L’élection, condition suffisante à l’identification d’un régime démocratique?

Selon Montesquieu « Le grand avantage des représentants c’est qu’ils savent discuter les affaires, le peuple n’y est point du tout propre, ce qui forme un des grands inconvénients de la démocratie. (...) Il ne doit entrer dans le gouvernement que pour choisir les représentants ; ce qui est très à sa portée ». Pour mieux cerner les enjeux de cette affirmation, il convient tout d’abord de tenter de définir ce qu’est la démocratie.

La démocratie est le contraire d’une dictature ou d’une monarchie. Étymologiquement, la démocratie est issue du terme grec demos-kratos (littéralement peuple et pouvoir). La démocratie peut ainsi être appréhendée comme le pouvoir appartenant au peuple. L’usage politique et juridique du terme ne s’est effectivement jamais écarté de ce sens premier : la démocratie c’est le pouvoir du peuple, c’est-à-dire, concrètement, de l’ensemble des citoyens statuant majoritairement. Dans son discours prononcé en 1864, l’ancien président Abraham Lincoln défini la démocratie comme le gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple. C’est alors la définition la plus reprise de la démocratie car elle révèle l’origine, à savoir le peuple et l’exercice du pouvoir démocratique au profit du peuple. Dans la démocratie occidentale c’est l’élection qui permet le pouvoir.

L’élection quant à elle est la désignation, par le vote d'électeurs, de représentants (une personne, un groupe, un parti politique) destinés à les représenter ou occuper une fonction en leur nom. Cette élection se déroule dans le cadre d’une compétition ouverte et pluraliste, la démocratie impliquant une participation démocratique du citoyen mais aussi une organisation du pouvoir.

La démocratie prend ses racines dans les réformes engagées autour de la cité d’Athènes dans la Grèce antique autour du Vème siècle av. J.C. La démocratie athénienne est aujourd’hui considérée comme ayant été une forme de démocratie direct; en effet tous les citoyens athéniens avaient le droit de prendre la parole et de voter les lois de la cité à l’Ecclésia. Pendant des siècles, les idéaux démocratiques ont évolué au gré des guerres, des traités et révolutions qui ont secoué le monde occidental. On ne peut comparer la cité antique à la nation moderne; celle-ci est infiniment plus vaste et comprends des populations beaucoup plus nombreuses. Les solutions d’autrefois ne sont donc plus applicables.

Le système représentatif est devenu une nécessité, et il est difficile de le concilier avec la démocratie proprement dite, c’est-à-dire la démocratie directe. La politique joue dans la vie des citoyens contemporains un rôle bien moindre que celle des citoyens anciens. De nos jours, les démocraties sont des démocraties représentatives. Il reste cependant de nombreuses manières de concevoir le peuple, la volonté générale ou encore l’opinion…

En effet, le nombre de démocraties ne cesse d’augmenter avec aujourd’hui plus de la moitié des pays du monde démocratiques. Ainsi plus de la moitié de la population mondiale vit désormais dans une forme de démocratie. Pourquoi dit-on « une forme de démocratie »? Car en effet la démocratie peut prendre des formes multiples. Comme exemples extrêmes, on pourrait citer les démocraties populaires, qui se sont établies pendant plusieurs décennies au XXème siècle en Europe de l’Est et aujourd’hui encore en Chine, ou, une forme de démocratie particulière; la république islamique d’Iran. Ce sont des régimes dans lesquels on vote, on élit des représentants, mais dans lesquels la réalité du pouvoir est très différente de celle qui domine dans les démocraties pluralistes.

Les démocraties pluralistes sont, de nos jours, celles où les libertés publiques sont le mieux assurées. Malgré cela, de nombreux facteurs interviennent et peuvent conduire à questionner la réalité de la représentativité des élus, et inciter à considérer la démocratie, en même temps que l'égalité des droits qu'elle suppose, davantage comme un idéal que comme un fait acquis. De plus l’élection étant le présupposé direct de la démocratie, car sans expression du peuple, il n’y a pas de démocratie, seulement nous sommes par conséquent susceptible de nous interroger sur sa suffisance. En d’autres termes, l’élection est-elle une condition suffisante à l’identification d’un régime démocratique ?

Pour que la démocratie s’exerce au sein d’un l’État, certaines conditions doivent être réunies. En effet l’élection démocratique d’un pouvoir n’est pas synonyme d’un exercice démocratique du pouvoir. La démocratie doit être encadrée par d’autres conditions.

Le 24 janvier dernier, dans l’avion qui le ramenait de Tel-Aviv à Paris, Emmanuel Macron avait énoncé: « Une démocratie, c’est un système politique où l’on choisit nos dirigeants. C’est un système politique

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