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« Cultiver ses désirs » ne nous engage-t-il pas cependant bien souvent à les produire soi -même , et de ce fait à les maîtriser ? Plus encore, « cultiver ses désirs » n’est-ce pas engager une force dans le choix de ceux qui nous apparaisse

Dissertation : « Cultiver ses désirs » ne nous engage-t-il pas cependant bien souvent à les produire soi -même , et de ce fait à les maîtriser ? Plus encore, « cultiver ses désirs » n’est-ce pas engager une force dans le choix de ceux qui nous apparaisse. Recherche parmi 300 000+ dissertations

Par   •  10 Décembre 2022  •  Dissertation  •  2 351 Mots (10 Pages)  •  334 Vues

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Cultiver ses désirs

                « Comme le fruit se fond en jouissance, comme en délice il change son absence dans une bouche où sa forme se meurt » nous dit Paul Valéry dans Cimetière marin. Voilà une analogie entre le désir et le fruit qui semblent tous deux provenir de la terre.

Alors que le désir désigne la tendance et tension vers un objet dont nous souhaitons la possession, le terme « cultiver » renvoie en premier lieu au fait de travailler la terre, afin d’y faire pousser des plantes et ainsi l’enrichir . Il peut également faire référence à l’enrichissement personnel, au fait de s’élever au moyen de l’enseignement, de l’apprentissage.

« Cultiver ses désirs » ne nous engage-t-il pas cependant  bien souvent à les produire soi -même , et de ce fait à les maîtriser ? Plus encore, « cultiver ses désirs » n’est-ce pas engager une force dans le choix de ceux qui nous apparaissent les plus opportuns, les plus profitables ?

Si grand soit-il, un tel péril ne saurait pourtant occulter l’évidence selon laquelle il doive s’agir de « nos propres » désirs et non de ceux qui nous sont insufflés par entourage et société . Auquel cas la récolte pourrait s’avérer être de mauvaise qualité .  N’est-il pas si non nécessaire à l’équilibre de la société, du moins à notre propre épanouissement  que de s’y atteler ?  Dès lors , il apparaît  que tous les moyens doivent être mis en oeuvre  pour se les approprier si l’on considère le sens premier du terme « cultiver » et pour s’élever jusqu’à soi-même pour ce qui est du second.                    

               Faut-il dans ces conditions cultiver ses désirs ?

               Qu’est-ce donc dans un premier temps que de cultiver ses désirs et quelles sont les raisons qui nous engagent à le faire ? Est-il possible sinon souhaitable de cultiver ses désirs ? Quels désirs faut-il dès lors cultiver et de quelle manière ?

***

             Il apparaît en première analyse que cultiver ses désirs consiste à en faire bon usage tel que le préconisent les sagesses antiques. Puis, il s’agirait de les élever en apprenant à désirer. Enfin, il faudrait les acheminer vers un désir souverain nourri par la raison. Un tel besoin émergerait conséquemment à la multitude de désirs qui s’offrent à nous et à l’éventuel excès qui les accompagne .  

             Sans doute cultiver ses désirs consiste à se contenter des plus bénéfiques à l’homme , ceux qui lui confèrent la quiétude nécessaire pour vivre dans un monde harmonieux .  Cultiver son désir nous engage alors à aller vers une forme de perfection , de sagesse . Il faut de ce fait soit éradiquer le désir ou le reconduire au minimum et le maitriser .  Aussi , Épicure suggère -t-il dans sa Lettre à Ménécée de distinguer les désirs qui nous perdent de ceux qui ne contiennent pas de danger . Les désirs naturels et nécessaires, parce que relatifs à la nature  sont alors ceux qu’il faut privilégier . Par exemple , Le cris de la chair est une alarme naturelle qui nous renseigne sur la production d’un déséquilibre , une perte atomique , des atomes manquent en raison de la dépense d’énergie qui accompagne nos actions . Cultiver ses désirs c’est rendre non essentiel ce qui est de l’ordre de la complexité pour vivre heureux .

           De la même manière,  l’homme est le seul animal à même de cultiver ses désirs , car seul animal doté de raison . Il arrive alors , s’il ne le fait pas qu’une concurrence de désirs émerge et laissée place à de nombreuses contradictions . Contradictions qui selon  Aristote dans son traité De l’âme ne se manifestent qu’en cas d’absence de la raison . Ainsi , cultiver ses désirs suppose l’usage de la raison : il existe une façon raisonnable de désirer en chaque circonstance . De plus , Le sage est celui qui parce qu’il désir raisonnablement qu’il ne trouve pas de contradiction dans la pluralité de ses désirs on pourrait presque dire qu’il désire au singulier . Comme pour Épicure , il faudrait donc cultiver non pas ses désirs mais son désir .

              Si cultiver ses désirs passe par une discrimination des désirs ainsi que par le choix raisonné d’un nombre restreint d’objets de désir , il n’en demeure pas moi qu’élever ses horizons d’attente soit primordial. C’est ce que préconisent les surréalistes dont l’idée première est celle d’un déconditionnement du désir . Il va s’agir dans dans l’Autoportrait au singe de Frida Kahlo de réévaluer le désirable depuis un objet du désir qui a une valeur particulière dans le monde occidental : le corps féminin .Il va s’agir de penser ce qu’est un corps désirable et donc de dégager une autre idée du désirable en représentant son corps débarrassé d’un standard idéal  supposé lui conférer le caractère du désirable. Cultiver ses désirs passe alors par une remise en cause du désirable et consiste à s’engager sur une voie permettant de libérer le désir des stéréotypes .

             Cependant , quelles sont les raisons qui nous engagent à envisager un culture de ses désirs si ce n’est l’excès constaté par Cicéron dans ses Tusculanes  qu’il  qualifie d’intempérance , cause de tous les maux. Un même excès est perceptible de nos jours à travers la multitude d’objets de désirs présentée par la société de consommation que décrit Boris Vian dans sa Complainte du progrès  . Ces mêmes objets constituent alors autant de moyens de perdition et d’aliénation du désir.

Ainsi cultiver ses désirs provient de la nécessité de reconquérir son désir pour à terme retrouver sa souveraineté .

***

                En second lieu , il s’agit de questionner la possibilité et le caractère souhaitable de cultiver ses désirs . Les désirs sont-ils cultivables ?

                 Il apparait d’abord qu’il soit possible de cultiver ses désirs à conditions que ceux-ci émanent de notre propre personne et qu’ils ne soient pas conditionnés par notre entourage ou la société . Suis-je libre lorsque je désire ? Qui désire en moi ? Est-ce que lorsque je désire , alors que j’ai l’impression de désire à la première personne , n’y a -t-il pas des déterminants sociaux , extérieurs ? C’est alors que le pronom possessif « ses » est à analyser . En effet , nous dit Schopenhauer dans ses Compléments que lorsque l’on croit désirer à la première personne , c’est l’espèce qui désire en nous . Par exemple , pour une femme qui n’éprouve pas le désir d’avoir d’enfants jusqu’à un certain âge , un changement de désir soudain est prévisible puisqu’en réalité ce qui désire à travers nous c’est l’espèce .  Il  souligne que ce que veut l’espèce c’est se reproduire. Dans ce cas précis , il ne s’agit plus de cultiver « ses propres » désirs mais plutôt de cultiver « les » désirs .  

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