La Princesse de Clèves / Analyse linéaire
Fiche : La Princesse de Clèves / Analyse linéaire. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Walky • 10 Avril 2022 • Fiche • 2 880 Mots (12 Pages) • 946 Vues
TEXTE 3: EXPLICATION LINEAIRE REDIGEE
Mme de Lafayette, La Princesse de Clèves (1678)
« Il parut alors une beauté à la Cour »
Questions préparatoires :
1. Quel effet produit Mlle de Chartres lorsqu’elle paraît à la cour ?
2. À quoi la partie centrale du texte est-elle consacrée ? Pourquoi cela peut-il étonner ?
Introduction
- Situation : Après le tableau de la Cour qui s’est terminé par la présentation du duc de Nemours, sont mentionnés les pourparlers de paix qui aboutiront au traité de Cateau-Cambrésis, puis les prétentions de M. de Nemours en matière de mariage : avec le soutien du roi, il espère obtenir la main d’Élisabeth d’Angleterre. Ce n’est qu’après cette longue mise en place qu’apparaît l’héroïne. La romancière a d’abord voulu décrire le monde de la cour de manière détaillée, dans le but de faire apparaître Mlle de Chartres, future princesse de Clèves, comme d’autant plus exceptionnelle qu’elle surpasse en beauté tous les membres de cette cour, qui sont pourtant ce qu’il y a de « mieux fait », et qu’elle a été éduquée par une mère soucieuse de vertu et de morale dans un monde si corrompu.
- Caractérisation : Le portrait de Mlle de Chartres apparaît aussi idéalisé et indéterminé que celui d’un personnage de conte de fées. L’originalité du passage tient à la place accordée au personnage de la mère, dans un passage pourtant centré sur la fille. Il s’agit en effet d’opposer l’éducation donnée par Mme de Chartres à sa fille aux mœurs corrompues qui règnent à la cour, décrites dans les pages précédentes.
- Problématique : En quoi Mme de Lafayette fait-elle apparaître d’emblée son héroïne comme un être exceptionnel ?
- Plan du texte :
1. L’apparition d’une beauté exceptionnelle à la cour (première phrase)
2. Une éducation exceptionnelle : le rôle de Mme de Chartres dans la constitution du caractère fort et vertueux de sa fille (suite et fin du premier paragraphe)
3. Un objet d’admiration : retour sur l’effet que suscite l’apparition de Mlle de Chartres lors de son entrée dans le monde (second paragraphe)
(À noter : on peut ainsi noter une construction en boucle, les passages sur l’apparition encadrant celui sur l’éducation, qui s’avère essentiel pour la suite du roman.)
1. L’apparition d’une beauté exceptionnelle à la cour (première phrase)
La longueur de cette première phrase (cf. ci-après Point de grammaire) s’explique par une stratégie dilatoire, une volonté de retarder le moment où l’on nommera la beauté si parfaite dont il est question. Le passage s’ouvre sur une formule qui peut faire penser à la deuxième étape du schéma narratif d’un conte de fées (élément modificateur) : l’adverbe de temps « alors » et l’emploi du passé simple introduisent le moment où un élément survient qui perturbe la situation initiale. Le sujet réel du verbe impersonnel (« il parut ») est un substantif précédé d’un article indéfini (« une beauté »). Dans cette cour si agréable et qui fonctionne selon un mouvement perpétuel d’« agitation sans désordre », « une beauté » qui n’a pas encore de nom fait son entrée. La proposition subordonnée relative explique l’effet de cette beauté sur la cour : elle opère comme un charme dans la mesure où elle fait converger tous les regards sur elle. Cette précision donnée, une conclusion sous forme de correction, d’ajout apporté à la description initiale, est avancée : il ne peut s’agir que d’une « beauté parfaite ». Le même substantif abstrait et idéalisant est donc répété, mais suivi cette fois d’un adjectif tout aussi abstrait et idéalisant à valeur d’hyperbole. La narratrice s’inclut dans le pronom indéfini « on » pour avancer un raisonnement logique : la raison apportée à l’hypothèse avancée apparaît dans une subordonnée circonstancielle de cause introduite par la conjonction « puisque ». Le raisonnement est le suivant : on voit à la cour ce qu’il y a de plus beau (majeure) ; or, la cour est émerveillée par cette jeune fille (mineure) ; donc, cette jeune fille est une beauté qui surpasse toutes les autres (conclusion). Il faut noter la présence du champ lexical de la vue (« attira les yeux », « si accoutumé à voir ») dans un contexte qui est celui du règne des apparences.
2. Une éducation exceptionnelle (suite et fin du premier paragraphe)
L’héroïne n’est toujours pas nommée, mais désignée par le pronom de 3e personne « elle ». Cependant, on apprend de quelle famille elle vient : son rang et sa fortune en font un des plus brillants partis de France. La perfection physique de la jeune fille se double donc d’une origine illustre. La deuxième phrase est construite autour d’un comparatif d’égalité qui permet d’introduire le nom de la maison à laquelle appartient la jeune fille (« Elle était de la maison du vidame de Chartres ») et d’un superlatif de supériorité (« une des plus grandes héritières de France »), qui élève encore la valeur du personnage du fait de sa fortune. La troisième phrase nomme la jeune fille de manière indirecte : on nomme la mère, Mme de Chartres, ce qui permet de déduire l’identité de la fille (Mlle de Chartres). Les quelques lignes consacrées à la famille de l’héroïne ont encore une fois l’apparence d’un conte de fées : le « père était mort jeune, et on l’avait laissée sous la conduite » de sa mère. Cependant, la mère n’est pas une marâtre, au contraire, comme le souligne la proposition subordonnée relative introduite par le pronom « dont ». Cette relative brosse en effet très succinctement le portrait de Mme de Chartres. De nouveau, nous sommes dans l’idéalisation. Pas de description physique, mais simplement des substantifs renvoyant à des qualités d’ordre moral (« le bien, la vertu et le mérite »), qualifiées par l’adjectif à valeur hyperbolique « extraordinaire », déjà utilisé maintes fois pour qualifier les autres personnages. Il est intéressant de noter qu’alors que les membres de la cour sont tous beaux, Mme de Chartres n’est pas décrite physiquement : elle est là pour opposer à la corruption des mœurs de la cour une perfection morale. La mort de son époux a mené Mme de Chartres à se retirer du monde, comme le souligne l’analepse au plus-que-parfait. Ce retrait a permis à Mme de Chartres de donner à sa fille (toujours pas véritablement nommée) une éducation exceptionnelle car elle a pu se concentrer sur l’essentiel. L’emploi des adjectifs possessifs (« ses soins », « sa fille ») met en valeur l’entier dévouement à celle qui a reçu son éducation.
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