Peut-on réduire le langage à un simple outil ?
Cours : Peut-on réduire le langage à un simple outil ?. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar meliiiiiiii • 11 Août 2021 • Cours • 1 096 Mots (5 Pages) • 432 Vues
LE LANGAGE : PEUT-ON RÉDUIRE LE LANGAGE À UN SIMPLE OUTIL ?
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Les définitions les plus simples sont parfois les plus trompeuses. Telles celles qui définissent le
langage comme outil de communication, ou comme moyen d’expression. Ces définitions
semblent triviales ou anodines, elles sont chargées de présupposés. S’il est vrai que le langage
articulé est le vecteur privilégié des communications humaines, le définir comme outil de
communication conduit à des schématisations dangereuses.
1. Langage et communication
Il est naturel, dans un premier temps, d’intégrer le langage humain, – qu’on peut aussi appeler
langage articulé –, dans la catégorie générale des communications. Il y a communication dès
lors qu’un émetteur quelconque transmet une information ou un message à un récepteur. Le
message est transmis grâce à un support matériel (sons de la voix, gestes, livre, photographie,
cinéma) ; il est déchiffré par le récepteur à l’aide d’un code, le code étant l’ensemble des signes
et des règles que possèdent en commun les sujets qui communiquent. Nous admettrons donc
qu’il existe d’autres modes de communication que le langage articulé ; ainsi le code de la route,
les rites de politesses, les expressions corporelles… La plupart des animaux utilisent des
signaux visuels, sonores ou olfactifs pour communiquer entre eux.
2. Le schème techniciste de la communication
Ce schéma général – émetteur, récepteur, canal, code, message…– semble anodin. Pourtant,
que de présupposés ne contient-il pas ! Notons déjà son origine technicienne : il semble copié
sur la situation modèle d’une communication téléphonique. Un instrument code et décode des
signaux électriques ; des interlocuteurs ouvrent ou ferment la liaison à l’aide de phrases
convenues ; un message passe par le long des fils ; du « bruit » peut venir parasiter la
communication…
Il est paradoxal que ce soit une situation si artificielle et particulière qui serve à décrire une
situation si universelle et ancestrale. Pourquoi convient-il de s’en méfier ?
L’émetteur et le récepteur : le schéma oppose, de part et d’autre du canal, deux interlocuteurs,
conscients de leurs pensées, déjà prêts à communiquer, déjà propriétaires de choses à dire. Le
langage ne serait que la médiation entre ces subjectivités préexistantes. Or, si je peux me
considérer comme sujet autonome, ayant des choses à dire, avant telle ou telle communication
particulière, est-ce que je peux considérer l’homme lui-même comme sujet communicant avant
la communication langagière ? Un être humain peut-il être un individu en-dehors de la parole,
antérieurement aux actes sociaux de langage ? N’est-ce pas plutôt par l’appropriation du
langage que l’enfant apprend à devenir sujet à part entière, interlocuteur pensant et voulant ? Si
tel est le cas, il serait réducteur de faire du langage un simple outil de médiation ; le langage
serait plutôt le milieu de naissance de la subjectivité consciente.
Le système de codage : peut-on dire que l’émetteur code en parlant, et que le récepteur décode
en écoutant le message qui passe de l’un à l’autre ? Certes, l’appareil téléphonique est fait pour
coder et décoder des signaux acoustiques et des signaux électriques ; aussi imagine-t-on
facilement dans le dialogue humain, par analogie, une pensée codée ici et décodée là. Mais c’est
présupposer un message antérieur au langage, un texte original qui existerait en-dehors de
l’acte de parole et que la parole devrait coder, et l’écoute décoder. Or, y a-t-il une pensée avant
les mots ?
Parler, est-ce crypter ou décrypter des pensées sous-jacentes ? Que serait ce « texte » infralinguistique ? L’expérience que nous avons de la réflexion silencieuse est encore une
expérience linguistique : dans nos pensées intimes, nous nous parlons à nous-mêmes.
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