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ADRESSE DU PRESIDENT AHMED SEKOU TOURE A DALABA DANS LE CADRE DE LA GUERRE DE CLASSE CONTRE CHEYTANE (Février 1976).

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Par   •  24 Février 2016  •  Fiche de lecture  •  2 376 Mots (10 Pages)  •  1 500 Vues

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ADRESSE DU PRESIDENT AHMED SEKOU TOURE A DALABA DANS LE CADRE DE LA GUERRE DE CLASSE CONTRE CHEYTANE (Février 1976).

« Chacun connaissait donc la vérité, tout le monde avait peur de la proclamer. Chacun aspirait à un avenir meilleur, mais chacun avait peur de l’affirmer. Tous comprenaient le présent, mais ne percevaient pas l’avenir avec le grand soleil de la liberté. Mieux en fatalistes résignés, d’aucuns disaient : « tout dépend de Dieu, laissons Dieu faire », d’autres de dire : « c’est Dieu qui a fait que le Blanc soit supérieur au Noir ; le Noir doit accepter son infériorité ici-bas. « La situation générale était caractérisée par l’esclavage et l’indignité pour tous. Le spectre de la peur était devenu lot de chacun.  On avait plus peur du Commandant blanc que de Dieu ; on avait plus peur du Chef de Canton que de Dieu. On avait plus peur du garde cercle que Dieu. Quand nous venions à  Dalaba, nous passions des nuits et des nuits sur les bancs de votre école primaire faute de logements. Nombreux étaient les fonctionnaires, les soi-disant intellectuels qui se moquaient alors de nous. Certains disaient « c’est un fou, il est déjà du cadre supérieur, la plus  haute situation administrative et le voilà encore qui cherche des histoires aux Blancs ». Au cours de l’une des conférences sachant ce que les intellectuels pensaient, nous leur avons dit : « passez bien la nuit dans vos lits, le banc sur lequel nous nous dormons est infiniment meilleur à vos lits ». Le Commandant de Cercle LAFAIX qui était là, qui se trouvait être un homme très intelligent, très instruit, nous invita personnellement à son bureau. Il engagea une conversation avec nous. Nous lui posâmes un préalable : « Si vous voulez que notre conversation soit intéressante, acceptez-vous que nous considérions comme un simple homme, un homme comme nous, Monsieur LAFAIX et non comme le grand Commandant ? Il ne répondit pas à la question. Il nous pria de répondre à ses questions. Nous lui répondîmes que ce sera à la seule condition qu’il répond lui aussi à notre première question. Il accepte. Nous lui demandâmes de quitter son bureau pour être à nos côtés. Il fut d’accord. Alors la conversation s’engagea de 11h du matin jusqu’à 5h30 de l’après-midi. Nous lui dîmes toutes les vérités, entre autres : « vous ferez tout, mais tôt ou tard le colonialisme français sera battu et chassé de la Guinée ».

Or, à l’époque, quand on disait à un colonialiste que le colonialisme serait battu, il pensait tout de suite aux moyens matériels à utiliser contre la France. Convaincu  que nous n’aurions pas ces moyens, pour lui, c’était tout simplement une déclaration sans valeur pour ne pas dire une déclaration de dément. Cependant, comme il était intelligent, au cours de la discussion le Commandant LAFAIX accepta cependant beaucoup de vérités.

« Ces vérités ne sont pas pour la Guinée disait-il et encore moins pour Dalaba. Si vous étiez en France encore oui ! j’aurais donné mon accord total à ce que vous avez dit. Mais le Peuple français, ce n’est pas le Peuple guinéen. Ce sont deux Peuples différents ». Nous lui demandâmes donc : « êtes-vous différent de nous ? » Il répondit : « non, mais nous sommes deux hommes, comprenons nous ».  Nous rétorquâmes : « Et notre père, notre mère et notre frère de Dalaba sont-ils eux, inférieurs à vous ? » Il regarda sa montre. Il était 5h ½, nous lui demandâmes s’il avait faim, il répondit qu’il n’avait pas faim et nous promit de répondre à notre question dans une demi-heure. Il sortit pour ordonner au chauffeur d’amener son véhicule, une jeep. Il nous demanda de l’accompagner à Tinka, localité situées à 5 kilomètres de la ville. Nous montâmes avec lui. Il appela quelques fonctionnaires qui nous accompagnèrent également. Arrivé au portail de la concession du chef de canton, Thierno Oumar Dalaba, il arrêta la jeep et invita les fonctionnaires à aller lui dire qu’il était là. Les quatre fonctionnaires  se précipitèrent dans la cour. A peine eurent-ils fait quelques pas qu’ils s’arrêtèrent pour se déchausser et commencèrent à se courber pour aller vers la case de Thierno. Pour le Commandant LAFAIX ce spectacle était la réponse à notre question. Nous l’avions comprise. Nous ne disions plus au revoir à LAFAIX et nous retournâmes à pieds à Dalaba et sans plus aller le voir pour le reste du séjour. Un mois après, il vint à Conakry, il alla jusque chez nous pour nous demander « vous m’avez compris ? Nous lui rétorquâmes : « nous avons compris, mais vous verrez que cela changera ».

Il voulait tout simplement nous dire qu’ici en Guinée, la démocratie n’était pas possible et que parmi les responsables qui se courbaient là, il y avait les premiers responsables du Parti. Mais la réalité de 1948 est toute différente de celle d’aujourd’hui. Nous remercions Dieu, nous remercions le Peuple, car, non seulement le colonialisme est aboli, mais la féodalité est détruite.

Et jamais plus la force ne saurait régner ici, l’injustice ne saurait régner désormais à Dalaba et en Guinée. Tout a changé. La femme est devenue digne, le paysan, le travailleur, tout le monde fait respecter la personnalité humaine. Dans la cour de Thierno, les fils du Peuple n’auraient pas trouvé de place de salut. Voilà que c’est eux aujourd’hui qui parlent du Parti, qui enseignent même à leurs pères, le chemin du PDG. Certains aussi qui ne connaissaient pas l’islam, mais qui parlaient de l’Islam, disaient que le PDG était un mouvement anti-islamique ; ceux-là ne savaient pas que l’islam ne peut véritablement s’épanouir que dans la liberté, dans l’égalité et dans la démocratie. »

PAGES CULTURELLES PAR JUSTIN MOREL JUNIOR DANS LE HOROYA No 2212-RG 6 MARS 1976.

KANDIA : Souvenirs d’enfance

Kandia ! C’est le nom lapidaire de celui qu’il n’est plus besoin de présenter ; tellement il ressemble au Kilimandjaro, à l’Himalaya ou  à l’Everest. Ces gigantesques montagnes qui défient et le temps et l’espace. Kandia est une montagne de la culture et de l’histoire. Tel, il s’impose à nous comme un véritable monument de la musique africaine. Mais si Sory Kandia Kouyaté l’artiste éclos est bien connu, par contre, Kandia l’enfant enclos dans l’éducation traditionnelle est bien souvent méconnu. Le passé, l’enfance de Kandia, cette enfance passée en pleine période coloniale est en fait l’expression des âpres contradictions d’alors. C’est une enfance étoffée de leçons de morale. Fécondée par l’amour patriotique, fertilisée par la conscience d’un père d’une équité exceptionnelle. C’est un de ces nostalgiques instants que Kandia nous raconte à cœur ouvert.

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