Les Fausses Confidences, Marivaux acte II scène 13, extrait de « Araminte, d’un air délibéré » à « Dubois ne m’a averti de rien »
Commentaire de texte : Les Fausses Confidences, Marivaux acte II scène 13, extrait de « Araminte, d’un air délibéré » à « Dubois ne m’a averti de rien ». Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Victor Vasseur • 27 Décembre 2022 • Commentaire de texte • 2 136 Mots (9 Pages) • 455 Vues
Classe de 1ère, 11 SII,T1
Les Fausses Confidences, Marivaux acte II scène 13, extrait de « Araminte, d’un air délibéré » à « Dubois ne m’a averti de rien »
Introduction
La scène, à la fois cruelle et drôle, se déroule juste après que Araminte ait annoncé à Dubois qu’elle avait « envie de lui tendre un piège ». On assiste au stratagème de la jeune veuve pour faire avouer au pauvre Dorante son amour pour elle. Pour ce faire, elle se livre à son tour à une « fausse confidence » car elle fait croire à Dorante qu’elle est sur le point d’épouser le comte. C’est une scène où le geste reprend le pas sur le mot et Araminte y joue une comédie dans laquelle elle se montre très dure envers le malheureux Dorante.
Marivaux multiplie également les didascalies (13 en tout ), les apartés.
Dorante quant à lui semble pris à son propre piège : soit il se tait et voit Araminte épouser le comte soit il parle alors que les apparences sont contre lui et qu’il risquerait d’être renvoyé.
Problématique : Dans quelle mesure le stratagème d’Araminte est-il efficace ?
On peut suivre dans ce texte trois mouvements pour répondre à cette question :
- Comment Araminte met en place son stratagème et demande à Dorante d’écrire au compte (jusqu’à : « Dubois m’a trompé » ligne…)
- Comment Dorante cherche à s’opposer à ce mariage par des arguments rationnels ie sans se dévoiler (ligne… : « êtes-vous prêt à écrire » jusqu’à ligne… « aucune inclination pour lui »)
- Comment le trouble de Dorante et la réaction d’Araminte constituent des formes d’aveu mutuels mais incertains
1e mouvement :
- Didascalie : Araminte est pleinement dans son rôle de maitresse femme. C’est elle qui mène le jeu.
« D’un air délibéré » la fait parler avec autorité
Le mot « air » qu’elle adopte rappelle le masque et nous plonge dans l’univers du théâtre et montre qu’Araminte joue une comédie et applique un stratagème. Araminte fait semblant de ne pas voir trouble de Dorante.
Commentaire de l’expression de l’autorité d’Araminte : la didascalie nous l’indique mais aussi son discours.
Ligne 1 : Accumulation de propositions (formulée par Araminte) montre qu’elle met en place sa stratégie avec force -> Dorante n’y peut rien et ne peut que subir :
En une phrase 4 propositions ont pour fonction d’empêcher Dorante de répondre
Cette réplique d’Araminte restitue dans la relation Araminte/Dorante qq chose de purement professionnel, voire de maitresse à élève. Les liens « hiérarchiques » sont ici évidents :
Accumulation d’impératifs « ne vous embarassez pas », « écrivez », ou futur à valeur d’injonction « vous allez lui écrire » . Par ailleurs, dans cette courte phrase, les trois personnages clés sont réunis et place bien la lettre comme l’accessoire maître du stratagème qui les réunit. Marivaux fait de la lettre l’accessoire indispensable de la relation amoureuse, une épreuve pour tester les sentiments.
La réponse de Dorante « Eh ! Pour qui Madame » montre qu’il n’a pas réalisé l’étendue de son malheur, mais le spectateur le sait : ironie dramatique.
2e fonction de cette question : elle nous montre aussi que Dorante va rentrer dans une forme de résistance passive car il joue à celui qui ne comprend pas
La réponse d’Araminte est sans détour : « pour le comte » et l’antithèse « extrêmement inquiet » qui suit s’oppose à « bien agréablement », renforcée par les adverbes d’intensité (« extrêmement » et « bien », montre l’ironie de la situation car elle décrit en miroir ce que Dorante ressent, et même par effet de prolepse, ce qu’Araminte va ressentir à son tour en constatant que son stratagème ne marche pas ( plus bas « le cœur me bat » )
Ironie cruelle d’Araminte est formalisée par le CC de moyen « par le petit mot que vous allez lui écrire ». « Petit » marque un euphémisme qui n’en rend que plus « grande » la nouvelle qui vient d’assommer Dorante et qui a vocation à rassurer le comte si « inquiet ».
Et cela rabaisse aussi le rôle de Dorante qui se trouve réduit à écrire des petits mots a un rival heureux. L’un est comte, l’autre secrétaire.
Dans ces conditions comment pourrait-il oser se déclarer. Araminte a-t-elle choisi une bonne stratégie ?
Nouvelle didascalie : « Rêveur » : ému. Il est déboussolé mais ne réagit pas plus que cela. Il semble assommé.
Son émotion est si forte qu’il ne réagit pas, il n’obéit pas aux injonctions d’Araminte.
La question « à quoi rêvez-vous » reprend la didascalie, et fait même office de didascalie interne : Araminte sait très bien pourquoi Dorante réagit ainsi, et semble même poser une question à double sens qui appellerait la réponse : « A vous, madame ».
Mais Dorante, face à cette maîtresse désagréable prend plutôt le rôle comique du mauvais élève qui n’a rien écouté avec sa réponse « oui, madame ». Dorante est infantilisé par Araminte.
Aparté de A ligne 8 (= phénomène théâtrale) fait du lecteur le complice de la manipulation. Le verbe à l’impératif 1ère personne du singulier « voyons » inclut le spectateur dans le stratagème d’Araminte et l’en fait complice.
Cela montre aussi qu’elle est attentive aux gestes et réactions de Dorante ; elle l’observe de près.
La brièveté de cet aparté exprime un sentiment de satisfaction et peut être un espoir que l’attitude de Dorante change.
« Ah ! Dubois m’a trompé ! » : Dorante fait à son tour un aparté : rejette déjà la faute sur son valet ce qui ne lui fait pas forcément honneur. Il n’est rien sans lui. Le rôle de Dubois est ici, même en son absence, rappelé.
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