Oral A une passante de Baudelaire
Fiche : Oral A une passante de Baudelaire. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Louis8558 • 22 Juin 2022 • Fiche • 2 109 Mots (9 Pages) • 427 Vues
« A une passante », Charles Baudelaire
La rue assourdissante autour de moi hurlait.
Longue, mince, en grand deuil, douleur majestueuse,
Une femme passa, d’une main fastueuse
Soulevant, balançant le feston et l’ourlet;
Agile et noble, avec sa jambe de statue.
Moi, je buvais, crispé comme un extravagant,
Dans son œil, ciel livide où germe l’ouragan,
La douceur qui fascine et le plaisir qui tue.
Un éclair… puis la nuit! – Fugitive beauté
Dont le regard m’a fait soudainement renaître,
Ne te verrai-je plus que dans l’éternité?
Ailleurs, bien loin d’ici! trop tard! jamais peut-être!
Car j’ignore où tu fuis, tu ne sais où je vais,
Ô toi que j’eusse aimée, ô toi qui le savais!
Introduction : Ce poème appartient à la section “Tableaux parisiens”. C’est une lente plongée dans le spleen, la ville est surtout le lieu de la misère humaine et sociale. Une rencontre fugitive éclaire parfois un chemin vers la beauté, mais la solitude et l’ennui persistent. La section “Tableaux parisiens” est insérée dans la seconde édition des Fleurs du Mal en 1861.
C’est un sonnet, rédigé en alexandrins. Il comprend quatorze vers (2 quatrains, 2 tercets). Le dernier vers du tercet est souvent appelé “chute”.
Les axes du poème = 4 strophes = 4 mouvements.
Problématiques :
Comment Baudelaire fait d’une anecdote triviale (Ordinaire, commune, banale) un moment de poésie?
1er quatrain: Le mouvement de la rue
*Le cadre de la rencontre est la ville de Paris, une rue passante, bruyante, dans laquelle le poète est probablement assis à une terrasse de café = cadre moderne.
« La rue assourdissante autour de moi hurlait » hypallage (figure qui consiste à attribuer à certains mots d’une phrase ce qui convient logiquement à d’autres mots de la même phrase). Le mot “assourdissant” occupe plus de la moitié du premier hémistiche, comme le bruit qui occupe l’espace. Toutes les voyelles sont convoquées “a, u, i, ou, an, oi = cacophonie + hiatus (Rencontre de deux voyelles prononcées, à l'intérieur d'un mot ou entre deux mots énoncés sans pause) qui participent à cette cacophonie.
-figures antithétiques “assourdissante » « hurlait”/“douleur majestueuse”.
*forte impression de mouvement :
-rythme du v2, accumulation d’adjectifs mélioratifs “ Longue, mince, en grand deuil, douleur majestueuse »/participes présents (actions simultanées)= mouvement + effet d’instantanéité.
-enjambement : « Une femme passa, d’une main fastueuse/Soulevant, balançant le feston et l’ourlet » traduit l’amplitude du mouvement.
* champ lexical de la noblesse “grand, majestueuse” et du luxe “fastueuse, feston, ourlet”
* « passa »passé simple, temps de l’événement, qui annonce le caractère unique, transitoire et fugitif de la rencontre.
* vision globale de la femme qui se recentre sur sa jambe puis son œil dans le second quatrain.
2ème quatrain: La bizarrerie
(C’est une des grandes notions constituant le Beau selon Baudelaire)
* “la jambe de statue” = s’oppose au mouvement, évoque l’immobilité, et rappelle cette figure de la beauté poétique évoquée dans le poème « La Beauté ». Cette passante hérite de la beauté académique, mais elle marche, « elle vit ».
* Présence du poète : “moi” il est le locuteur, le narrateur. Hyperboles : « crispé comme un extravaguant » (sons K, S, R, durs). Extravagant : fou, délirant (du latin “extra” et du verbe Vagor qui signifie “errer”). Ce mot concerne celui qui sort des chemins, est-ce le poète qui ne respecte pas les règles canoniques du Beau ? (Canon : model idéal auquel il faut se référer). Le poète est dans l’excès “crispé” (crisper : Resserrer les muscles sur eux-mêmes, de façon souvent convulsive) et s’enivre de cette femme, comme il le ferait de l’alcool. Ce sont des images qui donnent du coup de foudre comme si le coup de foudre s’abattait sur nous, comme si le coup de foudre est tombé come un problème comme une fatalité qui s’abattait sur les personnages. Le coup de foudre est un topos
*« Dans son œil, ciel livide où germe l’ouragan » figure antithétique qui oppose le calme (ciel livide) et la tempête (l’ouragan(une métaphore) ), la mort (livide) et la vie (germe), l’immobilité et le mouvement.
*Ces contraires saisissent le poète, il semble la désirer et la craindre : “la douceur qui fascine et la douleur qui tue” (COD du verbe buvait) qui est aussi un oxymore (douceur/fascine, plaisir/tue), avec une construction de phrase en parallélisme (2 propositions relatives) = antithèse finale entre plaisir et deuil, pour marquer l’ambiguïté troublante de cette femme. Apothéose dans l’hyperbole “le plaisir qui tue “qui signifie mourir de plaisir = Le spleen (mélancolique souffrance) a quelque chose de beau chez Baudelaire. Le poète semble fasciné par le potentiel érotique de cette femme, qui ne demande qu’à se déchaîner.
*Dans cette passante se matérialise une allégorie (représente de façon concrète et imagée divers aspects d’une idée abstraite) de la beauté associant des contrastes: l’immuable et le transitoire, l’amour et la mort, la douceur et la violence, le plaisir et la souffrance, la noblesse et la trivialité, la froideur extérieure et le feu intérieur. Cette nouvelle façon de définir le beau poétique nous amène vers une modernité poétique loin de la Beauté académique. Voir « Le joujou du pauvre » dans Le Spleen de Paris et l’extrait Peintre de la vie moderne de Baudelaire.
Tercet 1 : le coup de foudre
*Le coup de foudre = topos (sujet littéraire qui revient souvent jusqu’à constituer un thème récurrent et attendu dans la littérature) : champ lexical du regard qui charme « fascine » au sens propre les protagonistes, violence de l’effet « ouragan » « éclair » « crispé ».
*Le choc de la rencontre est perceptible “Un éclair...puis la nuit! - Fugitive beauté”, métaphore explicite de l’éclair, coup de foudre soudain qui illumine le poète.
Que traduisent les points de suspension?
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