A la lumière de vos expériences et de vos lectures, pensez-vous possible de préserver le secret aujourd'hui ?
Dissertation : A la lumière de vos expériences et de vos lectures, pensez-vous possible de préserver le secret aujourd'hui ?. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar emlrx • 20 Février 2022 • Dissertation • 2 040 Mots (9 Pages) • 463 Vues
Sujet 2 : A la lumière de vos expériences et de vos lectures, pensez-vous encore
possible de préserver le secret aujourd'hui ?
« L’exigence de transparence, lorsqu’elle se généralise à l’excès, n’est plus la
quintessence de la démocratie mais plutôt son antipode ». Par ces mots, Guy Carcassonne,
juriste spécialiste du droit constitutionnel, souligne inversement, de manière implicite,
l’importance du secret.
Du latin sacernere, qui signifie séparer, il établit une distinction entre ses détenteurs
et ceux qui ignorent sa connaissance. Il peut ici être entendu d’une part dans le sens de secret
d’État, c’est à dire « un espace immatériel et physique soustrait à la curiosité, à la publicité et
à la transparence » selon la définition de Sébastien Yves Laurent. Héritier de la monarchie, son
caractère inhérent au développement de l’État a conduit à son maintien au sein des régimes
démocratiques. D’autre part, le secret peut être compris comme vie privée des individus.
George Simmel, dans Le secret et la société secrète, le désigne ainsi comme « l’une des plus
grandes conquêtes de l’humanité ». Outre le fait de protéger certaines informations
personnelles et intimes, il permet à chacun de « penser librement », ce qui n’est possible «
que si l’on a la faculté de cacher absolument sa pensée », comme le note le philosophe Gaston
Bachelard dans Le rationalisme appliqué. Or la démocratie est modèle politique qui implique
à la fois « le gouvernement du peuple exerçant la souveraineté sans entrave », pour reprendre
le mot de Charles De Gaulle, et d’autre part l’État de droit définie par le juriste autrichien Hans
Kelsen comme un « État dans lequel les normes juridiques sont hiérarchisées de telle sorte
que sa puissance s'en trouve limitée ». En tant que « gouvernement du peuple par le peuple
pour le peuple » selon la formule d’Abraham Lincoln, ce régime sert les intérêts des citoyens,
dont l’un d’entre eux est de pouvoir conserver un espace au sein duquel ils ne sont soumis
qu’à eux même. En effet, l’absence de vie privée est caractéristique des totalitarismes. Dans
un Etat démocratique, le secret, sous une première forme est donc nécessaire pour la
protection de l’État et dans son autre définition pour la démocratie. Par ailleurs, afin de
protéger ce régime politique, il est nécessaire que les citoyens continuent d’exercer un
contrôle sur l’État, qui doit donc faire appel au secret dans des limites strictement encadrées.
La publicité de son action doit en effet demeurer la règle et non devenir l’exception. L’enjeu,
pour conserver cette souveraineté des citoyens et en même temps la protection de leur
intimité est donc d’établir clairement une frontière entre la vie privée et la vie publique, notion
qui ont tendance aujourd’hui à disparaître voire à s’inverser selon Alain Ehrenberg. Ce dernier
dit ainsi, dans L’individu incertain que « l’homme public s’est privatisé [et que] l’homme privé
s’est publicisé ».
Comment peut-on donc concilier sécurité de l’État, qui implique le secret, démocratie,
qui s’y accommode difficilement et vie privée, qui peut s’opposer aux aspirations de l’État ?
D’abord nous verrons que le secret fut essentiel à la construction des États et que les
démocraties actuelles relèvent d’un savant dosage entre secret et publicité. Enfin nous
montrerons que l’avènement de la transparence et des nouvelles technologies viennent à
menacer l’existence du secret tant privé qu’étatique amenant donc à la recherche d’un
nécessaire équilibre.
Toutes ères confondues, le secret s’est enraciné et est souventefois considéré comme
base des Etats modernes et des démocraties.
L’opacité du pouvoir et le contrôle plus ou moins grand des citoyens représentent
l’emblème des régimes non-démocratiques.
Effectivement, sous la monarchie, le secret est un attribut indispensable à la
consolidation de la souveraineté royale. Dans son ouvrage Le Prince (1532), Machiavel érige
un principe selon lequel « la nécessité n’a point de loi ». Le prince peut ainsi avoir recours à
tous les moyens pour atteindre son objectif, y compris dissimuler des informations ou mentir
à ses sujets ou adversaires. Le pouvoir de l’Etat peut aussi s’accroître, fait rendu possible par
le contrôle croissant qu’il exerce sur ses sujets. L’historien Lucien Bély présente dans Les
secrets de Louis XIV. Mystères d’Etat et pouvoir absolu (2013) le Cabinet noir. Louis XIV l’a fait
créer pour intercepter le courrier de personnes suspectes pour ensuite le refermer
discrètement, afin d’être sûr que toute personne ayant dit du mal du Roi se trouve punie.
Cette expression est d’ailleurs toujours employée aujourd’hui dans le sens
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