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Empédocle poète

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Par   •  9 Décembre 2024  •  Dissertation  •  3 050 Mots (13 Pages)  •  16 Vues

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Empédocle poète : comment et pourquoi sa mort fascina Hölderlin et Bachelard

Amedeo de Goumoens

Empédocle poète : comment et pourquoi sa mort fascina Hölderlin et Bachelard

  1. Introduction

Sur la côte est de la Sicile se dresse une montagne de feu : l’Etna. Aux pieds du géant, la terre est fertile et il y pousse les meilleures tomates d’Italie. En haut, la roche noire et tranchante désapprouve l’arrivée du pèlerin qui entreprend l’ascension. C’est dans son cratère que se jeta Empédocle (bien qu’Empédocle n’ait jamais rencontré de tomates[1]). Les récits à son sujet diffèrent, et la complexité du personnage en fait un sujet en soi. Magicien, éminent médecin, devin, poète, philosophe, beau parleur vaniteux, voici ce que l’on peut lire sur Empédocle d’Agrigente.

Cependant ce qui reste de lui, hors du cercle des spécialistes, c’est sa mort dans les flammes du volcan. L’image à fasciné, déchaîné les passions, les interprétations. Pourquoi donc cette mort, particulièrement, a traversé les âges et les images. Quelle est la force, la poétique de cet instant, de la mort choisie dans les flammes, et dans quelle mesure c’est évènement est-il représentatif de la philosophie d’Empédocle ?

Nous débuterons ce travail par un cours chapitre sur Empédocle lui-même, grâce aux informations transmises jusqu’à nous par Diogène Laërce.

Puis nous parlerons du romantique Hölderlin, qui, dans sa tragédie Der Tod des Empedokles, fît d’Empédocle le héros tragique ultime, trouvant dans l’anéantissement à la nature l’acte de vie suprême. Plusieurs fragments d’Empédocle seront mobilisés, dans un essai de définition d’une lecture Hölderlinienne d’Empédocle.

Seront discuté ensuite des textes de Gaston Bachelard qui, un siècle après Hölderlin, parlera d’Empédocle dans deux livres, l’instituant comme la figure poétique du feu[2], et décrivant le « complexe d’Empédocle »[3].

Nous tenterons par la suite de mettre en opposition ces deux lectures d’Empédocle et d’en faire ressortir les points de conflits pour finalement arriver à une synthèse par un retour aux textes d’Empédocle.

  1. Empédocle d’Agrigente : vie, œuvre et mort

Empédocle d’Agrigente, né en -490 et mort en -430 environ. Selon Diogène Laërce, il aurait été auditeur de Pythagore, avant de se faire bannir de ce cercle car on le soupçonnait d’avoir rendu publique les conférences de Pythagore dans ses poèmes. Empédocle est aussi médecin et magicien. On retrouve une évocation de cette activité dans un de ces fragments :

« Les remèdes contre les maux, autant qu’ils sont. Et le recours contre la vieillesse,

Tu les apprendras, car pour toi seul j’accomplirai tout cela.

Tu arrêteras la force des vents infatigables qui, s’élançant sur la terre,

Anéantissent les champs de leurs rafales ; […]

Et tu amèneras de chez Hadès la force d’un homme qui a péri »[4]

Certains récits voudraient aussi qu’il ait, au moyen d’outres, arrêté le vent aux sommets des collines et des montagnes (voir cit. ci-dessus). C’est donc un personnage quasi mythologique auquel nous avons à faire, ce qui s’illustre bien dans ce fragment qui fera dire à D.L qu’Empédocle se montre « vantard et plein d’égoïsme » :

« Je vous salue ! Moi qui pour vous suis un dieu immortel, et non plus un mortel,

Je vais parmi tous, recevant les honneurs, tel que j’apparais,

Couronné de bandelettes et de guirlandes de fleurs […]

Hommes et femmes me vénèrent… »[5]

Durant sa vie il aurait composé divers textes : tragédies, discours politiques, hymnes. Il nous reste de lui aujourd’hui deux poèmes : Sur la nature et Les Purifications. Sur la nature parle – entre autres - de la matière, l’être, des éléments et des deux grandes puissances : Philos et Neikos. L’amitié qui unifie, la discorde qui sépare. Les purifications abordent la morale, l’idée de réincarnation et le rapport au divin.

Concernant sa mort, plusieurs récits existent mais pas de vérité indiscutable. L’un dit qu’il serait mort en exil, l’autre qu’il disparut dans un éclat de lumière. Mais nous intéresse ici uniquement la version d’Hippobote qui raconte qu’Empédocle « s’étant levé, il s’était dirigé vers l’Etna, et que parvenu au bord des cratères du feu, il s’y était élancé et avait disparu »[6]. Bien que Pausanias, élève d’Empédocle auquel s’adresse Sur la nature, s’oppose à ce récit, c’est cette version de l’évènement qui s’impose. D. Laërce lui-même, dans ses Mètres variés, se moque d’Empédocle sous le prisme da sa mort dans l’Etna[7]. « L’Acte est dépassé par l’Image »[8]. Empédocle est un personnage et sa mort est une image. Empédocle et l’Etna sont indissociable.

  1. Empédocle, héros romantique

Hölderlin a écrit La mort d’Empédocle, dont il existe 3 versions jamais achevées par le poète allemand écrite entre 1797 et 1800. Empédocle n’est pas une figure étonnante pour Hölderlin au sens ou sa mort est un exemple de l’esthétique romantique de Hölderlin. Le contact avec la nature brute, rude ; la séparation des humains, la contemplation des éléments et l’anéantissement du soi dans les flammes, le retour à l’Un, au divin.

La question du mépris des hommes est présente chez Empédocle, notamment dans ces fragments :

« Ne cesserez-vous pas le meurtre à la sinistre clameur ? Ne voyez-vous pas

Que vous vous dévorez les uns les autres dans l’insouciance de votre esprit ? »[9] et « Le père soulève son propre fils qui a changé de forme et l’égorge tout en priant – l’insensé ! »[10]

Pour l’analyser il faut comprendre la question de la réincarnation : pour Empédocle, toute chose est faite des quatre éléments dans une certaines proportions, rassemblé par la force de l’amitié (philos) et séparés par la discorde (neikos)[11]. Les éléments sont divins et tout existe dans la quantité juste et dans l’équilibre, ne laissant pas de place à quelconque disparition ou ajout[12].Pas de création ni de disparition, seulement des changements. La mort n’étant qu’un événement mettant fin à la vie, elle ne fait rien disparaitre non plus[13], même pas l’âme. L’âme se transmute alors par cycle, d’où les fragments cités plus haut et le végétarianisme d’Empédocle.

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