cependant, cela entraîne une boulimie législative puisque depuis des années le législateur ne cesse de rédiger et d’adopter de nouvelles lois pénales. Cette boulimie législative entraîne deux conséquences. Le première consiste à ce que les individus censés connaître la loi puisque nul n’est censé ignorer la loi, méconnaissent la loi. Puisqu’il y a de plus en plus de lois pénales adoptées, la connaissance de toutes les lois, incriminations et peines encourues est très compliqué. Cela contrevient au principe de légalité criminelle puisque sans loi, il n’y a ni peine, ni crime mais la connaissance même de la loi est essentielle pour que le principe de légalité criminelle soit respecté. De plus, cette boulimie législative entraîne une perte de qualité rédactionnelle des lois pénales. En effet, plus le législateur adopte des lois, moins bonne est la qualité rédactionnelle de ce dernier si bien que cela porte atteinte au principe de légalité criminelle et renforce sa fragilisation, son déclin. En effet, dans un arrêt du 4 mai 2012, le Conseil constitutionnel, suite à une question prioritaire de constitutionnalité relatif à l’article 222-33 du code pénal sur le harcèlement sexuel, a abrogé cet article au motif qu’il n’était ni assez clair, ni assez précis et qu’il portait par conséquent atteinte au principe de légalité criminelle. De plus “l’infraction suppose l’existence d’un texte, mais il ne s’agit pas toujours d’un texte de loi”[2]. En effet, d’après les articles 34 et 37 de la Constitution, le pouvoir exécutif est compétent en matière de contravention. Cela contribue au déclin du principe de légalité puisque la légalité criminelle formelle au sens d’un texte entendu comme législatif n’est plus exigé. L’exigence de légalité formelle s'est transformée en exigence de légalité matérielle. Ainsi, la jurisprudence détient les qualités matérielles de la loi.
- Le déclin jurisprudentielle du principe de légalité criminelle
Le juge pénal est tenu d’appliquer la loi de manière stricte conformément au principe de légalité criminelle et à l’article 111-4 du Code pénal. En effet, le juge ne peut interpréter la loi de manière large ou comme il le souhaite en fonction du cas d'espèce en matière pénal comme ça peut être le cas en matière civil. Il se doit d’interpréter la loi de manière stricte afin de garantir la prévisibilité juridique et la sécurité juridique du justiciable et ce toujours dans l’idée de conformité avec le principe de légalité criminelle. Puisque, la loi doit être prévisible, le jugement doit l’être tout autant. Cependant, on assiste à un déclin du principe de légalité criminelle en matière jurisprudentielle. En effet, le juge a de plus tendance à apprécier la loi et non plus à l’appliquer strictement. Cependant, l’appréciation du juge est imprévisible donc arbitraire ce qui est incompatible avec le principe de légalité criminelle et contribue à son déclin.[3] La solution donnée par le juge est devenue imprévisible participant au déclin de la légalité criminelle car un des objectif de cette légalité est la prévisibilité de la loi pénale.”Le moment venu, le juge te le dira”, voilà la réponse apportée aujourd’hui à un citoyen qui se demande si son acte est incriminé.[4] Cette réponse signifie le non-respect de la prévisibilité juridique et impacte négativement la sécurité juridique du justiciable pourtant défendue par le principe de légalité juridique qui protège l’individu et le respect de ses libertés par l’Etat par nature répressif. De plus, bien que la jurisprudence n’est plus rétroactive d’après son revirement de jurisprudence en 2020 par sa chambre criminelle suite durcissement au d’une jurisprudence, la jurisprudence conduit quand même à affaiblir le principe de légalité criminelle dans sa conception formelle. En effet, le principe de légalité, c’est la loi mais tout comme le règlement, la jurisprudence est considérée comme faisant partie de la loi au sens de l’article 111-2 et 111-3 du code pénal. Ainsi, la jurisprudence affaibli et contribue au déclin du principe de légalité criminelle dans sa conception formelle.
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