Analyse du Petit Organon pour le Théâtre

"Le Petit Organon pour le Théâtre" de Bertolt Brecht est un texte théorique et philosophique dans lequel Brecht exprime ses idées sur le théâtre, la science et d'autres sujets connexes. Ce texte est souvent considéré comme une contribution importante à la théorie théâtrale de Brecht. Il y aborde des questions telles que la relation entre le théâtre et la société, la fonction du théâtre dans une ère scientifique, et d'autres concepts liés à son approche du théâtre épique. Il ne suit pas une structure narrative conventionnelle ou un style littéraire traditionnel, mais plutôt une forme discursive et réflexive. Entendez que Le Petit Organon se lit comme la suite des réflexions de Brecht en paragraphes court suivant un ordre logique comme le fil des pensées de son auteur.

Afin d’apporter d’avantages de précisions sur l’origine de ce texte, il faut remonter en 1948, à Zurich, lieu ou réside Brecht après son exil politique d’Allemagne et son départ précipité des Etats-Unis. Une note de son journal datée du 18 Aout mentionne « Plus ou moins terminée avec l’Organon, une version courte et condensée du Messingkauf ». Le Messingkauf fait référence au Messingkauf Dialogues, un dialogue théorique écrit par Brecht entre 1939 et 1942 qui, selon lui constituent une « conversation à quatre faces sur une nouvelle façon de faire du théâtre ». Il est important de noter que cet ouvrage n’a jamais été achevé. Il faut donc voir l’Organon comme un héritier direct du Messingkauf. Il faut également citer le Novum Organum de Francis Bacon, grand penseur de la Renaissance, dont le nom apparait plusieurs fois dans les écrits de Brecht et qui semble avoir fortement inspiré le style du « Le Petit Organon pour le Théâtre ». Selon l'essai du Dr Reinhold dans le colloque  "Le Scandale Brechtien", il suggère que le livre de Bacon a attiré Brecht parce qu'il était dirigé contre l'Organon d'Aristote.

Brecht éprouvait une aversion pour le drame aristotélicien, arguant que ce genre, en suscitant des émotions de terreur et de catharsis, entravait la réflexion du public. En accord avec sa perspective politique marxiste, Brecht préconisait une nouvelle orientation pour le théâtre, visant à fusionner divertissement et enseignement. Ce type de théâtre viserait à présenter des modèles de vie permettant au public de saisir le contexte social. La notion centrale du théâtre brechtien réside dans le concept d'« aliénation », soulignant la nécessité de rappeler au public qu'il assiste à une représentation théâtrale.

En lisant Le Petit Organon, on comprend rapidement que les influences Marxistes et Socialiste de Brecht sont intrinsèquement lié à sa vision profonde du Théâtre qui est, sans aucun doute, politique. Selon Brecht, pour créer un personnage ouvert à l'interprétation du spectateur, il est nécessaire de le déconnecter de l'émotion qui le guide et de se concentrer sur son action, son geste. Cela offre la possibilité d'explorer d'autres facettes, car nous conservons une perspective critique, permettant ainsi de réfléchir sur les différentes actions envisageables. Lorsque le jeu du comédien est emporté par l'émotion, ce dernier semble limité, confiné dans un espace rigide, ne laissant qu'une seule manière d'agir. En revanche, si on observe le personnage depuis une perspective extérieure et non plus intérieur, il devient alors possible de découvrir de toutes nouvelles opportunités de réflexions, des remises en questions et un jeu qui transmet désormais non pas une émotion mais des faits. Tout ceci peut alors offrir une interprétation complètement différente de l'ensemble de l'œuvre. Investissant tout son être dans l'observation des gestes, le comédien doit scruter de près le monde qui l'entoure et s'efforcer d'imiter ce dernier à travers un processus de réflexion approfondi. Il doit accentuer ce qu'il perçoit, car l'original est souvent trop subtil, "Il parle trop doucement".

D'un point de vue analytique, la distanciation consiste en la reproduction d'un objet de manière à ce que le spectateur le « reconnaisse » tout en le maintenant étrange. En ne s’identifiant pas à l’objet, il est désormais permit au spectateur de former une opinion critique au lieu de simplement « reconnaître », identifier et cataloguer sans réflexion. Il est crucial de faire comprendre au spectateur qu'il a le pouvoir de changer la société et qu'il doit maintenir un regard critique. « Ce qui est resté inchangé paraît inchangeable. »
Selon Brecht, notre vie est devenue familière, et peu de gens se méfient du familier. Nous pouvons prendre pour exemple la terre qui fut pendant des siècles considérée comme plate avant que la science ne vienne bousculer le cours des choses en permettant d’envisager d’autres possibilités et d’y réfléchir. Pour Brecht, ce même scepticisme doit être appliqué au théâtre. Le changement est une libération des délimitation et le public à le pouvoir et le devoir d'intervenir.

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