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Howard Becker, « Quelle dose de détails ? Quelle dose d'analyse ? », Les ficelles du métier : comment conduire sa recherche en sciences sociales, La Découverte, 2002, p. 131-142.

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Par   •  11 Janvier 2020  •  Analyse sectorielle  •  3 094 Mots (13 Pages)  •  1 096 Vues

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Howard Becker, « Quelle dose de détails ? Quelle dose d'analyse ? », Les ficelles du métier : comment conduire sa recherche en sciences sociales, La Découverte, 2002, p. 131-142.

        Howard Saul Becker est un sociologue américain né à Chicago en 1928, spécialiste de la sociologie de l’éducation, de la déviance et de l’art, qui s’inscrit dans la tradition de l’Ecole de Chicago et alors dans le courant de l’interactionnisme symbolique, basé sur le principe que la société est le produit de l’interaction entre individus. L’école de Chicago correspond au courant de pensée sociologique qui est apparu aux Etats-Unis au XXème siècle dont l’auteur a participé à la création, et plus précisément, la création de la seconde école de Chicago dans les années 50, qui contribue à l’étude de l’urbanisme, de la déviance et notamment la criminologie et à l’étude du travail et des métiers. Le sociologue a également réalisé ses études à l’université de Chicago, où il a notamment suivi l’enseignement d’Everett Hughes, un des principal représentant de la pensée sociologique moderne de l’Ecole de Chicago, dont la pensée et l’œuvre Rencontre de deux mondes : La crise de l'industrialisation du Canada français vont fortement l’influencer. Il a ensuite été professeur à l’université Northwestern du l’Illinois, puis à celle de Washington, à Seattle. Il a également été membre de l’Académie américaine des arts et des sciences, organisation dédiée à l’enseignement et au progrès des connaissances en sciences humaines. En 1961, il devient rédacteur en chef de la revue Social Problems qui réunit de nombreux sociologues américains opposés au courant fonctionnaliste, courant qui perçoit une société par ses institutions et combien ces dernières assurent la stabilité et structurent les comportements des individus au sein de cette société, via les différents rôles et statuts. Le courant fonctionnaliste domine la sociologie américaine de l’époque. Il publie en 1963 Outsiders - qui s’oppose également aux idées fonctionnalistes par l’élaboration d’une théorie interactionniste de la déviance et sera son plus célèbre ouvrage - Les Mondes de l’art en 1982 ainsi que Ecrire les Sciences Sociales en 2004.

Notre étude sera ici portée sur son ouvrage Les ficelles du métier, datant de 1988. Cette ouvrage de 360 pages est le produit de l’expérience de l’auteur en tant qu’enseignant, ayant dû se confronter aux différents problèmes de ses étudiants vis-à-vis de la recherche en science sociale. Il reprend une par une les différentes étapes de la recherche en sciences sociales et représente donc de longues années de recherche pour le sociologue. Les ficelles du métier peut aussi bien être vu comme un ouvrage permettant de saisir la réalité sociale que comme un guide pour mener à bien ses recherches, permettant alors de l’étudier. Son titre est alors particulièrement bien choisi car tout à fait évocateur du contenu. En effet, dans ce livre, Becker propose des solutions pratiques pour trouver ses concepts, représenter un phénomène social ou encore organiser ses données. L’ouvrage est composé d’une préface, suivie de cinq chapitres : « Ficelles », « Représentations », « Echantillons », « Concepts » et « Logique ». On perçoit au niveau de la forme de l’ouvrage, un auteur qui combine théorie pour entamer un travail d’investigation et applications pratiques pour illustrer ses propos. En effet, dans le passage que nous allons ici étudier, s’intitulant « Quelle dose de détails ? Quelle dose d'analyse ? » et faisant partie du troisième chapitre « Echantillons », on remarque que l’auteur allie méthodes relatives au travail de terrain avec extraits de roman, biographie d’auteur ou encore la table des matières d’un ouvrage, pour rendre compte de ce jusqu’où peut aller une description massivement détaillée.

        L’auteur commence tout d’abord son passage par l’exposition de ce qu’est un bon travail de terrain. Il explique que ce dernier repose sur le fait de savoir percevoir les éléments pertinents, une fois sur le terrain. En effet, le travail de terrain consiste à essayer d’être le plus complet possible dans ses descriptions et ses analyses : le but n’est pas de noter tout et n’importe quoi mais seulement ce que l’auteur appelle les « occurrences pertinentes ». C’est-à-dire qu’il faut réussir à cibler les petits détails permettant de rendre compte d’une situation de la manière la plus réaliste possible, au niveau des émotions des individus notamment. Le sociologue doit retranscrire une situation de manière à ce que le lecteur, en lisant sa description, soit capable de résumer et d’interpréter un nombre de chose que le sociologue a certainement dû voir durant son travail de terrain.

Dans un second temps, l’auteur insiste sur le fait qu’un bon sociologue doit tenter d’être le plus authentique dans ses descriptions, et ne pas faire de résumés analytiques, car à partir d’un résumé, le lecteur aura une situation biaisée de la réalité. C’est là que H. Becker vient à énoncer une des difficultés premières du travail de terrain : réaliser une description brute dénuée de toute interprétation alors même qu’en tant qu’homme, il nous est impossible d’éviter absolument tout élément d’interprétation. L’auteur prend alors comme exemple le romancier Georges Perec et de son biographe David Bellos pour exprimer à quoi ressemble une « description brute ». En 1978, D. Bellos décrit une expérience radiophonique de G. Perec et explique que le romancier a littéralement passé une journée entière à décrire au détail près, à l’aide d’un micro ce qu’il se passait devant le carrefour de Mabillon. De manière à être encore plus parlant pour le lecteur, H. Becker expose un paragraphe entier de la description de G. Perec dont je ne vais garder que quelques phrases. Dans le passage « Les gens : seuls, maussades. Parfois en couples. […] Rares touristes. Imperméables longs, beaucoup de vestes ou chemises militaires (américaines). […] La plupart des passants flânent, traînent, semblent n’avoir pas d’idée précise quant à l’endroit où ils vont », G. Perec donne un sens au simples faits observés et n’a en rien romancé et interprété les choses. Cela permet au lecteur de faire ses propres interprétations. Car en effet, les sociologues attendent ces interprétations de leurs lecteurs, car ces dernières sont propres à chacun d’une part, et d’autre part, car le lecteur peut les réaliser lui-même, seul devant sa lecture du texte, à condition que le sociologue ait réellement décrit la situation dans sa pure authenticité.

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