"Loulou" de Maurice Pialat
Analyse sectorielle : "Loulou" de Maurice Pialat. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Penelope GERMA DE ROALDES • 13 Mars 2022 • Analyse sectorielle • 1 811 Mots (8 Pages) • 574 Vues
LOULOU Maurice Pialat
«Le cinéma de Pialat est celui du trop-plein, celui qui dit des choses qu'on ne peut plus contenir, qui débordent»
Isabelle Huppert
Maurice Pialat est un descendant direct du cinéma vérité, à la quête du moment et de l’instant.
Un cinéma vérité qui rentre dans l’acteur et l’humain pour en faire jaillir la passion, l'émotion, la violence et le désarroi. On peut inscrire ce film dans le genre : Une tranche de vie prise sur le vif.
Ce film raconte la banale histoire d’un triangle amoureux, des héros du quotidien, mais Pialat nous invite à y participer. Je ressens une totale immersion, grâce au cadrage et à la fluidité de la caméra qui nous laisse peut être penser que nous sommes un personnage à part entière dans le film.
Pour Pialat l’essentiel était de capter un moment dont on imagine qu’il n’était pas entièrement prédéterminé ou fabriqué mais qu’il se dessinait sur le plateau, au fil des répétitions. Ce qui donne des moments vrais, des moments de vie, et en traquant le sentiment pur et en créant les conditions pour l'atteindre, (pas de “coupez”, pas de “moteur”, pas de frontière entre réalité et fiction) Pialat offre au cinéma les moments de la vie comme elle est dans la réalité. Ce film est «le mélange de quelque chose de personnel avec quelque chose de fabriqué» Isabelle Huppert.
Cette œuvre autobiographique est comme toujours chez Pialat mêlée à de la pure fiction, il écrit le scénario avec Arlette, qui n’est autre que Nelly dans le film.
“Loulou” est tourné en décor naturel, l'ouverture du film se fait dans les rues de Paris à Bir hakeim, une jeune femme seule et triste déambule dans un debut de soirée plutot sombre (elle est toujours cadrée dans le noir, elle avance comme une ombre dans Paris, et restera parfois une ombre mysterieuse tout le long du film), passant devant un couple qui s’embrasse et laissant peut etre penser que c’est Nelly.
Dans la même soirée, nous découvrons Louis, appelé Loulou dans ce qui pourrait être une petite chambre de bonne, il dort habillé avec un “pote” à côté, qui lui rappelle “t’es encore dans un bel etat toi", avec cette mise en scène Pialat nous montre en quelques secondes qui est ce fameux Loulou, un homme peu soigné désordonné, fêtard avec peu d’argent, bon copain, et amant de toutes les femmes. Il retrouve la petite Dominique, un coup d’un soir un peu trop collant, lui propose d’aller faire la fête alors qu’elle préférait un moment romantique, Pialat utilise comme raccord une musique
extra-diégétique de la boîte de nuit qui devient diégétique dans le plan suivant, nous entraînant nous aussi dans l’ambiance à venir.
Dans cette boîte de nuit, nous découvrons à travers l'œil de André le mari de la jeune Nelly, la rencontre entre cette dernière et le brusque Loulou, vêtu d’une veste en cuir de loubard qu’il n’a toujours pas quitté depuis son réveil. Un grand bonhomme à la chevelure blonde grasse et épaisse, elle, petite bourgeoise bien apprêtée, tout semble les séparer, de leur allure à leur milieu social, mais la passion aura raison des apparences et, très vite, les deux corps se rencontrent et ne se quittent plus, nous invitant à venir avec eux. Nelly découche chez Loulou, l’exposition est finie, le film commence..
Pialat capture les instants de vérité, et lorsque les acteurs cassent le lit pendant leur première nuit d’amour, c’est du pain béni ! Depardieu et Huppert connaissent bien leur réalisateur et continuent a joué la scène comme si cela était prémédité et fabriqué puis il lui écrase le seins, elle crie de douleur et commence à rigoler, c’est encore un magnifique moment vrai, qui donne un véritable instant de vie à la caméra et le choix de sa position ainsi que ce petit mouvement, me donne l’impression d'être dans la pièce, assise sur un fauteuil en face d'eux, à les regarder.
La violence est récurrente dans les films de Pialat, la dispute entre Nelly et son mari André dans leur appartement est le résultat d’une mise à bout des acteurs, les gestes violents sont réels, la caméra epaule intrusive cerne le couple dans un moment de rage intense mêlé à de l’amour de la part d'André qui pensait que sa femme avait juste besoin de “tirer un coup” et rentrer à la maison.
Cet appartement pourtant d’un couple bourgeois, Pialat, nous le montre lugubre, froid et vide comme ce que ressent Nelly de sa relation avec son mari à ce moment précis. En opposition avec la chambre d'hôtel, et ensuite l’appartement que Nelly partage avec Loulou, ils sont toujours bien éclairés avec des lumières plutôt chaudes, même quand André vient dans cet appartement, “c’est un vrai petit nid d’amour”.
L'infidélité crée des fantasmes, de la passion, ce qu’elle ressentait avant avec André, c’est l’envie de nouveau, le goût du neuf que Nelly recherche
chez Loulou, elle le dit elle même “il me faudrait
les deux”.
Pialat est connu pour choisir intelligemment le choix de ses plans, et lorsqu'éclate une nouvelle dispute entre Nelly et André cette fois ci dans la rue, Loulou intervient pour les séparer mais c’est une voisine qui met un terme à cette énorme brouhaha de violence (la voix au début à l’air d'être amplifié de manière pas naturel, comme rajouter). André demande à parler à Loulou en
privé, Pialat décide de nous montrer Nelly seule au premier
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