La littérature d’idées du XVIe au XVIIIe siècle
Cours : La littérature d’idées du XVIe au XVIIIe siècle. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar zic890 • 22 Septembre 2021 • Cours • 656 Mots (3 Pages) • 477 Vues
La littérature d’idées du XVIe au XVIIIe siècle. Explication linéaire 1
Notre monde vient d’en trouver un autre (et qui nous répond si c’est le dernier de ses frères, puisque les Démons, les Sibylles, et nous, avons ignoré celui-ci jusqu’à cette heure ?) non moins grand, plein, et membru que lui : toutefois si nouveau et si enfant, qu’on lui apprend encore son a, b, c ; il n’y a pas cinquante ans qu’il ne savait ni lettres, ni poids, ni mesure, ni vêtements, ni blés, ni vignes. Il était encore tout nu, au giron, et ne vivait que des moyens de sa mère nourrice. Si nous concluons bien de notre fin, et ce poète de la jeunesse de son siècle, cet autre monde ne fera qu’entrer en lumière, quand le nôtre en sortira. L’univers tombera en paralysie ; l’un membre sera perclus, l’autre en vigueur.
Bien crains-je que nous aurons bien fort hâté sa déclinaison et sa ruine par notre contagion, et que nous lui aurons bien cher vendu nos opinions et nos arts. C’était un monde enfant ; si ne l’avons-nous pas fouetté et soumis à notre discipline par l’avantage de notre valeur et forces naturelles, ni ne l’avons pratiqué par notre justice et bonté, ni subjugué par notre magnanimité. La plupart de leurs réponses, et des négociations faites avec eux, témoignent qu’ils ne nous devaient rien en clarté d’esprit naturelle et en pertinence. L’épouvantable magnificence des villes de Cusco et de Mexico, et, entre plusieurs choses pareilles, le jardin de ce Roi, où tous les arbres, les fruits, et toutes les herbes, selon l’ordre et grandeur qu’ils ont en un jardin, étaient excellemment formées en or ; comme, en son cabinet, tous les animaux qui naissaient en son état et en ses mers ; et la beauté de leurs ouvrages, en pierrerie, en plume, en coton, en la peinture, montrent qu’ils ne nous cédaient non plus en l’industrie. Mais quant à la dévotion, observance des lois, bonté, libéralité, loyauté, franchise, il nous a bien servi de n’en avoir pas tant qu’eux ; ils se sont perdus par cet avantage, et vendus, et trahis eux-mêmes.
Quant à la hardiesse et courage, quant à la fermeté, constance, résolution contre les douleurs et la faim, et la mort, je ne craindrais pas d’opposer les exemples que je trouverais parmi eux aux plus fameux exemples anciens que nous ayons aux mémoires de notre monde par-deçà. Car, pour ceux qui les ont subjugués, qu’ils ôtent les ruses et batelages de quoi ils se sont servis à les piper, et le juste étonnement qu’apportait à ces nations-là de voir arriver si inopinément des gens barbus, divers en langage, religion, en forme et en contenance, d’un endroit du monde si éloigné et où ils n’avaient jamais su qu’il y eût habitation quelconque, montés sur des grands monstres inconnus, contre ceux qui n’avaient non seulement jamais vu de cheval, mais bête quelconque duite à porter et soutenir homme ni autre charge ; garnis d’une peau luisante et dure, et d’une arme tranchante et resplendissante, contre ceux qui, pour le miracle de la lueur d’un miroir ou d’un couteau, allaient échangeant une grande richesse en or et en perles, et qui n’avaient ni science ni matière par où tout à loisir ils sussent percer notre acier ; ajoutez-y les foudres et tonnerres de nos pièces et arquebuses, capables de troubler César même, qui l’en eût surpris autant inexpérimenté, et à cette heure, contre des peuples nus, si ce n’est où l’invention était arrivée de quelque tissu de coton, sans autres armes pour le plus que d’arcs, pierres, bâtons et boucliers de bois ; des peuples surpris, sous couleur d’amitié et de bonne foi, par la curiosité de voir des choses étrangères et inconnues : ôtez, dis-je, aux conquérants cette disparité, vous leur ôtez toute l’occasion de tant de victoires.
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