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L'intérêt de Stendhal pour l'analyse des sentiments amoureux

Étude de cas : L'intérêt de Stendhal pour l'analyse des sentiments amoureux. Recherche parmi 300 000+ dissertations

Par   •  31 Janvier 2021  •  Étude de cas  •  2 964 Mots (12 Pages)  •  418 Vues

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Éléments d'introduction :

Intérêt de Stendhal pour l'analyse des sentiments amoureux : CF en 1822 son essai De l'amour où il développe sa théorie de « la cristallisation » devenue célèbre. (phénomène d'idéalisation à l'œuvre au début d'une relation amoureuse).Théorie mise en scène dans le Rouge et le noir qui fait vivre au héros 2 histoires d'amour successives, occupant chacune une partie du roman.

Le chapitre 14 de la 2e partie traite précisément des nouvelles amours de Julien : après Mme de Rênal à Verrière, Mathilde de la Mole à Paris s’éprend à son tour de Julien Sorel. Piquée par la froideur que celui-ci affiche envers elle bien qu’il ait remarqué l’intérêt qu’elle lui porte, la jeune fille, contre toute bienséance prend l’initiative d’une déclaration d’amour écrite, par une première lettre jetée à Julien dans la bibliothèque au chapitre précédent. Celui-ci, conscient de la mésalliance qu’impliquerait cette relation, craint comme l'indique le titre du chapitre 13, « un complot » des jeunes aristocrates visant à le ridiculiser.

Dans un monologue intérieur entrecoupé par des intrusions d'auteur ou commentaires ironiques du narrateur, Stendhal introduit son lecteur au plus près des délibérations du héros avant un coup de théâtre entraînant sa résolution finale.

(lecture )

- mouvement : 1er temps lignes 1 à 14 : Délibérations de Julien sous forme d'un monologue intérieur. Réflexion d’un Machiavel en herbe ; 2e temps lignes 15 à 22 : relecture ironique du narrateur et coup de théâtre ; 3e temps ligne 23 25 : résolution et chute .

- Projet de lecture : texte qui met en scène « l'amour de tête » ( selon l’expression de Stendhal lui-même) entre Mathilde et Julien en contrepoint des « amours de cœur » vécues avec Madame de Rênal.

Premier temps : lignes 1 à 14.

Délibérations d'un Machiavel en herbe : le monologue intérieur de Julien.

p 366 le narrateur note ironiquement que Julien « croyait à Mathilde la duplicité de Machiavel ». La comparaison vaut pour lui qui, quoiqu’inexpérimenté en amour, croit penser ici en stratège de la séduction.

Lg 1 à 7 : Premier moment de la délibération : prudence et doute quant aux sentiments supposés de Mathilde.

Lg 1 « Si tout ceci n'est pas un jeu convenu avec le comte Norbert … »

- à 3 reprises expression du doute CF 3 subordonnées d'hypothèse : « si tout ceci n'est pas un jeu.. », reprise inversée ligne 11 « si tout ceci n’est qu’un jeu » puis ligne 12 « s'ils se moquent de moi ». Hésitation sur l’interprétation de la conduite de Mathilde visible aussi ds les contradictions du héros cf antithèse Ligne 1 et 11 : hypothèse d'un jeu successivement niée puis postulée.

- Interrogations sur la nature des sentiments de Mathilde d'où les périphrases employées : pronoms neutres indéfinis « tout ceci » ligne 11 « ceci » ligne 13.

- hypothèse d'un « complot » (titre du chapitre 13 ), d'une « conspiration contre le fils du charpentier » comme Julien le dira page 368 , qui viserait à éprouver son honnêteté voire à le ridiculiser en lui faisant miroiter des amours auxquelles son origine sociale lui interdirait de prétendre. Idée d'une coalition des aristocrates dans l'usage du pluriel « ils » ligne 13 ou la périphrase « jeu convenu avec le comte Norbert » autre nom du « complot ».

Lg 2-4 Il est clair que ce sont mes regards pleins de froideur qui ont allumé l'amour baroque que cette fille de si haute naissance s’avise d'avoir pour moi.

- Froideur de Julien souvent notée dans le récit et caractéristique de « l'amour de tête » comme le nomme Stendhal

o revendiquée par le héros qui se félicite de l'effet de ses « regards pleins de froideur »

o soulignée par le narrateur dans l'hyperbole qui conclut le paragraphe ligne 6-7 et le champ lexical qui est associé : « raisonnement », parallélisme « plus froid et plus calculant », superlatif « qu'il n'avait été de sa vie ». La réflexion prend le pas sur l'émotion : on le constate dans le discours de la lucidité chez le héros avec des expressions comme « il est clair que »

- Cette froideur qui semble nier le sentiment amoureux se manifeste aussi par des marques de distance critique comme :

o L'antithèse amusée entre les 2 hyperboles opposant « les regards pleins de froideur » de Julien et le feu de la passion paradoxalement « allumé » chez Mathilde

o les démonstratifs à connotation méprisante dans les périphrases ironiques désignant Mathilde « cette fille de si haute naissance », « cette grande poupée blonde » On notera que Mathilde n'est jamais désignée par son prénom et que Julien conformément à la première impression qu'elle lui a fait ne semble pas séduit (CF chapitre 2 « elle ne lui plut point », Chapitre 8 « que cette grande fille me déplaît »). Il la réduit à son rang social souligné par l’intensif « si haute naissance », et à sa beauté glacée qui la déshumanise en simple « poupée » sans l’émouvoir.

o L'adjectif « baroque » employé par Julien pour qualifier l'amour supposé de Mathilde + moqueur qu’amoureux ; de fait s'il aime ensuite Mathilde ce sera davantage par vanité que par inclination véritable.

Lg 4-5 Je serais un peu plus sot qu'il ne convient, si jamais je me laissais entraîner à avoir du goût pour cette grande poupée blonde.

- Nouvelle hypothèse qui traduit la prudence du héros cf proposition subordonnée de condition + usage du conditionnel. Prudence mimée aussi par la syntaxe puisque l'éventualité de l'amour est rejetée en fin de phrase comme elle est rejetée pour l'instant par le héros. Refus même de nommer le sentiment comme tel : pas d'amour mais des périphrases / euphémismes « avoir du goût pour », « se laisser entraîner à ».

- Orgueil sensible aussi dans la litote de la ligne 4 « je serai un peu plus sot qu'il ne convient » qui s’explique ensuite : conscience orgueilleuse de la mésalliance sociale, cf antithèse entre « cette fille de si haute naissance » et le simple pronom « moi » qui mime l’écart voire le rempart social « entre elle et [lui] »

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