La Princesse de Montpensier : Quelle fonction occupe l'Histoire dans la nouvelle et le film ?

        La nouvelle La Princesse de Montpensier de Mme de Lafayette, publiée en 1662, s'inspire du contexte historique du XVIe siècle dont les guerres de religion constituent la toile de fond et de nombreux personnages historiques mêlés à l'intrigue. C'est une nouvelle précieuse historique. Lorsque Bertrand Tavernier réalise le film éponyme adapté de la nouvelle en 2010, ce dernier cherche davantage à rendre compte d'une âme historique dans le récit. Nous pouvons donc nous demander quelle fonction occupe l'Histoire dans la nouvelle et le film. Tout d'abord, nous étudierons comment Mme de Lafayette utilise le contexte historique de l'époque pour construire son récit. Ensuite, nous verrons de quelle manière Tavernier réutilise-t-il le contexte de l'époque dans son adaptation réalisée au XXIe siècle.

        Dans sa nouvelles, Mme de Lafayette cherche à inscrire le cadre de sa nouvelle dans une époque proche de la sienne et de ses lecteurs. La toile de fond de la nouvelle se veut donc historique afin de donner une crédibilité au récit. Elle en assure la vraisemblance et la magnificence des personnages comme du récit en lui-même. Mme de Lafayette réutilise des personnages historiques ayant réellement existé, comme Henri de Lorraine (Duc de Guise), Henri de Valois (Duc d'Anjou) ou encore Catherine de Médicis, d'où la nécessité d'être la plus crédible possible. L'histoire est cependant déformée volontairement afin de garder une part de romance. Elle dépeint dans sa nouvelle, l'hypocrisie de le danger de la société aristocratique de son époque. Les désordres des passions amoureuses sont synonymes de ceux des guerres de religion qui font alors rage dans le pays. Cependant l'histoire est laissée au second plan pour privilégier la complexité des personnages et leurs relations dans la nouvelle. Il s'agit alors d'une réécriture romanesque d'éléments historiques, souvent liés aux moments clés de l'intrigue romanesque. Par exemple, pendant la deuxième offensive de la guerre de religion où Paris est assiégée, Marie est seule à Champigny avec le comte de Chabannes qui lui déclare son amour. L'épisode de la guerre n'est que brièvement cité au profit de l'action se déroulant à Champigny. Mais cela s'explique aussi par la codification de la littérature du XVIIe siècle, qui exigeait la bienséance afin de ne pas choquer le public par la violence ou autres scènes choquantes pour l'époque. Mais cela s'explique aussi par la codification de la littérature du XVIIe siècle, qui exigeait la bienséance afin de ne pas choquer le public par la violence ou autres scènes choquantes pour l'époque. L'histoire donne alors une valeur, un crédit aux personnages.

        Quatre siècles plus tard, Tavernier décide d'adapter cette nouvelle en film. Dans cette version, l'histoire n'est pas traitée de la même manière. Le réalisateur vise d'avantage une restitution réaliste de l'histoire, c'est-à-dire sans le voile de bienséance exigible à l'époque. Il s'affranchit des codes précieux et classiques pour rendre une histoire plus vraie. Avec ses scènes de bataille, il illustre les guerres de religion sévissant à ce moment-là de l'histoire sans pour autant laisser pour compte les moments clés et privilégiés des personnages dans le récit. Une touche de modernité pour mieux authentifier les personnages. Le réalisateur réutilise également le langage de l'époque sans pour autant tomber dans le précieux de Mme de Lafayette qui correspond davantage au XVIIe siècle. Ainsi le film de Tavernier n'est pas un film sur le XVIe siècle, mais sur les personnages du XVIe siècle qui ignorent tout de leur époque. Il s'agit d'une reconstitution vivante de l'histoire. Il refusera même l'omniscience afin de nous faire percevoir l'époque au travers du regard des personnages. « J'épouse sa vision, son ignorance. Je ne dois pas être plus avant qu'elle. » dira-t-il notamment en parlant du personnage de Marie de Montpensier. En effet, cette dernière n'est autre qu'une jeune femme mariée contre son gré et qui tente de survivre à son destin dans une époque qu'elle comprend à peine. Tavernier veut aussi restituer la violence de la réalité historique, notamment par la violence des combats, mais aussi la nuit de noce de Marie et Philippe dont les membres de la famille se font spectateurs ou encore la scène où Marie est violentée par son père car elle ne veut pas épouser le Prince de Montpensier sont autant de violences historiques que le réalisateur décide de montrer. Le montage du film reste cependant nerveux et émotionnel avec des cadrages et des lumières privilégiant les regards. L'histoire a donc une portée à la fois collective et individuelle visant à nous faire vivre le récit au travers de chaque point de vue particulier des personnages.

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